Olga Sawadogo, le goût de l'entreprenariat (et autres réflexions sur l'aide aux néo entrepreneurs)

A trente ans, Olga Sawadogo dirige Nice Eat, petite entreprise de livraison de plats gourmands et équilibrés à destination des sportifs et, plus largement, de ceux dont le régime alimentaire est contraint pour raisons de santé. Pas issue d'une famille d'entrepreneurs, elle a appris au fil du temps, accompagnée par deux programmes d'aide à l'entrepreneuriat : les Déterminés et le Foodcub. Des programmes qui l'ont aidée à démarrer. Mais le plus dur reste de se maintenir, ce que semblent parfois oublier les diverses initiatives (publiques comme privées) à destination des jeunes entrepreneurs.
(Crédits : DR)

Olga Sawadogo a trente ans et, enfin, un local à elle. Une ancienne pizzeria du quartier des Chartreux, proche du centre-ville mais et abordable, qu'il a fallu retaper. « Il n'y avait qu'un lavabo. C'était horrible », sourit la jeune cheffe d'entreprise. L'odeur de peinture flotte encore dans la pièce, mêlée aux effluves carnées du plat du jour. Des pâtes complètes aux épinards et au bœuf, rehaussées par une gourmande sauce au parmesan.

Un plat qui, comme tous ceux qu'elle mitonne entre ces murs, s'adresse à un public plutôt sportif qui souhaite bien manger mais manque de temps pour cuisiner. « Je veux faire une cuisine qui soit à la fois bonne et personnalisée aux besoins des clients ». Que ceux-ci veuillent accroître leur masse musculaire ou au contraire mincir. « J'ai choisi ce positionnement car quand j'allais à la salle de sport avant l'heure du déjeuner, je voyais que beaucoup, en sortant, allait au supermarché pour tenter de composer leur repas, mais ce n'était pas idéal ». Elle a envie d'y remédier. D'autant qu'elle est amatrice de cuisine et que depuis toujours, elle s'intéresse aux liens entre sport, santé et alimentation. « Notre corps est ce que l'on a de plus précieux. Et nous en sommes le seul maître », pense-t-elle.

Entreprendre ... sans savoir par où commencer

Olga Sawadogo est née à Marseille. 14e arrondissement. Son père est professeur. Sa mère aide-soignante. Après le baccalauréat, elle obtient un master sport et santé au Staps de Luminy. S'ensuit un BTS diététique, toujours à Marseille.

Très tôt, elle veut entreprendre. En Master, elle a déjà créé une association d'éducation à la nutrition et d'activité physique pour les jeunes, de la maternelle au collège. Et maintenant que se prépare son entrée dans le monde du travail, elle sait qu'elle veut « créer une activité qui [lui] ressemble ». Un métier sur-mesure en somme, qui lui permettrait de satisfaire son « besoin de tout maîtriser » tout en alliant ses trois passions que sont « le sport, la santé et la diététique ». Mais par quoi commencer ?

« Au début, j'étais un peu seule à la maison, avec mes idées et mon ordinateur ». Elle imagine. Conceptualise. Mais a du mal à passer à l'action. C'est alors qu'elle entend parler du programme des Déterminés qui se lance à Marseille après avoir été fondé en région parisienne. Un programme entrepreneurial intensif de six mois, qui aide des jeunes a priori éloignés de l'entrepreneuriat à se lancer. Elle fonce.

« J'ai commencé en septembre 2021. Au début, j'étais hyper timide. Et j'étais un peu gênée car je n'étais qu'au stade de l'idée. Une idée assez vague. Je n'avais pas du tout testé le marché. Mais ils m'ont poussée à réellement mettre en place mon projet. A être plus dans le concret ».

Des Déterminés au Foodcub

Elle commence par faire de la publicité sur les réseaux sociaux et trouve ses premiers clients. Des particuliers pour l'essentiel. Mais elle cuisine depuis son domicile, ce qui n'est pas simple. Jusqu'à ce que débarque à Marseille un autre projet d'accompagnement à l'entrepreneuriat : le Foodcub, incubateur culinaire qui met à disposition de jeunes porteurs de projets des cuisines et une clientèle au sein des Docks Village. « C'était exactement ce qui me manquait » souligne l'entrepreneuse.

Là, elle apprend à connaître son public. Adapte son offre en fonction des appréciations qui lui sont faites et affine son modèle. « Je me suis rendu compte que la restauration sur place n'était pas pas ce qui me convenait. Faire attendre les gens, cela me stresse ». Elle préfère un modèle de vente à livrer. Et envisage de mettre au point un système d'abonnement qui permet de répondre aux besoins d'organisation de ses clients tout en s'offrant une plus grande visibilité.

C'est avec l'esprit plus clair qu'elle peut voler de ses propres ailes, investissant en mars 2022 le local qu'elle occupe actuellement. Le moment, aussi, de se confronter à la réalité économique de l'entrepreneuriat. « J'ai eu quelques aides financières. Une bourse French Tech Tremplin et une prime de l'Adie qui m'ont permis d'avoir un peu de trésorerie, ce qui est important en restauration. On sort beaucoup d'argent ». Mais ses charges - amplifiées par l'inflation- sont encore à peine couvertes par son chiffre d'affaires. « Il faut que je démarche davantage mais je manque de temps ». Elle essaie donc de s'entourer au mieux. A ses côtés, Sarah, stagiaire en marketing venue de l'IUT Saint-Jérôme, lui a permis de décrocher un premier contrat pour une salle Fitness Park à Marseille. « Ils nous ont commandé une prestation pour deux jours de formation qu'ils organisent ». D'autres dates pourraient s'ajouter à la commande.

« Il faut qu'on vende beaucoup plus », explique Olga Sawadogo qui envisage de s'élargir sa cible, en s'adressant non seulement aux sportifs mais plus largement à tous ceux qui ont des contraintes alimentaires type allergie au gluten. « Quand ces personnes sont en extérieur, trouver un repas à la fois bon et équilibré relève souvent du casse-tête ». Elle reçoit déjà des demandes en ce sens.

« Il faudrait davantage de suivi pour que l'on tienne les trois premières années »

Jeune entrepreneuse à Marseille, elle est aux premières loges pour observer l'engouement de la jeunesse pour l'entrepreneuriat et la pléthore de dispositifs visant à les y accompagner, à l'image des Carrefours de l'entrepreneuriat initiés dans le cadre du plan Marseille en Grand. « C'est bien d'accompagner des jeunes qui, comme moi, ne savent pas forcément comment s'y prendre au début ». Mais leur mettre le pied à l'étrier ne fait pas tout. Elle pense qu'il faudrait rester un peu plus longtemps à leurs côtés, histoire de s'assurer qu'ils ne tombent pas. Et surtout qu'ils ne se fassent pas trop mal. « On joue le jeu. On intègre vraiment tout ce qu'ils nous disent. Mais nous prenons des risques pour cela. Il faudrait davantage de suivi pour que l'on tienne au moins les trois premières années ».

Elle, se donne encore un an et demi. Le temps de consolider son activité avant de pouvoir passer un nouveau cap. « Dès que je le pourrai, j'aimerais travailler avec plus d'approvisionnements en circuits courts et bio ». Et d'ici cinq ans, elle s'imagine à la tête d'une franchise qui lui permettrait d'être présente partout en France. Être ancrée à la réalité n'empêche pas de rêver.

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