Neocarb, la brique « carburant » qui vient compléter la filière d’industrie décarbonée à Fos

En prévoyant le développement de deux unités de production – l’une d’e-méthanol à destination du maritime, l’autre de e-kerosène pour satisfaire les besoins du transport aérien – NeoCarb apporte une brique complémentaire aux projets d’industrie décarbonée déjà en cours dans le périmètre du Grand Port Maritime de Marseille-Fos. Car l’enjeu est bien de donner corps à une filière complète, diversifiée mais à laquelle ne manque aucun maillon. Portée par Elyse Energy, ce projet, qui nécessite un milliard d’euros d’investissement et promet la création de 600 emplois locaux, prévoit d’être opérationnel d’ici 2030.
(Crédits : DR)

Il y a encore deux ans, impossible d'imaginer que la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer serait la nouvelle vitrine de l'industrie verte. Pourtant, celle que l'on vilipendait pour ses cheminées, son activité polluante et son incapacité à prendre le virage « vert », a bel et bien entamé sa mutation, plaçant par ailleurs le territoire de Marseille-Fos sur la carte des territoires capables de porter l'industrie de demain.

Cependant, si cette mutation est visible aujourd'hui, cela fait déjà longtemps que les industriels eux-mêmes réfléchissent à la transformation de leur filière. La preuve la plus flagrante et la plus solide est PICCTO, cette Plateforme industrielle et d'innovation de Caban-Tonkin, née il y a dix ans, encouragée, entre autres, par la non-implantation d'un projet d'envergure de production de fibres de carbone à destination du marché aéronautique. Une déception de voir s'éloigner une opportunité industrielle de taille certes mais une confirmation en même temps du potentiel du territoire pour être un acteur de l'industrie de demain.

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Héritage et momentum

PIICTO a longtemps porté l'évangélisation, réussissant les grands industriels tels Eurovia, Air Liquide, Ascométal, Engie..., initiant projets et démonstrateurs, dont Jupiter 1000 (power to gas). Et puis il y a le projet Syrius - acronyme de Synergies Régénératives Industrielles Sud - qu'elle porte, programme doté d'une enveloppe de 9 millions d'euros avec comme objectif d'identifier les projets à mettre en place prioritairement autour des problématiques d'écologie industrielle, de captage, utilisation et séquestration de Co2, ou encore de décarbonation de la logistique.

Les annonces qui s'enchaînent depuis près de deux ans sont le résultat de ce travail de longue haleine. H2V (gigafactory de production d'hydrogène vert), GravitHy (production d'acier vert), Hyvence (production de panneaux photovoltaïques flottants et hydrogène vert)... ont emboîté le pas à Carbon (production de panneaux solaires).

C'est dans cet écosystème que s'inscrit Neocarb. Apportant la brique supplémentaire et complémentaire nécessaire aux bonnes activités de tous les acteurs. Car le sujet de Neocarb, c'est le carburant. D'abord le e-méthanol, afin de servir le transport maritime. Une première unité et une première phase, qui doit être opérationnelle en 2030, suivie d'une seconde, avec le déploiement d'une unité dédiée à la production de e-kérosène afin de répondre aux besoins de carburant vert du transport aérien. Un deux en un qui vient nourrir les besoins des industriels et acteurs du bassin de Marseille-Fos.

Aux manettes de Neocarb, Elyse Energy. Une PME industrielle qui regarde Fos-sur-Mer depuis longtemps pour déployer sa vision de producteur de carburant de synthèse. Or, comme l'explique Jérôme Giraud, directeur territorial délégué, « la distribution de carburant se fait depuis des décennies à partir de Fos-sur-mer ». Certes, de carburants fossiles, jusqu'alors mais qui seront substituables par ces carburants de nouvelle génération, dont les acteurs industriels ont et auront besoin. Et qui sont objets des préoccupations, comme le démontrent les dernières discussions autour du SAF, le carburant vert pour l'aviation, qui fait débat. Dans le domaine maritime, toutes les solutions aujourd'hui, des bio-carburants aux e-fuels, de l'hydrogène à l'ammoniac, sont regardées.

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Synergies industrielles

« Neocarb vient compléter l'écosystème industrialo-portuaire », acquiesce Jérôme Giraud qui connaît bien ce tissu pour avoir été directeur du développement du GPMM avant de diriger les ports de la rade de Toulon. PICCTO, il connaît donc bien aussi et c'est précisément au nord de la parcelle dédiée à Ascométal (repris par l'italien Marcegaglia) que les unités de production vont s'installer, sur 51,3 hectares précisément. « Nous partageons les accès routier et ferroviaire et nous irons chercher les synergies. Nous avons besoin de CO2, Ascométal en émet. Idem pour la chaleur ».

Les objectifs de production s'établissement à 100.000 tonnes par an pour le e-méthanol et 50.000 tonnes annuelles pour le e-kérosène. Pour ce carburant précisément, c'est le principe de alcohol-to-jet qui a été retenu.

Neocarb qui ne considère pas les autres projets d'industrie décarbonée comme des concurrents mais plutôt comme les maillons d'une chaîne de valeur. « Nous avons besoin de nous nourrir les uns des autres, nous sommes complémentaires. C'est la somme de ces projets qui permet de faire émerger une filière. Nous avons intérêt à ce que tous les projets se concrétisent. Cela est important également en termes d'acceptabilité » de la population.

Même les investisseurs, affirme Jérôme Giraud, sont plus enclins à investir dans un projet s'inscrivant dans un ensemble de projets. Côté financement, si pour l'heure le déploiement se réalise pour partie sur fonds propres, pour partie sur une levée de fonds dont le montant n'est pas communiqué, Neocarb nécessite un investissement de 1 milliard d'euros. Le calendrier prévoit l'étape concertation préalable en automne et dépôt du permis de construire ainsi que de la demande d'autorisation environnementale fin 2025. 100 emplois, sur site, ainsi que 500 emplois seront générés, des emplois industriels essentiellement. Ou comment se transforme une filière...

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