Entreprise artisanale, La Brasserie du Comté poursuit ses investissements face à la concurrence industrielle

Née en 2012, la brasserie artisanale installée à Saint-Martin de Vésubie, dans l’arrière-pays de Nice, va investir une nouvelle enveloppe de 1,5 million d’euros en deux ans pour soutenir une croissance qui ne faiblit pas, portée par une diversification heureuse, tant sur les contenants que sur les contenus. Et ce, en dépit de marges de manœuvre limitées du fait d’un marché dominé par l’offre industrielle.
(Crédits : DR)

De la tempête Alex d'octobre 2020, ne reste plus qu'une cuve récupérée sur une plage de Nice. Comme un emblème, elle trône aujourd'hui à l'entrée du nouveau site de production de la Brasserie du Comté, inauguré près de deux ans après la catastrophe qui avait totalement ravagé son atelier historique. L'entreprise brassicole de Saint-Martin de Vésubie y a investi 4 millions d'euros pour relancer l'activité et mettre en place une stratégie de développement ad hoc. Vingt mois plus tard, la brasserie artisanale azuréenne va remettre au pot une nouvelle enveloppe de 1,5 million d'euros pour la période 2024/2026 afin de soutenir et d'accélérer un plan de diversification qui lui a permis d'engranger plus de 2,2 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2023, en augmentation de 43% par rapport à l'exercice précédent. Une croissance à deux chiffres régulière pour celle qui affichait, en 2020, un chiffre d'affaires de 796.000 euros. Et ce, dans un contexte marché durement impacté par l'inflation et la hausse des matières premières, et dominé par les géants industriels. La bière artisanale ne représente en effet que 6% du volume écoulé chaque année en France mais 80% des emplois (6.500).

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Ode à la canette

Au centre des investissements de la Brasserie du Comté, la bière bien sûr. Une bière 100% bio fabriquée sur le modèle artisanal, déclinée en douze recettes traditionnelles et de saison, sans compter les éphémères ou celles issues de collaboration avec d'autres brasseurs locaux. En l'occurrence, la Brasserie du pays flamand, située à Blaringhem dans le Nord, et la Brasserie de la Rade, basée à Toulon, avec lesquelles deux bières éphémères ont été récemment élaborées et mises sur le marché. Deux breuvages exclusivement proposés en canette, un contenant que souhaite pousser l'entreprise maralpine dont la distribution en bouteille représente encore 74% de l'activité. « Dans les pays anglo-saxons, la canette, en particulier sur le segment de marché de la bière locale, est entrée dans les mœurs depuis longtemps, ce qui n'est pas encore le cas dans les pays latins où la bouteille est reine », explique Edwards Dilly, directeur général associé de l'entreprise. Or, les avantages économiques et écologiques d'un tel contenant, qui pèse à ce jour 2,5% de ses ventes, sont nombreux, entre conservation, praticité logistique et recyclabilité. L'idée est donc d'atteindre les 9% en 2026.

Pressions sur la pression

Autre contenant à dynamiser, le fût, autrement dit la bière pression distribuée en CHR (Cafés, Hôtels, Restaurants). Un segment de marché qui représente 45% du volume écoulé par la Brasserie du Comté, contre 42% en GMS (Grandes et Moyennes surfaces) et magasins et 13% auprès des particuliers et entreprises. « L'objectif consiste à faire passer nos clients restaurateurs de la bouteille à la pression. Celle-ci représentait 5% de nos ventes en 2020, 23% en 2023 et l'on souhaite la pousser à 40% en 2026 ». Une gageure pour la brasserie qui s'attaque ici à la chasse gardée des industriels et gros distributeurs, lesquels « verrouillent le marché » en dépit d'une demande artisanale importante de la part du consommateur. "Certains jouent le jeu, d'autres le contournent en créant leur propre marque", indique le brasseur, qui admet avoir à cet égard comme marges de manœuvre « une identité et une empreinte locale fortes » sur sa zone de chalandise. A savoir, le périmètre des Alpes-Maritimes et de l'Est Var où vivent environ 1,5 million de personnes, sans compter les touristes.

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Circuit court et softs

« Nous n'avons pas vocation à sortir de notre périmètre. Le marché y est déjà énorme », relève Edwards Dilly. Lequel prône un positionnement « locavore ». En commençant par le sourcing des ingrédients. Après avoir développé sa propre houblonnière il y a deux ans, la brasserie s'est associée à une douzaine d'autres brasseurs indépendants de la région, ainsi qu'à une dizaine d'agriculteurs, pour cofinancer une malterie et ainsi bénéficier d'une production d'orge locale dédiée. « Elle ouvrira l'année prochaine et sera basée à Sisteron ». Par ailleurs, en 2023, la Brasserie du Comté avait planté sur 4.000 m² à Gattières quelque 200 pieds d'agrumes dont les premières récoltes sont attendues dès cet automne pour alimenter ses bières et ses softs.

Car l'entreprise a diversifié sa production avec le lancement l'an passé d'une gamme de limonades, complétée depuis peu par une offre de cola. « Le soft constitue un axe de développement extrêmement fort qui a représenté 15% de notre activité en 2023 ». Un démarrage rapide qui a surpris, et nécessité une réorganisation que les investissements à venir vont soutenir, afin de développer l'offre et sa capacité de production globale. A ce jour, celle-ci tourne autour des 15.000 litres par semaine. En 2026, elle devrait atteindre les 26.000 litres par semaine. Quant aux effectifs, eux-aussi s'inscrivent sur une courbe ascendante, passant de 7 en 2020 à 21 aujourd'hui et 30 d'ici à 2026.

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