Dans le Sud, Neo-Eco défend une économie circulaire au service de l'adaptation des villes au dérèglement climatique

Fondée en 2008 dans le Nord de la France, Neo-Eco est reconnue pour sa capacité à animer et construire des filières de réemploi, transformant en ressources des déchets de tous types tels les sédiments de ports, les terres d'excavation, les briques ou l'amiante. Impliquée dans d'importants projets en France et à l'international, elle choisit en 2020 - suivant le désir d'un de ses salariés - d'ouvrir un bureau à Marseille. Un bureau qui compte pour l'heure cinq salariés et qui apporte une nouvelle coloration à l'activité du groupe, mettant ses compétences en économie circulaire au service de l'adaptation des villes au réchauffement climatique.
Parmi les projets-phares de Néo-Eco dans la région : des études liés à l'aménagement du Parc des Aygalades dans le Nord de la ville, avec la remise en état d'un ruisseau canalisé depuis des années.
Parmi les projets-phares de Néo-Eco dans la région : des études liés à l'aménagement du Parc des Aygalades dans le Nord de la ville, avec la remise en état d'un ruisseau canalisé depuis des années. (Crédits : DR)

Reconstructions en Ukraine et à Beyrouth suite à l'explosion de 2020. Démolitions du Grand Paris et en amont des Jeux-Olympiques de 2024... Portée par une réglementation de plus en plus propice au réemploi et aux éco-matériaux, Neo-Eco s'est fait un nom dans l'univers de l'économie circulaire et du réemploi.

« Lorsqu'elle a été fondée en 2008, il s'agissait plutôt d'une entreprise de process pour les industries du recyclage », explique Robin Cres, responsable de l'agence marseillaise. Sédiments de dragage, béton, brique, tuiles, métal .. L'entreprise accompagne industries, acteurs du BTP et aménageurs dans la gestion de leurs déchets, quitte à créer, lorsque cela est nécessaire, de nouvelles filières de réemploi.

Mais avec le temps, elle s'aperçoit que les filières de l'économie circulaire manquent de liant. Ce à quoi elle veut remédier. « Nous somme un maillon de la chaîne qui permet de mettre tout le monde autour de la table ».

Une approche écosystémique

Dès lors, son activité s'articule autour de trois grands métiers. Le premier consiste en l'accompagnement des territoires : Métropoles, grands aménageurs, bailleurs sociaux ... « Nous les aidons à avoir une vision de leur territoire en termes de consommation de matières premières et de rejet de déchet ». On parle alors de « métabolisme territorial ».

Un travail qui se fonde sur des études de terrain à partir desquelles une feuille de route peut être établie. « Nous mobilisons les élus et identifions avec eux des actions pilotes à mettre en place ». Un cheminement qui oblige ces derniers à sortir des habituels silos de réflexion inhérents aux administrations, au profit d'une approche plus transverse. « Avec nos compétences en intelligence collective, nous participons à la conduite du changement ».

À leurs côtés, Neo-Eco regarde, « en fonction des besoins et des déchets produits, quelles sont les filières à mobiliser et quelles sont celles qu'il faudrait créer ». Et pour cela, Neo-Eco peut compter sur son riche réseau, et sur l'écosystème qu'elle a bâti, composé de startups à qui elle a tenu la main. Parmi elles : Mashup, qui industrialise les projets pilotes de Neo-Eco, Valame, capable de valoriser l'amiante, Faiseurs de terre qui rend fertiles les terres bétonnées ou encore Etnisi qui transforme des coquilles de fruits de mer en matériau de construction. L'entreprise est aussi liée au monde de la recherche. « L'Institut des Mines et Télécoms de Douais est un partenaire historique. A Marseille, nous sommes également en lien avec Aix-Marseille Université », explique Hugo Maurer, chargé de développement au sein de Neo-Eco à Marseille.

Un réseau tout aussi utile dans le second métier de l'entreprise : l'organisation de « chantiers circulaires ».

« Nous accompagnons les projets de construction et d'aménagement en optimisant la valorisation des matériaux, en veillant à ce qu'un maximum de matériaux recylclés, réemployés, bio-sourcés ou géo-sourcés soient intégrés ».

Un travail qui doit aller de pair avec un certain pragmatisme : « nous visons le net zéro coût pour nos clients par rapport au scénario de base ».

Enfin, Neo-Eco est présente dans l'aménagement d'espaces publics et verts, selon les mêmes principes d'économie circulaire et de coordination d'acteurs divers. Dans ce cadre, il lui arrive de mettre en place « des infrastructures physiques pour stocker des matériaux récupérés lors d'une démolition par exemple ». Présente sur de grands projets comme ceux de démolitions dans le Grand Paris, l'entreprise est, assure Robin Cres, « capable de se positionner sur tout type de projet d'aménagement ».

Entreprise libérée

Si la circularité et la pensée écosystémique sont au cœur de l'activité de Neo-Eco, elles fondent aussi, en interne, son fonctionnement. Se qualifiant d' « entreprise libérée », elle promeut la liberté de ses 53 salariés, invités à porter les projets qu'ils souhaitent. Convaincue que cette liberté sera source de créativité, de pertinence et donc de prospérité pour l'entreprise. C'est ce mode de fonctionnement qui lui a notamment permis d'ouvrir un bureau à Marseille, en 2020. Réalisant le souhait de Robin Cres, l'un de ses salariés, originaire de la Cité phocéenne.

D'abord hébergé par SNCF Réseau, partenaire de l'entreprise qui lui prête un local à Marseille, il retrouve Hugo Maurer qui poursuit quant à lui une thèse à Marseille sur les liens entre économie circulaire et adaptation des villes au réchauffement climatique. Ce dernier s'intéresse à la question du réemploi de matériaux et a envie d'y mêler des enjeux de biodiversité. Il rejoint l'entreprise où il se réjouit de pouvoir monter des projets de territoires en phase avec ses convictions.

Ancrage territorial

D'autant que lorsque l'aventure marseillaise démarre, « le territoire était en retard par rapport au Nord pour ce qui est de l'économie circulaire. Ici, il y a beaucoup de carrières, la perception des déchets n'est pas la même. Les maîtres d'ouvrage ne savaient pas vraiment ce que cela signifiait. Et l'économie circulaire n'était pas suffisamment prise en compte dans les marchés publics. Il y a avait tout à faire ».

Alors la jeune équipe étoffe son réseau. Devenant une figure clé de l'écosystème. « Depuis septembre 2022, nous animons le groupe de travail de la Région Sud sur le sujet, en lien avec les acteurs du BTP ». Acteurs parmi lesquels Raedificare, spécialiste du réemploi des déchets de chantiers. « Nous avons choisi de nous positionner dans la complémentarité des acteurs présents ».

Une complémentarité qui conduit l'antenne marseillaise - qui gère actuellement une vingtaine de projets - à être un peu moins présente que le reste du groupe sur le BTP, au profit de l'aménagement.

Rendre les villes méditerranéennes plus résilientes

Parmi ses projets phares, celui de l'aménagement d'un grand parc de 22 hectares dans le quartier des Aygalades, dans la partie Nord de Marseille, sur l'emprise de la gare de fret Marseille-Canet. Un parc où il est question de faire sortir de terre un ruisseau -l es Aygalades - canalisé depuis de nombreuses années. Une façon d'apporter un îlot de fraîcheur (et de vie sociale) aux habitants sur un territoire très minéralisé, de redonner place à la biodiversité et d'éviter des inondations grâce à une meilleure absorption des eaux de pluie.

Aux côtés de l'aménageur de ce parc, Euroméditerranée, Neo-Eco a participé aux réflexions sur la question des sols et de leur utilisation, autrement dit : « comment aménager ce parc sans abîmer les terres agricoles alentours », en s'appuyant plutôt sur les matériaux déjà présents. « Avec toutes les institutions rattachées à ce projet, nous avons élaboré une stratégie de développement et monté un programme de recherche-action autour de plusieurs points », à savoir : « réunir les institutions autour de la réhabilitation écologique, inventer de nouveaux process industriels et organisationnels qui permettent d'articuler les compétences de chacun... ».

Ce, en lien avec les acteurs de la recherche. Mais aussi avec les habitants (enfants notamment), les acteurs associations et culturels, eux aussi impliqués dans un projet qui a vocation à inclure le plus grand nombre. Au service d'une ville plus résiliente face au réchauffement climatique. Adaptation qui passera, pensent les deux salariés marseillais de Neo-Eco par « le BTP mais aussi par la biodiversité ». Un constat intimement lié au territoire, pensent-ils.

« C'est très méditerranéen de se poser la question de la gestion des inondations et des épisodes cévenoles ».

Sans parler des canicules de plus en plus longues, régulières et intenses.

Aux Aygalades, l'enjeu pour l'entreprise est de faire la preuve de ces affirmations. De montrer dans quelle mesure le réemploi et l'économie circulaire vont de pair avec les défis de l'adaptation. A travers l'installation de couverts forestiers, le travail du sol, le développement d'une « ville éponge » capable de mieux gérer l'instabilité des précipitations.

Une preuve qui aura vocation à faire des émules, notamment le long d'autres cours d'eau enfouis à Marseille, mais aussi partout dans la région. Et tout autour de la Méditerranée.

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