À Marseille, le président de l'AMF rappelle le rôle des communes comme "premier financeur" de la culture

Les 11 et 12 avril, Marseille accueillait le congrès de la Fédération nationale des collectivités pour la culture qui rassemble plus de 450 collectivités territoriales autour du thème des politiques culturelles. Ouvert en présence du président de l'Association des maires de France, David Lisnard, ce congrès a tenu à rappeler combien la culture est essentielle et combien les collectivités en sont un maillon essentiel. Tout en se projetant pour imaginer l'avenir des politiques culturelles, avec le vœux que celles-ci soient davantage décentralisées.
(Crédits : DR)

Marseille. « Ville d'art et de culture » dont les traces remontent à loin puisque « certaines peintures de la grotte Cosquer datent de 27.000 ans avant notre ère », décrit Frédéric Hocquard, président de la Fédération nationale des collectivités pour la culture (FNCC). « Et plus récemment, c'est Marseille qui a été la dernière capitale européenne en France, en 2013 ». Capitale européenne « dont la ville porte encore de belles réalisations comme le Mucem, la Friche Belle-de-mai réhabilitée ou encore la Biennale internationale des arts du cirque ». Autant de symboles qui ont conduit la FNCC a choisir Marseille pour la tenue son 25e congrès national, dans ce que David Lisnard, président de l'Association des maires de France, présent à la séance d'ouverture, a qualifié de « moment crucial pour l'avenir de notre politique culturelle ».

Un moment crucial dans lequel les acteurs en présence ont souhaité rappeler le caractère essentiel de la culture. « Je ne crois pas qu'il existe une culture populaire et une culture élitiste », entame Jean-Marc Coppola, maire-adjoint de Marseille en charge de la culture. « Je crois en une culture universelle qui émancipe et qui fait grandir ». Une culture « qui accompagne le progrès moral, écologiste, éducatif, philosophie de notre pays ». Des propos salués par David Lisnard : « La culture est le propre de l'homme. C'est elle qui permet d'échapper au déterminisme social et de se constituer un capital individuel quel que soit notre parcours, notre sexe, notre origine, nos moyens financiers ». Et d'ajouter : « la culture est un bien essentiel », raillant la décision du gouvernement de la classer parmi ceux qui ne l'étaient pas au moment du confinement en temps de covid-19.

Variable d'ajustement

Et au-delà des circonstances exceptionnelles, regrettent les participants à la table ronde d'ouverture, la culture est bien souvent une variable d'ajustement des politiques budgétaires, comme le souligne Frédéric Hocquard. « Le Ministère de la culture a annoncé une baisse de 200 millions d'euros des crédits à la culture pour 2024 ». Et d'alerter : « Les collectivités locales ne viendront pas compenser ces baisses. Elles ne le peuvent plus. Leur budget se doit, de par la loi, d'être à l'équilibre. Or nos coûts de gestion augmentent tandis qu'il faut investir pour la transition écologique et faire face aux tensions sociales de plus en plus nombreuses. Tout cela génère de nouvelles dépenses et pas forcément de nouvelles recettes. Il est donc de plus en plus compliqué de maintenir le haut niveau de financement de la culture que nous souhaitons ».

Car comme il le rappelle, « le financement de la culture en France est le fruit d'une intervention partagée entre l'État et les collectivités territoriales ».

En premier lieu desquelles les communes et intercommunalités qui font figure de « premier financeur de la culture », insiste David Lisnard, avec un budget total de 10 milliards d'euros annuels contre 5 milliards pour l'État. Le président de l'AMF pointe deux domaines particulièrement en difficulté : le patrimoine d'abord, qui doit voir ses crédits diminuer de 100 millions d'euros en 2024. « Il est vrai que l'on peut différer certaines opérations, mais cela n'enlève rien au problème du manque de crédits des collectivités et de l'État pour sauver, assurer la transmission et rénover notre patrimoine ». Néanmoins, c'est la situation du spectacle vivant qui suscite pour lui le plus d'inquiétudes. Ajoutant que « nous devons aussi balayer devant notre porte. Je suis parfois effaré du cohérence dans l'offre culturelle. On se tire la bourre à 10 kilomètres d'intervalle, on fait des doublons, du gaspillage. Il faudrait mieux éditorialiser nos établissements, nos théâtres, nos compagnies. S'organiser pour que le foisonnement culturel ne soit pas une anarchie consommatrice d'argent public pour peu de rendus ». Et de souligner l'importance d'agir sur la diffusion des œuvres relevant du spectacle vivant. « Il faut obliger, ou tout du moins inciter à une vraie diffusion de ces œuvres pour qu'il y ait un vrai partage avec le public et sortir de l'entre-soi ».

Décentraliser les politiques culturelles

Sur l'articulation entre État et collectivités dans les politiques culturelles, Frédéric Hocquart a quant à lui plusieurs suggestions. « Il faut que l'État nous aide et que nous ne restions pas dans une politique où pour 1 euro apporté les collectivités, l'État en apporte autant. Il faut desserrer les contraintes budgétaires et fiscales qui pèsent sur nous. Pourquoi pas permettre aux collectivités de retrouver des marges de manœuvre ? Par exemple, en Île-de-France, la Région s'est entendue avec le Ministère des transports pour déplafonner la taxe de séjour afin de financer les transports en commun. Pourquoi ne pas imaginer un mécanisme financier similaire pour le financement de la culture sur les territoires qui le demandent ?».

Et au-delà des questions strictement budgétaires, Frédéric Hocquart défend un changement de méthodes, considérant qu'il faut aller plus loin en inventant de nouveaux outils de coopération et de concertation. Pour aller vers plus de cogestion. Défendant une décentralisation des politiques culturelles.

« Nous devons nous battre avec acharnement pour le principe de libre administration des communes », poursuit David Lisnard. Un principe « constitutionnel mais bafoué chaque jour. Si nous n'avons pas la capacité juridique et financière de soutenir la culture, l'offre et la demande s'effondreront, amplifiant les problèmes de violence, d'égoïsme, de confrontations identitaristes et la République française sera bafouée ».

S'appuyer sur les collectivités. Compter sur elles. D'autant qu'elles ne manquent pas d'inventivité, tout en étant les premières à pouvoir entendre les besoins des citoyens. En témoigne le long « inventaire à la Prévert » dressé par Frédéric Hocquart. De Fontenay-sous-bois avec « son nouveau théâtre municipal qui associe les habitants à la programmation » à « la Biennale interculturelle consacrée à la multiculturalité » en Seine-Saint-Denis en passant par la politique de lecture publique qui a valu à Strasbourg - une première en France - le label de capitale mondiale du livre de l'Unesco. Autant d'initiatives susceptibles de tracer des pistes, « pour inventer l'avenir de nos politiques en matière culturelle ».

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Commentaire 1
à écrit le 13/04/2024 à 9:29
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Surtout qu'il y a de la demande forte en province mais bon entre une caste du spectacle qui se prend pour le centre du monde et la nécessité de distraire d'abord et avant tout les répliquants des grandes villes que cette vie hystérique imposée mène à...

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