Dans le Sud, les besoins en recrutement confirment la mutation de l’économie

Avec près de 248.000 besoins en main d’œuvre déclarés selon le rapport annuel de France Travail, Provence Alpes Côte d’Azur confirme le retour à une certaine stabilité de son dynamisme économique. Moins importants qu’en 2023, ces intentions d’embauches soulignent notamment l’intérêt pour l’agriculture et le commerce, alors que les services demeurent inlassablement le premier secteur employeur. Cependant, la mutation de l’économie – reconversion, nouvelle façon de recruter… – joue aussi sur le comportement de l’emploi.
(Crédits : DR)

Pour une fois, Provence Alpes Côte d'Azur ne fait pas différemment de la tendance nationale. Et à l'instar d'autres indicateurs économiques, c'est un retour au niveau d'avant-crise qui se produit aussi pour les besoins en main d'œuvre. C'est ce que souligne, entre autres, le rapport annuel publié par France Travail, lequel porte a 247.600 exactement les intentions d'embauches des entreprises implantées dans le Sud. Une donnée en recul par rapport à l'année précédente, plus élevée alors de 30.000 intentions. Une situation qui reflète exactement le comportement de l'économie, qui, post crise sanitaire, a encaissé de nouveaux soubresauts dont les difficultés d'approvisionnement et les tensions géopolitiques, ce qui a obligé à une adaptation au plus près, gelant parfois des perspectives de recrutement en attendant une dynamique plus favorable.

Évolution économique et évolution sociétale

« Nous revenons à une normale pré-Covid », confirme d'ailleurs Pascal Blain. Le directeur régional de France Travail estimant que « nous restons dans une bonne dynamique, avec un nombre de demandeurs d'emploi qui baissent plus vite dans notre région, qu'ailleurs. Les nouvelles sont bonnes, compte tenu du contexte économique ».

Le recrutement, en revanche, semble toujours difficile ou en tout cas, reste perçu comme tel, 62% des entreprises interrogées le ressentant ainsi. « C'est un sujet de questionnement pour les entreprises » reconnaît Pascal Blain qui tient cependant à souligner le niveau d'engagement des jeunes toujours aussi élevé, malgré ce qui est souvent commenté, sur cette part de la population parfois taxée de ne pas vouloir travailler. « Le vrai sujet c'est quelle est la place du travail aujourd'hui en France ? Les salariés recherchent autre chose. Et les entreprises font des efforts en ce sens, en travaillant l'attractivité des offres, le sens de l'action, l'aménagement du temps de travail, leur capacité d'inclusion... Ce qui vaut aussi pour l'emploi public, qui représente 22% de l'emploi total et qui a travaillé sur son attractivité ».

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Paradoxe industriel, logique des services

Pascal Blain qui soulève un autre point, la notion de savoir-faire, laquelle est majeure dès lors que l'on regarde l'industrie, un secteur qui ne concentre « que » 3% des intentions d'embauche. Une donnée qui peut paraître paradoxale au vu des projets de réindustrialisation attendus. Il faut dire que ces grands projets d'industrie verte annoncés n'entreront en phase active que dans les prochaines années, ce qui sera alors bien plus visible dans les données de besoins en recrutements. Pour l'heure, les profils recherchés sont ceux d'ouvriers du traitement de déchets, de l'électricité ou de l'électronique. « Mon obsession est d'accompagner ces grands projets industriels qui prévoient 50.000 à 60.000 emplois indirects. On peut toujours rêver d'un modèle à l'italienne avec un ruissellement des sous-traitants vers d'autres zones du département. La croissance de l'emploi industriel dans la région est presque exponentielle. Cela est très encourageant car il s'agit d'économie réelle et durable ».

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Malgré la délicate période qu'elle traverse, la construction prévoit 17.420 embauches, essentiellement dans des métiers de plombiers chauffagistes, maçonnerie, menuiserie et agencement.

Vraie filière qui s'impose de plus en plus, ou en tout qui est sans nulle doute plus visible, l'agriculture et l'industrie agro-alimentaire signifient leurs besoins à hauteur de 24.900 embauches, majoritairement sur des profils d'agriculteurs, viticulteurs et arboriculteurs. On rappellera que Provence Alpes Côte d'Azur est notamment la première région en bio et que les départements du Vaucluse comme du Var participent à la structuration de la filière, le premier en agro-agri, terre d'implantation de nombreuses entreprises comme Gyma, Le Coq Noir, Ducros, les Truffières de Rabasse, Florette..., le second en viticulture.

Assez logiquement, ce sont les services qui constituent le premier secteur recruteur, concentrant à lui seul 68% des intentions d'embauches. Un secteur où ce qui compte « c'est le savoir-être », dit Pascal Blain. Un secteur par ailleurs très consommateur de main d'œuvre saisonnière, ce qui est renforcé par l'accueil des grands événements que sont les Jeux Olympiques 2024 et le Tour de France dont plusieurs étapes se déroulent dans le Sud avant un final sur la Promenade des Anglais.

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Un PIC attendu

Sujet majeur, qui sous-tend intentions d'embauches et mutation de l'économie, le sujet de la formation est sans nul doute encore bien plus prégnant qu'auparavant. Le prochain Plan d'investissement dans les Compétences (PIC) 2024-2027 est d'ailleurs attendu, tout comme le rapport de la Cour des Comptes sur le plan précédent. « Nous avons une focale sur le public éloigné de l'emploi. Nos méthodes de recrutement sans CV - détection de potentiel, recrutement immersif, forum inversé... - fonctionnent très bien », tient à souligner Pascal Blain. Les entreprises aussi, ont leur rôle à jouer, en ouvrant leurs portes, en désacralisant parfois certains métiers une façon, par exemple, de gommer les idées reçues. « Les employeurs ont tout intérêt à montrer à voir. Il est dommage d'investir du temps et de la formation sur des profils qui démissionneront ensuite rapidement », dit encore le directeur régional de France Travail. Qui porte un regard assez confiant sur l'économie de Provence Alpes Côte d'Azur. « Avec les services, l'industrie, le numérique et l'agriculture, nous disposons d'une économie bien équilibrée ». Et donc aussi capable d'absorber les fluctuations en tout genre. Une particularité qui se révèle, finalement, temps de crise ou pas, un atout.

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