Théoriquement, ce 7 juin est le jour où le processus de rachat doit être engagé, suite à l'agrément accordé par le conseil d'administration à l'offre portée par CMA CGM. Théoriquement. Car les recours déposés par Xavier Niel - un référé, examiné ce 9 juin par le tribunal de commerce de Marseille et un recours au fond, jugé lui le 29 juin - pourraient - devraient ? - pousser le juge-commissaire du tribunal de Bobigny à décider d'attendre que le tout soit purgé, pour ne pas entacher davantage un rachat déjà complexe.
Une trésorerie qui ne pourrait attendre
Une possibilité qui a poussé le PDG du groupe, Jean-Christophe Serfati, à organiser un CSE extraordinaire afin d'envisager les conséquences pour le groupe. Un PDG qui s'est dit inquiet, rappelant que les PGE, les Prêts garantis par l'Etat, d'un montant de 18 millions d'euros ont été consommés et que désormais, face au manque d'investissements conséquents, aux pertes quotidiennes, La Provence se retrouve avec une trésorerie constituée du résultat de la vente de son siège, soit 12 millions d'euros.
Une somme qui ne paraît donc pas suffisante pour que le quotidien supporte un processus rallongé. Et le PDG d'envisager de demander, auprès du tribunal de commerce de Marseille, une procédure de sauvegarde. Une procédure qui a l'avantage, notamment, de geler les créances et donc d'apporter de l'oxygène financier à l'entreprise concernée. Une procédure qui débouche sur un plan, dont la durée peut varier. Un plan qui soit permet de remettre l'entreprise sur le bon chemin économique soit, en cas d'échec, soit entraîne une liquidation ou un redressement judiciaire. Sachant que, contrairement à toute autre procédure collective, la procédure de sauvegarde est demandée par le dirigeant lui-même.
Mais Jean-Christophe Serfati estime que l'état financier du quotidien pourrait décider le tribunal à décider de recourir à un redressement judiciaire dans la foulée de la procédure de sauvegarde. Une possibilité qui peut surprendre, étant donné que le redressement judiciaire intervient lorsque l'entreprise est confrontée à une cessation de paiement. Une procédure de sauvegarde, en revanche, permet de « protéger » l'entreprise lorsque celle-ci est fragilisée.
Autre interrogation, Xavier Niel, en tant qu'actionnaire minoritaire, s'est engagé à ne pas laisser La Provence et Corse-Matin, les deux titres concernés, à la peine financièrement, et à abonder lorsque nécessaire. Une option que ne semble pas rassurer du côté de la direction de La Provence, cette « injection » en espèces sonnantes et trébuchantes pouvant être considérée comme peu conforme à une bonne gestion : en clair, l'investissement de l'actionnaire minoritaire doit se faire sans contrepartie. Et sans que cela nuise à l'intérêt social de l'entreprise qui injecte l'apport financier.
Quid d'un nouvel appel d'offres ?
Du côté des syndicats, la situation divise aussi. Si le SNJ, FO Eurosud, FO Corse Matin Publicité, FO Sud Presse Distribution, FO Corse Presse, CGT Corse Presse, FO Corse Distribution demandent à ce que le processus de vente ne soit pas repoussé, Filpac-CGT, CFE-CGC, CFDT, FO Livre Sud en appellent à une autre alternative, celle de permettre à l'offre de Xavier Niel d'entrer en jeu, officiellement.
En outre, le spectre d'un redressement judiciaire n'est pas anodin pour une autre raison. Il pourrait provoquer le lancement d'un nouvel appel d'offres. Ce qui porterait la procédure à... la case départ. Rendant caduques les négociations et conditions obtenues de la part de CMA CGM. Ce qui signifie aussi que cette configuration élimine la dette de GBT dans l'équation. Ainsi le prix de vente ne serait pas amené à rembourser une partie de ce que doit le Groupe Bernard Tapie à l'Etat mais irait, en totalité, au quotidien.
Autant de champ des possibles à envisager. Mais que le juge-commissaire décide de poursuivre le processus de vente ou pas, ce 7 juin, les jeux sont loin d'être faits. Et les surprises ou autres rebondissements venir s'ajouter à l'existant...
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