La décarbonation du secteur maritime est une route longue, ardue qui se heurte souvent à certains verrous technologiques et qui, par définition, exige de faire de l'innovation un levier pour aller plus vite. Outre la réglementation - on se souvient de l'appel des armateurs lors de la COP28, à Dubaï en décembre dernier, demandant une réglementation plus ambitieuse et rigoureuse - ou la propulsion, l'hydrodynamisme et l'aérodynamisme des navires sont un autre élément qui contribuent à une meilleure efficience énergétique.
Sur le sujet, CMA CGM (actionnaire de La Tribune, NDLR) a déjà pris en compte les données permettant de travailler à une meilleure efficience, notamment en adaptant le design des hélices, en modifiant la ligne d'étrave tout autant qu'en adoptant des peintures plus efficaces en termes de pénétration dans l'eau. Un vaste sujet de R&D qui se concrétise notamment avec la livraison ce 15 février du CMA CGM Mermaid, porte-conteneur imaginé, dessiné, designé et conçu dans le but d'aller encore plus loin en matière de performance énergétique. Car le CMA CGM Mermaid ne ressemble en rien au porte-conteneur traditionnel.
Addition de compétences industrielles
Un navire qui est surtout né d'une alliance industrielle, réunissant autour de la table outre le Groupe français, les Chantiers navals de l'Atlantique, basé à Saint-Nazaire et Hyundai Heavy Industries, via sa filiale, le chantier naval Hyundai Mipo Dockyard, installé pour sa part à Ulsan en Corée du Sud et réputé pour sa capacité à intégrer l'ensemble des différentes étapes d'assemblage des porte-conteneurs. Cependant, pour transposer le concept né de la R&D de CMA CGM, à l'étape prototypage, c'est le bureau d'études Odense Maritime Technology, originaire du Danemark reconnu pour sa capacité à aligner les stratégies de construction navale avec les étapes de conception et de construction réelles qui a été choisi. GTT, partenaire de long terme de l'armateur marseillais pour son expertise notamment sur le transport maritime et stockage de GNL, apporte ici son savoir-faire pour la conception et le design de la chaîne gazière et la cuve de stockage, laquelle dispose d'une capacité totale de 1.053 m3.
De fait, ce porte-conteneur nouvelle génération a été redimensionné, présentant un ratio de 204,29 m de long pour 29,6m de large et accueillant à l'avant les superstructures pour une meilleure performance aérodynamique assortie d'une capacité supérieure de chargement par rapport à une architecture habituelle.
L'étrave (la pièce qui termine la coque du bateau et forme la proue, NDLR) a également été repensée, avec un bulbe intégré pour une performance hydrodynamique qui permet de gagner 15% de carburant en moyenne lors d'un trajet.
Une pile à combustible, bientôt
Evidemment propulsé au GNL mais également capable de souter du biogaz et convertible au e-méthane, le CMA CGM Mermaid est d'ailleurs le premier d'une série totale de 10 navires qui viennent compléter la flotte existante de 620 bateaux dont une trentaine est déjà propulsée par des énergies alternatives. Mais ce porte-conteneur de nouvelle génération n'en n'a pas fini avec l'innovation, puisque le dernier de la série sera équipé d'une pile à combustible, alimentée à l'hydrogène avec une capacité énergétique de 1MW, ce qui lui permettra, entre autres, de ne pas émettre à quai.
Une alliance industrielle qui démontre que l'innovation partagée peut rendre concrets et réalistes les objectifs de décarbonation inscrits dans les feuilles de route.
Nul doute qu'en redéfinissant le modèle du porte-conteneur et en l'adaptant aux nécessités d'efficience énergétique, CMA CGM envoie un signal à l'ensemble de la filière maritime, comme elle l'avait fait en investissant de façon conséquente dans la propulsion moins polluante, comme le GNL, en 2017. La livraison des 10 nouveaux navires s'étalera progressivement jusqu'en janvier 2025. Ils desserviront principalement la Méditerranée et le Nord de l'Europe.
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