Deux-cent artistes de tous les univers musicaux dont certains très en vue, et la mer en arrière plan. Difficile désormais de passer à côté du Delta Festival, devenu l'un des festivals français les plus attractifs avec 150.000 visiteurs attendus cette année. Un chiffre en hausse de 60 à 70 % chaque année depuis sa création en 2015 par Matthieu Predal et Olivier Ledot, alors étudiants.

« Au départ, notre idée était d'organiser le plus grand rassemblement étudiant français à Marseille pour travailler l'attractivité et attirer les jeunes dans cette ville», explique Matthieu Predal. Une ville qui souffre alors d'une assez mauvaise réputation et fait souvent figure d'élève très moyen dans le classement des villes les plus attractives. C'est afin de redorer son image que les étudiants ont envie de créer « un grand événement qui montre Marseille comme on la voyait nous. Ouverte sur le monde, avec des prix de l'immobilier qui étaient à l'époque plutôt accessibles, des activités de plein air très nombreuses, une vie culturelle et nocturne bouillonnante... ».

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Viser la jeunesse dans sa pluralité

Pour devenir l'événement qu'il est aujourd'hui, le Delta Festival n'a eu de cesse de prendre le pouls de la jeunesse, sa cible. Des étudiants d'abord. Puis la jeunesse dans son ensemble. « Nous avons voulu travailler le sujet de la jeunesse à 360°, en abordant toutes ses composantes, tous les sujets qui l'intéressent ». Ce, en mobilisant « un maximum de structures », associations, influenceurs, mais aussi startups avec qui les festivaliers peuvent échanger dans le cadre de villages de plus en plus nombreux au fil des éditions. Parmi les thèmes abordés dans ces villages : la vie étudiante, l'emploi, l'économie, l'environnement, la santé, la lutte contre les discriminations... Ceci dans un cadre musical « qui fédère et met tout le monde en position de discuter ».

C'est ainsi que le festival attire de plus en plus de jeunes, d'artistes -dont des têtes d'affiche de plus en plus attractives comme Angèle ou Niska cette année-, d'associations et d'entreprises qui y voient un moyen de toucher un public jeune pas facile à atteindre.

Un vecteur d'attractivité

Pour son édition de 2023, le festival compte 700 structures partenaires (dont des ONG comme Amnesty International, GreenPeace ou la Fondation des femmes), ainsi que 100 startups qui auront l'occasion de se présenter aux festivaliers.

En interne, le Delta Festival s'appuie sur 35 salariés (CDD ou CDI) auxquels s'ajoutent une dizaine d'alternants. Les cinq journées de festival mobilisent en outre, et sans trop de difficultés, 3.000 bénévoles. Quant au budget, il s'élève à 12 millions d'euros, dont 95 % en autofinancement. « C'est un vrai projet entrepreneurial ».

Projet qui ne veut pas se contenter d'être « un moment de fête. Le Delta Festival est un projet de territoire ». Avec, au-delà des rencontres qu'il génère entre toutes les strates du territoire, des retombées de 10 millions d'euros pour l'économie locale.

Ce qui intéresse forcément les acteurs de l'économie partenaires de l'événement, parmi lesquels l'UPE 13, la CCI d'Aix-Marseille Provence, le Top 20...ainsi que des entreprises comme le Crédit Mutuel, Deezer ou encore Solimut. « Ces entreprises nous soutiennent et s'engagent à nos côtés en intervenant auprès des jeunes sur les thématiques qui sont les leurs : musique, santé, création d'entreprise... ». Une façon pour elles de se faire connaître auprès des jeunes Marseillais qu'il s'agit de retenir sur le territoire pour peut-être les recruter un jour, mais aussi d'attirer d'autres profils venus d'ailleurs puisque 60 % des festivaliers sont issus d'autres départements que les Bouches-du-Rhône. « Le Delta Festival participe à l'attractivité du territoire ».

Porte-parole des jeunes

Promoteur de l'engagement auprès des jeunes, le festival en est aussi leur porte-parole. Une posture amplifiée en 2022 avec la création du Monde des Possibles, « second cœur battant du festival ».

Ce projet prend racine en 2020, au moment de l'épidémie de covid-19. « Pendant cette période, les jeunes étaient souvent montrés du doigt parce qu'ils continuaient de sortir et de faire la fête malgré les confinements. On a eu envie de dire qu'il fallait peut-être les écouter. C'est à ce moment de la vie que se crée le capital social, qu'on a besoin de chercher un emploi, des amis, l'amour de sa vie... Parmi ceux que l'on voyait sortir, certains vivaient peut-être dans un studio de 10 m² et avaient besoin de respirer. Quelles réponses leur apporter ? Nous avons eu envie de nous servir du festival pour faire remonter leur parole et leurs attentes sur différentes thématiques ».

C'est ainsi que les différents villages créés au fil des années sont réunis sous la bannière du Monde des Possibles. Sorte de convention citoyenne qui mêle prises de parole de porteurs d'initiatives ou d'influenceurs, moments d'échanges... Et qui aboutit à la rédaction d'un livre blanc énumérant différentes propositions présentées par les partenaires de l'événement et soumises au vote des festivaliers. Charge ensuite aux organisateurs du festival de diffuser ce livre blanc auprès d'un public le plus large possible : entreprises, collectivités locales et grand public.

La mer comme horizon

Connecté à toutes les composantes sociétales de son territoire, le Delta Festival l'est aussi vis-à-vis de son environnement naturel. Et cherche à réduire le plus possible ses externalités négatives.

Parmi les actions mises en place : l'obligation pour les foodtrucks prestataires de proposer de la vaisselle compostable, la suppression des bouteilles en plastique depuis deux ans -soit 10.000 bouteilles économisées chaque année-, une brigade de bénévoles qui se relaient pour veiller qu'aucun déchet ne finisse par terre, ni en mer.

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Une mer avec qui le festival veut rester connecté malgré son déménagement prévu dès l'an prochain vers l'hippodrome Borély, quelques centaines de mètres en amont de la plage. Car au-delà d'offrir un décor attractif aux prestations des artistes, la mer est au cœur de l'identité du festival. « Depuis notre première édition, nous proposons des sports nautiques, de la baignade ». Et là encore, il ne s'agit pas que de fête. Dans une ville où les habitants tendent à se détourner de la mer et où tant de jeunes ne savent pas nager, le festival veut recoller les morceaux. Convaincu que l'horizon des possibles de la Cité phocéenne ne se dessinera pas sans elle.