A Marseille, après les émeutes, le tourisme sera-t-il vraiment impacté ?

Avec un PIB régional de l’ordre de 13%, le tourisme est évidemment l’un des piliers de l’économie de Provence Alpes Côte d’Azur. Dans les Bouches-du-Rhône c’est 7% du PIB et 50.000 emplois directs et indirects. Marseille concentre évidemment une part non négligeable de cette manne. Et Marseille a été l’épicentre des vandalismes perpétrés ces derniers jours. Or, on sait le tourisme être sensible aux contextes capables de fragiliser son équilibre. Si l’impact des émeutes se mesure ces dernières 48 heures, aura-t-il pour autant un effet de traîne ? Les stratégies d’attractivité, qui s’inscrivent dans le temps long, prendront-elles le pas ? Quid de la capacité de résistance des marques ?
(Crédits : DR)

Le tourisme est un secteur fort et fragile à la fois. Fort par son poids dans l'économie de Provence Alpes Côte d'Azur, contribuant pour 13% au PIB régional, générant près de 20 milliards d'euros de dépenses de la part des touristes selon les données du Comité régional du tourisme Sud. Fragile parce que très sensible aux événements capables de le déstabiliser et les exemples récents tels celui de la crise sanitaire le démontrent clairement.

Autant dire que les émeutes de début juillet sont de l'ordre à fragiliser un secteur qui se trouve impacté très rapidement par des événements colportant mauvaise image et manque de sécurité, deux facteurs somme toute primordiaux, surtout vus par le grand international.

Si au lendemain d'un week-end haut en tensions, les responsables économiques et politiques sont montés au créneau pour accorder les aides - financières - notamment, reste que le sujet ne doit pas être vu que dans son immédiateté. Et cela, même si, très opportunément, le ministre de l'économie Bruno Le Maire y est allé de son intervention sur CNN, histoire de précisément porter au grand international, un discours de réassurance.

Savoir raison garder... et rassurer

Garder la mesure, c'est ce que dit précisément le président du Comité régional du tourisme Sud. « Nous avons dénombré 400 commerces vandalisés dans le centre-ville de Marseille et ses alentours, 40 dans les Alpes-Maritimes et aucun dans le Var. Il faut faire attention à l'image véhiculée, à une image négative qui concerne un périmètre très localisé », prévient François de Canson. Rejoint sur ce point par Danielle Milon, la présidente de Provence Tourisme elle aussi inquiète d'une « image abîmée » qui « pèsera sur l'activitédes cafetiers, restaurateurs, commerçants, laquelle se remet à peine des conséquences d'autres crises », la crise sanitaire et les Gilets Jaunes, principalement. Et de craindre des conséquences plus importantes, des cessations d'activité notamment.

Un premier état de sidération passé, des aides financières décidées et débloquées, quid des réels impacts ?

Car le tourisme a déjà affronté des situations qui l'ont mis à mal. En France, comme à l'international, le sujet de la sécurité est sans doute le facteur n°1 capable d'entraver l'attractivité, souvent objet de stratégies qui se sont inscrites dans le temps, qui ont exigé temps et investissements. La sécurité comme nerf de la guerre désormais, que celle-ci soit des biens et des personnes, sanitaire, alimentaire... « L'Etat doit jouer sur la sécurité, c'est ce qui va peser », renchérit François de Canson. Comprendre, renvoyer une image positive, rassurante. Et donc impactante.

Car le tourisme sait être résilient et l'une des destinations à l'avoir éprouvé est New York, terriblement touchée par les attentats du 11 septembre 2001. Big Apple qui a su rebondir au bout de quelques mois retrouvant une activité de bon ton. Même constat en France après les attentats de 2015... ou plus près du territoire, Nice après l'attentat du 14 juillet 2016.

« De nombreux territoires ont subi des actes de violence. Mais, au bout d'un moment, la marque absorbe cela et les impacts demeurent à court terme », confirme Christophe Alaux, directeur de la chaire « Attractivité et nouveau marketing territorial ». « Après les attentats du 11 septembre, New York s'est relevé plus fort, Nice également après l'attentat du 14 juillet. Les touristes, comme les investisseurs font la part des choses, ils savent parfaitement que ces événements négatifs ne se produisent pas 365 jours par an ». Et celui qui dirige également l'Institut de Management Public et de Gouvernance territoriale d'ajouter que « le tourisme, à Marseille et dans les Bouches-du-Rhône est très français ». Donc à même de parfaitement comprendre le contexte dans lequel les événements se produisent.

La sécurité, critère de choix

« L'aspect sécuritaire s'est invité dans le choix des destinations », confirme Lionel Flasseur. Le directeur de One Provence, l'agence d'attractivité de la métropole Aix-Marseille Provence, passé par Onlylyon, assure que la sécurité, quelle que soit son origine, est entrée dans le Top 3 des critères. Mais que ce qui conforte aussi l'attractivité touristique c'est « la relation avec les habitants du territoire ». Un effet proximité qui est aussi un élément des stratégies déployées.

Et c'est là où intervient la notion de marque. Le Sud, avec ses trois marques monde - Provence, Alpes et Côte d'Azur - chères au président de la Région, Renaud Muselier, surfe donc sur une imagerie, des sensations, une réputation... très ancrées. Des marques qui s'exportent, loin, très loin. « Nous devons montrer que notre région est une terre d'exception, faite de festivals, de bien vivre », indique François de Canson. « L'attractivité demeure ce qu'elle est », dit aussi Danielle Milon, par ailleurs maire de Cassis, située à 20 km de Marseille, rappelant que même si les marques sont fortes, les efforts pour continuer de nourrir l'attractivité sont nécessaires. Sans en rajouter pour autant. Parmi les facteurs d'attractivité, la grotte Cosquer et ses 800.000 visiteurs en un an a redonné un coup de projecteur sur Marseille, quand MPG - Marseille Provence Gastronomie - veut appuyer sur le côté bien vivre et bien manger de la Provence.

Travailler la marque

Car dans un contexte de lutte contre le sur-tourisme, les professionnels du secteur et le CRT Sud avec eux ont décidé de plutôt faire porter les efforts de conquête et de communication sur ce que l'on appelle les ailes de saisons, ces périodes dans l'année jusqu'alors moins source de fréquentation. Le travail de la marque c'est donc le point névralgique. « Il faut travailler la marque pour éviter sa dégradation », souligne Christophe Alaux. « Une marque faible a du mal à ne pas pâtir d'une mauvaise image, alors qu'une marque forte absorbe les chocs ». Eviter les métropoles peut, peut-être, bénéficier à un autre tourisme, celui plus vert, plus campagnard ou alpin... Un tourisme durable que le Sud sait aussi proposer. Attractivité pénalisée ou pas, l'analyse des données de fréquentation sera forcément source d'intérêt d'ici la fin de l'été...

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Commentaires 4
à écrit le 06/07/2023 à 10:47
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Merci à la Tribune d'utiliser un français correct, à savoir "affecté" en lieu et place de l'horrible "impacté" issue d'une traduction incertaine de l'anglais..

à écrit le 06/07/2023 à 9:57
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Vous oubliez l'élément principal du tourisme, même si d'abord et avant tout consommateur il est facilement en effet effrayé pour pas grand chose mais peut-être également largement inconscient de dangers réels et directs car son désir de se barrer de ...

le 06/07/2023 à 11:21
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Un cerveau ? De quoi parlez-vous. Le lambda qui bosse pour se payer un mois de conges payes a Palavas ou Juan les pins, est depuis longtemps lobotomise. La grande majorite de ce troupeau de veau merite l'abbatoir. Le soleil s'en charge insidieusement...

le 06/07/2023 à 17:19
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En effet ils sont parqués comme des troupeaux mais avec le sourire, c'est pour ça que l'idée de les concentrer par milliers isolés sur des bateaux au milieu des mers et océans, même ultra polluants a son intérêt. Mais rien qu'en prenant un peu de rec...

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