Christian Estrosi et la démission taille patron

Si elle a pris tout le monde politique et le landerneau azuréen de court, la démission de Christian Estrosi de la présidence de la Métropole Nice Côte d'Azur n’est pas l’expression d’un agacement soudain. Elle répond plutôt à une exaspération montée crescendo, que les joutes électorales des Législatives ont fini d’amplifier et qui mène le maire de Nice à dire stop. Une démission en mode clarification qui vise à ce que chacun choisisse son camp. Une façon de savoir où se situent les troupes fidèles, les brebis considérées comme galeuses et ceux animés de l’esprit collectif. Ou quand Christian Estrosi rappelle qui est le patron… et prépare aussi le « dans deux ans ».
(Crédits : DR)

On ne peut pas dire qu'on l'ait vu arriver. Encore sous le choc des résultats du second tour des Législatives, Nice, comme le reste de la France, se préparait doucement mais sûrement à l'accueil du Tour de France et des Jeux olympiques, une parenthèse sportive, bonne pour le tourisme et l'économie locale.

Mais ça, c'était avant l'annonce façon coup de théâtre du maire de Nice qui a donc remis son écharpe de président de la Métropole Nice Côte d'Azur aux mains du préfet des Alpes-Maritimes. Une démission acceptée, dans la foulée, par Hugues Moutouh.

Petite musique

Une démission comme pour mettre un point final à une période d'agacement, entamée voici plusieurs mois et accompagnée d'une petite musique de fond qui s'égrène, ici et là, semant troubles et interrogations.

Plusieurs éléments ont construit cette exaspération. Les critiques reçues après la démolition du théâtre national de Nice (TNN) -ce qui aurait valu à Nice de ne pas être retenue pour être Capitale européenne de la Culture - et celle du Palais Acropolis - qui prive, pour le moment, la cinquième ville de France d'un palais des congrès - pour laisser place à la Coulée verte phase 2, ont contribué à cette petite musique.  A cela s'ajoutent les attaques constantes sur le volet budget et endettement - ce qui lui vaut, de la part de l'opposition, le surnom de « père de la dette », un sujet récurrent de passe d'armes.

Les perquisitions et les reproches liés aux travaux de reconstruction opérés dans les Vallées après la tempête Alex ont également ajouté de la crispation à l'agacement.

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Le rendez-vous de dans deux ans

Et puis il y a eu les législatives. Et le coup d'éclat d'Eric Ciotti. Qui a provoqué, chez Christian Estrosi, un coup de sang. Au point de réactiver son compte X (ex-Twitter), suspendu depuis plusieurs mois, pour dire tout le mal qu'il pensait du rapprochement opéré par le président des LR avec le Rassemblement national.

Une joute politique qui a exacerbé encore un peu plus la tension qui existe depuis plusieurs années entre les deux hommes. La perspective d'une victoire du président des LR dans un contexte qui verrait le RN l'emporter au niveau national a particulièrement alerté Christian Estrosi. Lequel a placé face à Eric Ciotti et « ses » candidats - Christelle d'Intorni et Bernard Chaix - ses fidèles issus de sa majorité, soit respectivement Graig Monetti, Gaël Nofri et Philippe Pradal. Leurs défaites respectives, face aux victoires des LR-RN, ont forcément été mal vécues. Et si Eric Ciotti ne sera pas ministre de Jordan Bardella, à Nice son pari est tout de même remporté, ne serait-ce que psychologiquement, parce qu'il démontre que même conspué au plus haut niveau, il demeure ancré sur son territoire.

C'est donc finalement un tout, un ras-le-bol et une irritation grandissante qui ont poussé le président de la Métropole à la démission. Une clarification demandée qui n'est pas sans en rappeler une autre, celle du président de la République.

Pour Christian Estrosi, il s'agit déjà de préparer la suite. D'assainir le terrain de jeu. De couper le sifflet à une petite musique devenue un son dissonant, au point de ne plus laisser entendre les réussites. Le tramway, qui maille le territoire et va s'étendre avec une cinquième ligne, le Coulée Verte 1, qui a transformé la physionomie du centre-ville, l'obtention de l'arrivée du Tour de France sur la Promenade des Anglais et celle, bien engagée, des JO d'hiver 2030.

La suite s'appelle élections municipales. Christian Estrosi l'a déjà annoncé : il sollicitera un nouveau mandat. La campagne, non officielle, a déjà commencé.

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Déclaration et preuves d'amour

Le président de la Métropole qui dit regretter le temps du collectif. Il est vrai que Nice Côte d'Azur est née en 2012 dans un contexte où les planètes étaient alignées. Le territoire était fier d'être le premier à s'engager dans une nouvelle forme de collectivité.

Démissionner c'est demander « qui m'aime me suive ». D'aucuns imaginent le maire de Nice jouer un rôle dans le futur gouvernement, si celui-ci réunissait des personnalités politiques plutôt centre-droit. Lui a, jusqu'à présent - car la possibilité de lui voir confier une fonction ministérielle est récurrente - toujours botté en touche. Après tout, être ministre, il sait ce que c'est. Il l'a été par deux fois, avec des portefeuilles majeurs, dont l'industrie. Mais la situation particulière du pays pourrait-elle le faire changer d'avis ?

Christian Estrosi a toujours dit que Nice était son choix premier, sa ville de cœur, sa priorité absolue. Sa démission, en 2017, de la présidence de la Région Sud a montré qu'il savait aussi donner des preuves d'amour. C'est un peu de cela dont il s'agit désormais. Les « je t'aime moi non plus », c'est épuisant. Sur les réseaux sociaux, l'opposition l'appelle à une autre démission : celle de la mairie de Nice, considérée comme vraie façon d'aller tester notoriété et approbation... Le 19 juillet prochain, Christian Estrosi se présentera à la présidence de la Métropole Nice Côte d'Azur. Pour un nouveau mandat et si possible sans petite musique de fond...

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Commentaires 2
à écrit le 11/07/2024 à 10:38
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Oui, il a l'âge de se retirer. D'autres devraient en faire autant ...

à écrit le 10/07/2024 à 20:02
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Ce messieur lors d'élection régionale était venu pose la première pierre du lycée du canton de Fayence dans le Var. Comme à son habitude à grand renfort de médias et le baratin habituel. L'élection passée lui et son compère président de la région ...

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