« L’industrie régionale contribue à la croissance du PIB » (Marcel Ragni, UIMM Sud-Corse)

Désormais considérée comme un élément indispensable de la souveraineté française, l’industrie a retrouvé des couleurs, du financement et une attractivité qui fait du bien à un secteur longtemps mal considéré. Et dans le Sud, c’est une industrie très diversifiée qui prend sa place ce qui n’empêche pas les défis, au rang desquels se trouvent la formation, la marque employeur – élément de l’attractivité – et la féminisation, des sujets primordiaux pour le président de l’UIMM Côte d’Azur et président de l’UIMM Sud-Corse.
(Crédits : DR)

L'industrie va (plutôt) bien, merci. Désormais fer de lance de la souveraineté française ce secteur - abandonné, regardé avec dédain des décennies durant - redevient majeur pour construire la croissance. Selon les données publiées par France Industrie, au premier trimestre 2024 l'industrie tricolore a produit une croissance de 1,1% du PIB hexagonal, a été meilleure de 2% en mars 2024 sur l'exportation de marchandises en un an glissant et de 14, 7% sur trois mois comparés au taux annuel. Et si on sait que le solde de créations d'usines est positif, la création d'entreprises se comporte bien aussi. Un bon comportement et une contribution de la part de 260.000 entreprises - majoritairement des TPE/PME - lesquelles génèrent 7,6 millions d'emplois directs et indirects pour une valeur ajoutée de 274 milliards d'euros.

Dans le Sud, l'industrie aussi se porte bien. Une filière très diversifiée qui réunit 170.200 salariés, fortement exportatrice - 61% du chiffre d'affaires export est porté par les entreprises industrielles - et très innovante puisque à l'origine de 63% des brevets régionaux déposés selon les données recensées par RisingSud, l'agence de développement économique et d'attractivité de la Région Sud.

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Faire sauter les verrous

Le Sud qui dispose d'un tissu industriel très diversifié, de Fos-sur-Mer à Carros et Nice, portée par les parfumeurs à Grasse, par la défense à Toulon, l'agro-alimentaire dans le Vaucluse... Sans omettre la fabrication additive, cette fabrication 3D qui vient accompagner la numérisation d'une industrie de plus en plus numérique.

L'industrie 4.0 est un peu le bâton de pèlerin que porte depuis bien longtemps Marcel Ragni. Il faut dire que la transformation de l'industrie tricolore, il l'a observé de près, voyant la petite entreprise familiale basée à Cagnes-sur-mer près de Nice, spécialisée dans la ferronnerie devenir une ETI française, spécialiste de solutions d'éclairage public. Une industrie donc redevenue au centre du jeu. Si le Plan de relance national dédié, post-Covid, a servi de levier pour réentraîner le mouvement de réindustrialisation, dès 2019 c'est le dispositif Territoires d'industrie qui vise à déjà remettre la filière dans un effet dynamique. D'ailleurs, c'est Carros, dans les Alpes-Maritimes, qui signe le premier engagement. Interrompu par la crise sanitaire, le dispositif a été récemment relancé et renforcé, concernant désormais non plus 143 territoires mais 186 territoires. Dans le Sud, cela inclut la Métropole Nice Côte d'Azur, le Var également pour la partie Dracénie et Pays de Fayence, le Vaucluse, les Alpes de Haute-Provence, Aix-Marseille Provence, Cannes-Grasse-Sophia-Antipolis, le Val de la Durance... France 2030 a également porté sa contribution, soutenant les projets de nombreuses PME à se concrétiser. « Tout ce qui parle de l'industrie permet de la faire briller », se réjouit le président de l'UIMM 06 et de l'UIMM Sud-Corse. Territoires d'industrie ? La meilleure façon en mettant un duo institution/entreprise au pilotage de faire sauter les verrous existants. Et des freins, il en existe... Manque de foncier, permis de construire ou tout simplement mettre de l'huile dans les rouages par le dialogue... c'est aussi à cela que sert Territoires d'industrie. Un dispositif complémentaire qui « doit passer à la deuxième phase », annonce Marcel Ragni, rappelant que la volonté politique de réindustrialiser a insufflé un espoir pour toute la filière, après des années de discrimination. « L'industrie gagne des points de PIB, preuve que cette volonté de remettre l'industrie au cœur des stratégies fonctionne », pointe encore Marcel Ragni. Sur le seul périmètre de la Métropole Nice Côte d'Azur, le chiffre d'affaires généré - 3 milliards d'euros - est plus important que le chiffre d'affaires du tourisme qui cumule à 2,7 milliards d'euros.

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Former pour retrouver des expertises

Si la réindustrialisation est enclenchée, cela ne dissipe pas les enjeux qui vont avec. Au titre desquelles la formation notamment, « clé de voûte », alors que le gouvernement aide moins. Et la formation, ce n'est pas uniquement la formation initiale, c'est aussi la formation continue. « Les plans de formation dans les entreprises sont primordiaux. L'IA, notamment, va modifier notre façon de travailler. Il faut donc rester à l'écoute et faire évoluer ses salariés ».

L'école de production prévue pour ouvrir à Nice sera d'ailleurs opérationnelle dès octobre 2024. Elle accueillera pour une première promotion une quinzaine d'élèves, puis la seconde en intégrera 30 et enfin la troisième, 45 élèves. Parmi les challenges qui se présentent, figurent certes les nouveaux métiers mais aussi tous ceux, déjà connus mais qui ont été abandonnés. « Nous avons perdus des talents, notamment pour ce qui concerne le secteur nucléaire », pose encore Marcel Ragni.

C'est là où intervient ce que l'on appelle la marque employeur. Un sujet parfois regardé de très loin par les PME. Or, c'est là un levier majeur dans l'attractivité des compétences. Un travail de sensibilisation que mène d'ailleurs l'UIMM 06 auprès de ses adhérents. Car face aux bouleversements des métiers, attirer la juste expertise devient un exercice complexe. La féminisation des métiers est aussi le prochain chantier. Rendre l'industrie attrayante est indispensable pour faire face à ce défi de l'attractivité et des besoins en compétences.

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Sites clés en main : oui, mais...

Autre défi, la réglementation est souvent un empêcheur de croître en rond. ZAN, RT2020... tout cela « crée beaucoup de contraintes », qui oblige les industriels à s'adapter et aussi, à innover.... Mais le besoin en foncier demeure une réalité et un caillou dans la chaussure en même temps. Le gouvernement a ainsi estimé à 20.000 hectares les besoins en terrain pour accompagner la réindustrialisation. L'annonce fin avril d'une cinquantaine de sites dits clés en main c'est-à-dire identifiés comme étant des sites prêts à accueillir les projets d'usines est une bonne idée dans le fond. Dans la forme, ce n'est pas toujours aussi simple. Dans le Sud, parmi les 8 sites clés en main identifiés, le site immédiatement opérationnel est basé à Arles, sur le site industriel et portuaire pour 25 hectares, les prochains le seront à horizon 2025-2027 puis à horizon 2030. Un temps qui peut paraître court mais long aussi quand le carnet de commandes est plein et l'entreprise dans les starting-blocks. Et la réindustrialisation, au-delà de servir la souveraineté, est aussi un levier de compétitivité. Qu'il ne faudra pas lâcher mais continuer à soutenir. Contre vents et marées, sans changer de cap.

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