Logement, financement des PME... comment le patron des patrons de la Côte d'Azur veut « répondre aux besoins du territoire »

Il dirige le groupe Ippolito spécialisé dans la mobilité durable, installé près de Nice, et il préside l’Union pour l’entreprise, le syndicat patronal des Alpes-Maritimes. Deux casquettes, deux responsabilités mais un seul fil conducteur, celui de l’apport de réponses les plus concrètes possibles aux besoins des entreprises et plus globalement du tissu économique. Ce qui signifie avoir de l’ambition, sortir des sentiers battus, prendre le temps de la pédagogie pour créer l’effet de masse capable de faire bouger les lignes. Une philosophie que Pierre Ippolito a partagé sur le plateau d’Azur Business*.
(Crédits : DR)

Il y a deux ans, il avait créé à la fois la surprise et l'enthousiasme. Élu à la présidence de l'UPE06, le syndicat patronal qui réunit le Medef 06 et la CPME, Pierre Ippolito était alors le challenger que l'on n'avait pas vu venir. Mais en 24 mois, le directeur général de l'ETI familiale a largement eu le temps d'inscrire sa marque.

A la tête de l'entreprise créée par son grand-père, Joseph, il a mené la structuration de ce qu'il appelait un « agrégat de PME » en une entreprise de taille intermédiaire - l'un des rares que porte le Sud - passé de spécialiste de l'automobile à acteur de la mobilité décarbonée. Un changement de nom, d'organisation interne, une diversification menée par verticales, ajoutant des secteurs connexes - énergie, immobilier, tourisme, industrie - au métier premier. Une évolution indispensable pour grandir, grossir et peser dans l'économie locale.

En moins de trois ans, le Groupe Ippolito est devenu l'employeur de 1.140 personnes. « Nous  nous sommes diversifiés pour répondre aux besoins du territoire », rappelle le dirigeant, « notre fil conducteur est celui-ci ». Devenir une ETI, mission pas si impossible si on accepte de « la prise de risque, de se remettre en question, de remettre sur la table tout ce que l'on a gagné, ne pas être dans une logique financière mais dans une logique de territoire ».

Proximité et durabilité

Diversifier c'était donc répondre à une stratégie.

« En stratégie, il existe deux grands choix : celui de l'extension géographique - on commence à Nice et on finit par le monde - et celle de l'extension régionale. Et si on est limité géographiquement, on doit alors, au sein d'un même territoire, développer d'autres activités. Nous avons plutôt opté pour cette seconde stratégie, étant attiré davantage par notre région que l'international ».

Un territoire qui regorge de possibilités et d'occasion aussi de réaliser des opérations de croissance externe. C'est ainsi que le rachat des Ateliers Mécaniques a donné naissance à la branche industrie, laquelle pèse en 2023, 2 millions d'euros, proposant aussi une offre de réparation d'accessoires pour le BTP, les domaines forestier et agricole ainsi que du stockage. Avec 10 millions d'euros de chiffre d'affaires généré l'an dernier, la branche immobilier - première voie de diversification - dispose d'une activité de transaction (via les agences Oréa) et de syndic notamment. Mais ce sont les branches Tourisme et Energies qui représentent le plus important challenge. La première parce que le secteur lui-même mute, la seconde, parce que c'est clairement le sujet d'avenir et aussi celui qui sous-tend l'activité mobilité comme industrielle. Générant elle aussi 10 millions d'euros de chiffres d'affaires elle développe notamment deux marques, Orion Groupe et Les Pépiteurs via la gestion de déchets et de métaux ferreux et non ferreux.

Où l'on comprend que l'objectif est d'apporter « des solutions de proximité et durables » à l'ensemble de la chaîne de valeur. Ce qui ne devrait pas s'arrêter là, d'autres sujets, comme la logistique du dernier kilomètre, les ressources humaines étant primordiaux sur cette même chaîne. « Nous regardons aussi des projets de croissance externes, car beaucoup d'entreprises sont à vendre et parce qu'il existe également des opportunités de concentration ».

Mais parce qu'il croit « à l'intelligence collective, surtout dans un environnement en pleine mutation, où les chaînes de valeur se mélangent et ont des problématiques communes », il donne naissance il y a deux ans à un collectif baptisé Moubilità, rassemblant l'ensemble de l'écosystème de la mobilité - transporteur, usagers, concessionnaire d'autoroutes... - avec l'idée de discuter sur les problématiques rencontrées, partager les expériences et les bonnes pratiques, pour « trouver des solutions globales ». Et de pousser même jusqu'à créer un salon de la mobilité décarbonée professionnelle - inexistant jusqu'alors - regrettant que lorsqu'on évoque le sujet on se cantonne au véhicule du particulier, alors que « la mobilité, c'est aussi la mobilité des marchandises. Quand on consomme dans un restaurant, quand on fait ses courses alimentaires, quand on jette ses poubelles, il faut des solutions de mobilité de marchandises ».

Les entreprises, actrice du logement ?

Mais une autre problématique - vrai Talon d'Achille - concerne le logement. Et sur ce point, celui qui est le président de l'UPE06 développe une vision pour le moins engagée.

« Force est de constater que le gouvernement ne prend pas la mesure de la crise du logement dans laquelle nous sommes. Et nous n'en sommes qu'aux prémices. Clairement, cela va peser sur l'attractivité du territoire. Or une entreprise sans collaborateurs peut avoir la meilleure stratégie du monde, la meilleure volonté, elle n'arrivera à rien. Il est important que nous, entreprises, nous nous prenions par la main à travers des opportunités, comme l'achat de logements pour les salariés. De nombreuses entreprises se posent la question. Je crois à des solutions qui proviennent à la fois des bailleurs sociaux pour le logement des actifs mais aussi par les entreprises. Je rappelle l'exemple de grands industriels de notre pays, Michelin ou Berlier, qui, à une époque, logeaient, transportaient leurs collaborateurs... Nous allons peut-être revenir à cela, avec possiblement la création de foncières dédiées ».

Boost, le carburant financier

C'est dans ce même esprit de faire grandir les PME du territoire qu'est né le fonds Boost, fonds de financement territorial abondé par plusieurs entrepreneurs, dédié aux petites et moyennes entreprises réalisant entre 1 et 6 millions d'euros de chiffre d'affaires, désireuses de réaliser des opérations de croissance externe et qui sont ainsi aidées dans cette volonté de grandir et générer une forme d'économie circulaire. L'appel à candidatures vient par ailleurs d'être lancé. L'UPE06 qui n'oublie les ETI et crée un Club, celui des SAM, comprendre des sociétés à mission, club certes encore restreint mais qui devrait prendre de l'ampleur. La ligne d'horizon ? « Créer de la croissance pour les années à venir ».

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Pierre Ippolito Azur Business

*Depuis novembre 2021, La Tribune et BFM Nice s'unissent pour proposer chaque semaine une chronique économique, baptisée Azur Business, qui décrypte l'économie du territoire, ses enjeux, ses défis, les réussites et les problématiques. Tous les mardis, un invité vient apporter son analyse sur une thématique précise.

BFM Nice Côte d'Azur est à retrouver sur le canal 31 de TNT régionale et sur les box au canal 285/518 (SFR) et 360 (Bouygues).

La chronique est animée par Céline Moncel pour BFM Nice et Laurence Bottero, rédactrice en chef Méditerranée-Afrique du quotidien économique La Tribune.

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