Face aux « vertiges » mondiaux, Marseille-Fos poursuit la mutation de son modèle économique

Alors que le contexte mondial est perturbé et en recul, le Grand Port Maritime affiche près de 11% de croissance de son chiffre d’affaires. Un GPMM devenu port entrepreneur en accord avec son plan stratégique 2020-2024 grâce notamment à sa capacité foncière, laquelle lui permet d’accueillir de grands projets d’industrie décarbonée, tels Carbon, H2V ou GravitHy. Et s’il est question de muscler encore l’hinterland, de déployer le fluvial notamment, pour poursuivre sa dynamique de hub logistique, Marseille-Fos est entré dans une nouvelle phase où le trafic ne constitue plus l’alpha et l’oméga de la croissance.
(Crédits : DR)

L'exercice de restitution des résultats de l'année écoulée est habituel, certes, mais désormais le focus ne se pose pas - plus ? - sur les niveaux de trafic obtenus. Si auparavant on scrutait le comportement des vracs solides, liquides, du roro ou des conteneurs, désormais le curseur s'est déplacé. Non pas qu'il faille oublier ces éléments économiques tangibles - la croissance 2023 est notamment tirée par le trafic passagers, en hausse de 36% - mais ce qui fait la bonne santé du port se trouve aussi ailleurs. La croissance de 10,8% enregistrée pour l'exercice 2023, portant le chiffre d'affaires à 210,5 millions d'euros alors que le contexte mondial recule, valide l'approche.

L'horizon : souveraineté et décarbonation

Le plan stratégique établit pour la période 2020-2024 l'avait laissé entendre : Marseille-Fos avait vocation à devenir un port entrepreneur. On était évidemment loin d'en appréhender les contours exacts, imaginant un port devenir incubateur de startups et projets innovants... De fait, c'est bel et bien le cas, mais les projets s'appellent Carbon - gigafactory solaire - H2V - production d'hydrogène par électrolyse de l'eau (84.000 tonnes prévues par an) ou encore GravitHy, dédié à l'acier vert. Des projets d'ampleur, stratégiques pour le territoire mais aussi pour la France. Voilà qui place Marseille-Fos encore davantage au centre du jeu car il ne s'agit pas uniquement d'accueillir en son sein, il faut aussi fournir les conditions de transports qui mènent vers les destinations névralgiques, ce qui signifie intensifier les relations avec son hinterland, déployer plus encore le fluvial et le ferroviaire.

« Avant de parler du port, il faut parler du monde », estime Christophe Castaner. Une façon pour le président du conseil de surveillance du GPMM de dire que si le modèle économique évolue c'est que le contexte mondial aussi, parce que dit-il « il y a des vertiges auxquels il faut faire face ». Des vertiges qui s'appellent crainte de perte de la souveraineté. « Le plus grand risque étant la perte de contrôle », assure l'ancien ministre. « La souveraineté c'est choisir pour nous-même ce que nous devons contrôler et ce que nous devons réguler ». Et la perte de contrôle, « c'est la désindustrialisation ».

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Un port en (très) grand

C'est là où Carbon, H2V ou encore GravitHy viennent apporter des solutions à la fois de réindustrialisation et de souveraineté. Ces trois projets sont d'ailleurs entrés en phase de concertation publique, l'étape indispensable pour permettre l'acceptabilité nécessaire auprès du citoyen tout en définissant des contours plus précis. Trois projets - pour le moment, aucun autre n'est connu - qui s'inscrivent dans ce que Christophe Castaner indique être « la troisième révolution économique du port, celle de la décarbonation ». Un port qui fait aussi croître ses investissements : 118 millions d'euros au global sont programmés pour 2024 contre 76 millions d'euros en 2023 et 60 millions d'euros en 2022. C'est que Marseille-Fos doit aussi être un Port en Grand, rappelle l'ancien ministre de l'Intérieur, « nous devons avoir de l'ambition ». C'est dans ce cadre que Marseille-Fos s'est affirmée plus fortement sur l'axe MeRS (Méditerranée, Rhône, Saône) en investissant dans les ports de Mulhouse Rhin avec Swissterminal et de Haropa. Car l'hinterland est prioritaire dans la stratégie et doit aller, insiste le président du conseil de surveillance, au-delà de Lyon, vers la Bourgogne-Franche-Comté et l'Allemagne. Les investissements qui vont aussi intensifier le branchement à quai/CENAQ qui a bénéficié en 2023 d'une enveloppe de 8,8 millions d'euros. 57 millions d'euros vont être consacrés en 2024 à la transition écologique et à la décarbonation. Un « mur des investissements » comme l'appelle Hervé Martel, le président du directoire, qui doit permettre de « faire face aux défis » et surtout préparer l'avenir proche comme plus lointain.

Du rôle prépondérant de l'amorçage

Car 2024, dernier virage du plan stratégique en cours, est aussi l'année de la préparation du prochain plan stratégique. Hervé Martel le redit, « nous sommes plus qu'un fournisseur de foncier ». S'il ne précise pas les montants consacrés aux onze prises de participation dans les sociétés, Christophe Castaner estime que le rôle du GPMM est « d'amorcer des projets ». Comprendre faciliter leur réalisation dès lors qu'ils font sens et s'inscrivent dans la stratégie territoriale. La volonté est bien de poursuivre la dynamique qui fait de Marseille-Fos un hub logistique de premier ordre. « Nous faisons partie des 15 ports les plus performants ». Un port qui, dit aussi le président du conseil de surveillance, « prépare le XXIIème siècle ».

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