« Grâce à l’IA, la prédiction est certainement l'avenir de notre système de santé » (Emilie Royère, DG Eurobiomed)

Si l’intelligence artificielle joue le rôle de facilitateur dans de nombreux domaines, en matière de santé, elle pousse à une personnalisation qui rend la médecine beaucoup plus intelligente et donc encore meilleure en matière de prévention comme de traitement des pathologies. Un accélérateur qui fait faire des pas de géants et qui contribue aussi à l’attractivité de la France comme des territoires, explique la directrice générale du Pôle de compétitivité Eurobiomed, basé dans le Sud et qui rayonne également en Occitanie et parmi les pôles leaders en la matière.
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LA TRIBUNE - L'intelligence artificielle appliquée à la santé constitue l'un des enjeux majeurs pour positionner la France parmi les leaders...

EMILIE ROYERE - La France possède un atout majeur pour traiter tous ces sujets de santé et d'IA car nous possèdons des données de santé parmi les plus documentées dans le monde, avec un système de santé véritablement reconnu. Cette donnée de santé est la première brique, la matière première sur laquelle nous pouvons appliquer des technologies d'intelligence artificielle pour traiter ces données. De ce fait, nous sommes bien positionnés pour aller vers une médecine prédictive et une médecine qui serve véritablement le patient. C'est vraiment cela, l'enjeu de la donnée de santé et de l'IA. L'IA appliquée au domaine de la santé concerne également l'accompagnement dans des sujets orientés vers les dispositifs médicaux. Quoiqu'il en soit, la prédiction est certainement l'avenir de notre système de santé.

Lorsqu'on parle IA appliquée à la santé, la frontière peut sembler tenue, du point de vue du grand public, entre ce qui relève précisément du dispositif médical et de ce qui est du gadget.

La frontière est effectivement ténue pour le grand public. Néanmoins, on peut se demander si cela est une mauvaise chose, car plus cette frontière est ténue, plus ça signifie que le grand public peut également bénéficier d'avancées technologiques majeures. Donc, il ne faut pas confondre et ne pas utiliser un gadget en pensant qu'il va nous apporter un soin, mais en revanche, à l'inverse, le jour où nous aurons beaucoup d'intelligence artificielle dans notre quotidien, dans la santé, cela sera une grande chance pour tous, en tant que patients et en tant que citoyens.

L'ensemble de la chaîne de valeur de la santé intègre-il l'IA de la même façon ?

L'ensemble de la chaîne de valeur peut-être pas encore. En revanche, toutes les entreprises qui ont une activité de recherche ont intégré l'IA et sont en train de l'intégrer d'une manière encore plus puissante. Ainsi, on travaille aujourd'hui sur des cohortes de patients synthétiques, c'est-à-dire que nous travaillons pour développer, dans le process de développement d'un médicament, des données de patients synthétiques afin d'éviter d'avoir à tester certains médicaments ou certaines molécules ou certaines thérapies sur des patients en chair et en os. Bien sûr, cela n'évitera pas de faire des tests sur l'humain, mais en revanche, cela va permettre de tester à une bien plus grande échelle et dans des temps beaucoup plus réduits, faisant, par conséquence, avancer la recherche dans des temps, eux aussi, plus rapides.

Cela signifie la possibilité de mettre des médicaments plus tôt sur le marché ?

C'est exactement l'objectif : des médicaments plus sûrs et mis plus tôt sur le marché à des coûts plus faibles puisque, en travaillant sur des données synthétiques, on réduit les coûts de développement des médicaments ce qui rend ces mêmes médicaments beaucoup plus accessibles.

Comment le Sud se positionne-t-il par rapport à la France et comment la France se positionne-t-elle par rapport à l'Europe ? Sommes-nous bien placés ou plutôt en phase de développement ?

Je pense que le diagnostic est à peu près le même que dans les autres applications de l'IA : nous avons tous les atouts pour y arriver. Nous ne sommes probablement pas partis les premiers. En revanche, nous avons aujourd'hui des projets qui se développent à vitesse grand V et qui vont nous permettre de rattraper ce retard. Surtout, nous pouvons nous spécialiser sur certains domaines où nous pouvons vraiment disposer d'atouts considérables. C'est le cas du label IA Cluster, obtenu par l'Université Côte d'Azur, qui comporte un grand volet santé, ce qui va nous conforter. La présence de l'INRIA, des laboratoires, d'une filière également très structurée du côté de Marseille, des entreprises leaders qui se dessinent... tout cela contribue à cette palette d'atouts qui nous permet d'être extrêmement confiants.

L'investissement réalisé par Sanofi - le groupe pharmaceutique a injecté 60 millions d'euros à Sisteron pour la construction d'une unité de lancement de petits volumes pour la production de principes actifs -  même cela ne concerne pas une grande usine de médicaments, contribue-t-il à conforter la filière ?

La filière est extrêmement confortée actuellement. Nous allons bientôt dévoiler les résultats d'une étude économique que nous avons mené sur la filière santé en région Sud, étude qui montre que la filière et les investissements se portent bien. Et l'activité dans le Sud est vraiment tirée par les entreprises de taille intermédiaire, sans parler des entreprises innovantes comme Biotech Dental, Provepharm, Nuvisan ou Imcheck Therapeutics qui attirent de nombreux talents et beaucoup d'investisseurs.

Le Sud se distingue par l'absence de big pharma : caillou dans la chaussure ou pas ?

C'est toujours un caillou dans la chaussure mais cela présente aussi des avantages. Actuellement, nous développons des projets sur certaines filières qui vont être vraiment hyper importantes et stratégiques pour des grands industriels, aujourd'hui absents de la région. Nous travaillons notamment sur un projet de filière sur la peau.

Nous pensons que le Sud est probablement l'endroit en Europe, où l'on peut trouver des solutions thérapeutiques pour les maladies de la peau et je suis convaincue que cela va attirer de très gros industriels qui ne sont pas présents sur le territoire.

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Commentaires 3
à écrit le 24/05/2024 à 9:09
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« Grâce à l’IA, la prédiction est certainement l'avenir de notre système de santé », étant un bon client d'un CHU je crois plus aux médecins et à leur personnel que dans ces trucs même si nos médecins actuels sont aidés par des machines de plus en pl...

à écrit le 23/05/2024 à 19:18
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L'informatique quantique me semble plus appropriée car nous autres humains ne sommes que de la technologie quantique d'autant qu'il faut s'appuyer sur le microbiote et les neurones de l'estomac dernières découvertes particulièrement spectaculaires, e...

à écrit le 23/05/2024 à 19:00
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oui, y a bcp a faire et tout le monde travaille dessus........le pb c'est que si une solution emerge en france, ca sera envoye au tas dans la rigolade de la reduction des inegalites dans le travail, et ca ira tres vite ailleurs.....last but not least...

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