Rachat de La Provence : Saadé veut accélérer, Niel n’a pas dit son dernier mot

Alors que l’appel interjeté par le patron de Free était examiné par la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence ce 28 mars, le PDG de CMA CGM joue la carte communication et appelle à une accélération du dossier. Mais tous les jeux ne sont pas faits. Car outre la décision finale de la Cour d’Appel, connue le 7 avril prochain, demeure le droit et les leviers juridiques dont Xavier Niel ne risque pas de se priver pour acquérir les 89% du capital appartenant à GBT.
(Crédits : DR)

Chaque épisode cristallise un peu plus l'attention et les tensions. Il y a eu l'attaque au tribunal de commerce du droit d'agrément dont disposait Xavier Niel, l'ouverture des offres par le tribunal de Bobigny, la venue de Xavier Niel dans les locaux du quotidien... Ce 28 mars, c'est l'examen par la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence de l'appel interjeté par le patron de Free, pas content de la levée de son droit d'agrément, qui concentre les attentions. Une nouvelle étape dans le processus de rachat des 89% des parts appartenant au Groupe Bernard Tapie qui est loin d'être un simple appel. Car du résultat dépend (beaucoup) l'issue de ce que l'on appelle le « dossier ».

Un « investissement » temps de Saadé, qui veut aller vite

Car la « victoire » de CMA CGM n'est pas pour autant qu'une formalité. Déclaré favorite c'est-à-dire mieux-disante, par les liquidateurs, l'offre du groupe familial basé à Marseille semble très séduisante sur le papier et ne serait-ce qu'au regard de la somme annoncée : 81 millions d'euros. Mais le tout est bien plus complexe. Tant et si bien que Rodolphe Saadé lui-même continue de mouiller la chemise et de rencontrer les salariés du titre. Il était encore il y a une semaine dans les locaux du quotidien. Pourquoi un tel investissement en temps, quand on pilote l'un des plus gros paquebots du transport maritime mondial ? Quel besoin de convaincre encore en étant la seule offre retenue ? On peut comprendre qu'expliquer sa stratégie et sa vision pour La Provence soit essentielle pour celui qui veut endosser le costume de patron de presse. Mais celles-ci semblaient être largement comprises eu égard aux communiqués de la plupart des organisations syndicales qui ne cachent pas leur enthousiasme face au projet de l'armateur marseillais.

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Assez réticent en matière de communication, CMA CGM n'hésite pas davantage à dire ou faire dire tout haut ce qu'elle entreprend, expliquant combien les salariés valident le projet porté par Rodolphe Saadé, appuyant sur le vote favorable des six CSE liés à La Provence et Corse Matin, taisant que si le vote est favorable, il n'emporte pas non l'unanimité.

De dire aussi, par communiqué interposé que désormais « il est temps que la procédure de cession du Groupe La Provence touche à sa fin et que nous puissions mettre en place le plus vite possible, avec l'ensemble des salariés du Groupe la Provence, le projet de redressement et de développement ambitieux que La Provence et Corse Matin méritent ». Une façon d'envoyer un message... et pas que à l'écosystème local.

Le droit de préemption, le droit qu'il ne faut pas oublier

Conforté ou pas dans son droit d'agrément, Xavier Niel n'abandonnera sans doute pas la bataille facilement. Si la Cour d'appel rétablit ce droit de véto dont le pacte d'actionnaire signé avec le Groupe Bernard Tapie l'a doté, l'offre du patron de Free pourrait revenir dans la course. Beaucoup plus facilement que si ce droit de véto lui était dénié à nouveau. Auquel cas, reste à Xavier Niel le droit de préemption. C'est-à-dire le droit de se positionner en priorité sur une offre de rachat. Ce qui, certes, l'obligerait à débourser 60 millions d'euros de plus qu'envisagé - on rappelle que son offre s'établit à 20 millions d'euros contre 81 millions d'euros proposés par CMA CGM - pour s'aligner sur celle du candidat adverse, mais on imagine bien que là n'est pas le problème.

Et puis, il ne faudrait pas non plus négliger le fait que si le projet imaginé par CMA CGM emporte les suffrages chez une grande partie des salariés de La Provence, ce n'est pas non plus l'unanimité qui s'en dégage. D'aucuns rappellent qu'examiner une seule offre ce n'est pas permettre un vrai choix. Il y a aussi le contenu du rapport mené par le cabinet Sécafi, qui pointe, entre autres, que les investissements annoncés par l'armateur prennent en compte le produit de la vente du siège actuel, ce qui n'avait pas été forcément présenté comme tel.

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Reste le conseil d'administration où les 5 administrateurs vont devoir se prononcer sur le chemin à suivre. Des administrateurs partagés. Outre Jean-Christophe Serfati, l'actuel PDG, sont également administrateurs, Franz-Olivier Giesbert, Stéphane Tapie, Anthony Maarek et Anne-Sophie Jahan, ces deux derniers étant les représentants de Xavier Niel dans Avenir Développement, détenteur de 11% du capital. Des administrateurs partagés - Jean-Christophe Serfati pencherait pour l'option CMA CGM, il n'a d'ailleurs pas hésité à se heurter verbalement avec Xavier Niel lors de la venue de ce dernier au siège du quotidien. Suite donc au prochain épisode. Probablement le 7 avril. Soit dans dix jours. Sauf rebondissement.

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