
Jusqu'à présent, Xavier Niel est resté fidèle à sa façon de faire : discret et s'appuyant sur le droit. Mais après le dévoilement du montant financier des offres de reprise des 86% des parts de La Provence détenues par GBT (Groupe Bernard Tapie), le patron de Free passe, en quelque sorte, à la vitesse supérieure.
Avec une offre qui, sur le plan financier, s'élève à 20 millions d'euros, Xavier Niel est considéré comme le challenger de Rodolphe Saadé qui n'a pas hésité à mettre sur la table la somme de 80 millions d'euros. 60 millions d'euros d'écart... pas rien. Mais pas tout non plus.
Niel annonce 50 millions d'euros d'investissement
Et c'est bien ce que l'actionnaire du Monde entend défendre.
Dans un communiqué, plutôt direct, il en vient à expliquer les grandes lignes directrices de son projet, celles que tous attendaient de connaître en détail. S'il ne dévoile pas vraiment le comment, il en dessine tout au moins les contours. Le pourquoi, on le connaît déjà.
Et Xavier Niel de dire que la stratégie qui est envisagée est celle de la conquête et de la reconquête en même temps, surtout celle du lectorat, d'appuyer sur le fait que ce sont bien les investissements fournis et l'augmentation de la diffusion payée qui tireront la croissance du titre. Qu'il est tout à fait possible de parier sur un développement qui lie papier et numérique. Qu'évidemment il faudra une diversité et une qualité des contenus pour croître et plaire. Et toucher ainsi une cible élargie, elle-même contributrice de développement.
Xavier Niel en profite, au passage, pour jeter une pierre dans le jardin de ceux qui pourraient imaginer que son implication provençale ne serait pas à long terme et de préciser qu'en matière, les titres ne seraient pas vendus pour une durée d'au moins dix ans.
Promise, aussi, une gouvernance qui intégrerait les représentants des salariés et une refonte donc de la gouvernance qui vise à consolider la relation de confiance et de proximité entre le quotidien et ses lecteurs.
Et de tout cela, dire qu'un premier investissement, estimé à 50 millions d'euros, est d'ores et déjà prévu. Une façon de dire aussi que tout n'est pas, forcément, dans le prix de cession.
L'indépendance éditoriale au cœur du dossier
Mais il est un sujet sur lequel Xavier Niel revient plusieurs fois et c'est celui - brûlant - de l'indépendance éditoriale. Touchant là un point de crispation entre son projet et le projet porté par Rodolphe Saadé. Le patron de Free rappelle d'ailleurs assez clairement que « l'histoire de la presse est peuplée d'aventures individuelles menées par des propriétaires considérant les journaux comme des danseuses ou des agents d'influence. Ces aventures ont durablement entamé la confiance des lecteurs envers la presse et ont régulièrement abouti à des catastrophes industrielles, loin des promesses de départ ». Une pierre, pour le coup, véritablement et clairement jetée dans le jardin du PDG de CMA CGM. Car il va sans dire que la possibilité de voir l'armateur marseillais devenir propriétaire de La Provence ne réjouit pas tous les acteurs sur le territoire - même si certains d'entre eux ce sont clairement prononcés pour lui - ni certains salariés du quotidien eux-mêmes.
Tout n'est pas (encore) fini...
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