«Les entreprises innovantes en santé doivent avoir un accès réglementé au marché plus souple » (Emilie Royère, Eurobiomed)

Relabellisé – sans surprise – jusqu’en 2026, le pôle de compétitivité spécialisé en santé, rayonnant en Provence Alpes Côte d’Azur et en Occitanie, fait de la nouvelle période qui s’ouvre une phase privilégiant excellence et rationalisation à la fois : comprendre que si course il doit y avoir c’est dans l’accompagnement à la conquête du ou des marchés, dans un contexte où il est attendu de France 2030 une aide concrète en termes de soutien financier bien sûr, mais aussi de cadre normatif, qui doit être obligatoirement plus favorable à l’innovation. Un gage de réussite des entreprises comme de souveraineté tricolore, ainsi que l’explique sa directrice générale.

142 projets d'entreprises enregistrés, 31 projets financés et 26 en cours d'instruction pour un budget avoisinant 90 millions d'euros, alors qu'en même temps 135 millions d'euros ont été levés via différents tours de table... Si 2022 s'est clôturée sur des données chiffrées significatives, cette année constituait aussi la dernière année de la phase IV des pôles. Et depuis fin mars, revoici Eurobiomed, né en 2009, reparti pour un cinquième tour et une nouvelle phase de trois ans, avec une feuille de route affinée, ciblée, recentrée et pas moins revendicatrice de ce qu'il faut pour que tout aille le mieux possible en matière d'innovation en santé.

France 2030 : game changer

Trois ans près le début d'une pandémie mondiale qui a précisément mis ce sujet sur la table et aidé - d'une certaine façon - à le vulgariser auprès du plus grand nombre, la disruption dans le domaine de la santé est, à l'instar de la réindustrialisation ou d'énergie, une thématique stratégique pour la France.

Si d'autres secteurs, cités ci-dessus ont déjà bénéficié de plan de relance dédiés, en matière de santé c'est France 2030 qui cristallise les attentions et les attentes. La présence le 30 mars dernier à Sophia-Antipolis de Lise Adler, la directrice de l'Agence de l'Innovation en santé qui pilote le volet santé de ce plan d'investissement d'avenir gouvernemental, démontre la place que le grand Sud - Provence Alpes Côte d'Azur et Occitanie - prend dans ces sujets stratégiques. Bien sûr, globalement, tout est positif. Cependant les enjeux n'en sont pas moins concrets. « Nous attendons de France 2030 qu'il permette des avancées significatives sur l'innovation », pointe Emilie Royère, la directrice générale du pôle Eurobiomed. « Nous avons besoin d'un impact sur l'investissement mais aussi sur le normatif et le réglementaire ».

Car tout est dans tout. Innover c'est bien, c'est indispensable, stratégique... mais freiner la mise en application, l'accès au(x) marché(s), le déploiement, c'est autant de verrous qui font perdre de l'avance, des places, découragent... Ces verrous, il est indispensable de les lever, insiste Emilie Royère. « Nous devons opérer un changement culturel sur l'innovation, nous devons avoir un accès réglementé plus souple », et en finir avec un principe de précaution qui a engendré une prudence un peu trop exagérée.

Faire alliance pour faire plus vite

Avec des conséquences que, précisément les préoccupations en matière de souveraineté ont souligné et des acteurs de l'innovation qui « préfèrent aller vendre sur d'autres marchés. Ce qui signifie que la France finance de la R&D mais perd ensuite, le bénéfice de ce qui est produit ». Un changement de mentalité qui doit s'effectuer du côté de l'administration et du législateur avec l'objectif d'être « au service de l'innovation afin que les entreprises trouvent des débouchés sur le territoire français », répète la directrice générale d'Eurobiomed, pour qui il est indispensable que la défense du Crédit Impôt Recherche s'accompagne de la question de la souveraineté.

Sur tous ces sujets, l'union fait toujours une plus grande force que seul et c'est dans une volonté de jeu - et discours - collectif qu'est née, l'an dernier, Enosis, l'association regroupant les quatre pôles dédiés à la santé de France, c'est-à-dire, outre Eurobiomed, Lyonbiopôle, Bio Valley et Medicen. « Les pôles peuvent faire beaucoup sur l'accompagnement des contraintes réglementaires, sur l'internationalisation. Enosis regroupe 1.400 entreprises. Nous portons le dialogue ensemble auprès des instances comme l'Agence nationale de la recherche, Bpifrance, la DGE. Sur des projets d'entreprises, de R&D, d'innovation, nous mettons nos réseaux en commun, nous avons constitué des groupes de travail thématiques. Cette alliance à tout son sens ».

En 5 ans, faire émerger dix pépites

Labellisé à nouveau pour la période 2023-2026, Eurobiomed en profite pour affiner encore davantage sa feuille de route, avec le parti pris de se centrer sur la santé humaine, pour éviter tout risque de dispersion alors que l'option nutrition aurait tout autant pu être un axe privilégié. Mais le choix est stratégique et les objectifs annoncés : « faire en sorte qu'à horizon 5 ans, dix entreprises pépites soient issues du territoire. Que les entreprises soient plus rapidement visibles, avec des levées de fond de l'ordre de 100 millions d'euros ». Le tout étant de générer ce fameux effet d'entraînement qui irrigue l'ensemble de l'écosystème, qui fait ressortir des champions, discrets peut-être aux yeux du grand public mais remarqués dans le secteur à l'instar de Nuvisan ou d'Innoskel. Où l'aide venue des politiques publiques fait partie de la réussite des pépites. « Les investissements dans certaines entreprises jouent un effet d'entraînement, drainent d'autres entreprises ». France 2030 ? « Cela doit être notre priorité, l'enveloppe dédiée à la santé de l'ordre de 7,5 milliards d'euros est une opportunité que nous ne verrons pas passer deux fois », insiste Emilie Royère. Qui insiste sur le pragmatisme obligatoire pour réussir, sur « encore plus d'excellence. Faire à moitié de sert à rien. Les investissements fléchés vers les entreprises qui en franchissent l'étape clinique doit faire que de plus en plus de patients aient accès à des solutions thérapeutiques. Et cela en remettant au cœur le lien public/privé. Notre secteur n'a d'avenir que si le public et le privé travaillent ensemble ».

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