Le cadre est soigné. Sous un soleil provençal et face à un champ de panneaux photovoltaïques installés dans la zone d'activité de Manosque (Alpes-de-Haute-Provence), le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a annoncé ce vendredi « un plan de bataille pour le solaire ». A l'heure de la transition énergétique, l'ambition du gouvernement est de « développer massivement » les panneaux solaires qui ne représentent que 2,5% de la production française en 2020. Des besoins appelés à très fortement augmenter pour alimenter les différents projets de réindustrialisation.
« L'atout, c'est que ça se déploie rapidement et à un coût raisonnable », présente Bruno Le Maire. Deux arguments qui en font une alternative au nucléaire en attendant la modernisation du parc et la construction de nouveaux réacteurs qui s'étendent sur plusieurs décennies. Mais ces deux arguments doivent aussi être prouvés dans la pratique pour atteindre l'objectif affiché d'une production de 100 GW d'ici 2050, contre 19 GW aujourd'hui.
Terres agricoles et délaissés routiers
« Il faut à présent accélérer, pour passer à 6 GW de capacités supplémentaires par an - c'est-à-dire le double de ce que nous faisons aujourd'hui », expose d'ailleurs le ministre. Ce qui engendrera une réhausse du programme pluriannuelle de l'énergie (PPE). Une croissance pour laquelle Provence-Alpes-Côte d'Azur a une carte à jouer, car 50% de la production actuelle de l'énergie solaire provient d'Occitanie, Nouvelle-Aquitaine et Rhône-Alpes. « Nous pouvons faire beaucoup mieux ici, dans ce territoire du soleil », glisse Bruno Le Maire.
Les intentions sont là, mais encore faut-il des mesures pour les encourager. La première pour soutenir ce déploiement « massif » espéré est de faciliter la mise à disposition de foncier. Un décret sur l'agrivoltaïsme doit être publié pour permettre « de déployer des panneaux solaires sur une terre agricole lorsqu'il apporte un service direct à l'agriculteur ». Des appels à manifestation d'intérêt vont également être lancés pour équiper le « délaissé routier » du réseau national, ces espaces routiers qui ne sont pas utilisés pour l'exploitation peuvent accueillir des panneaux solaires depuis le vote de la loi sur l'accélération de la production d'énergies renouvelables. En revanche, Bruno Le Maire n'a pas abordé le sujet des plans locaux d'urbanisme, perçu par les professionnels du secteur comme des freins aux déploiements de panneaux dans les villes.
Créer une filière de production de panneaux
L'autre pan de ce plan de bataille ne concerne pas la production d'énergie, mais des panneaux eux-mêmes. A Manosque, ils proviennent de Malaisie. « Acheter l'équivalent de 100 GW de panneaux solaires représente 20 milliards d'euros d'investissements. A-t-on envie que cet argent arrive dans les poches de nos partenaires étrangers ? Je préfère que ces 20 milliards d'euros servent à ouvrir des usines et à créer des emplois bien rémunérés pour nos compatriotes », pointe Bruno Le Maire qui veut atteindre 40% de panneaux conçus en France pour 2030.
Sur ce point, les deux projets étendards sont Carbon à Fos-sur-Mer et HoloSolis, à Hambach en Moselle. Si ces giga-usines en devenir bénéficient de crédit d'impôt, Bruno Le Maire souhaite que la puissance publique joue aussi un rôle dans la commande. Il « appelle les grands donneurs d'ordres » à « s'engager dans le « Pacte solaire » », un label annoncé en mai certifiant le made in France ou Europe. Si l'appel vaut pour le monde du privé, le public aura bien sûr un rôle important à jouer, comme souvent.
« À partir de cet été, nous renforcerons le critère carbone dans les appels d'offres sur le photovoltaïque bâtiment », prévient Bruno Le Maire qui évoque aussi « une prime pour les panneaux bas carbone dans le nouveau guichet tarifaire pour le petit photovoltaïque au sol ». Des critères qui pourraient être étendus à tous les dispositifs de soutien public à l'énergie solaire.
Sujets les + commentés