« Construire la nouvelle économie exige de la prise de risque et c’est le bon moment pour le faire » (José Santucci, Crédit Agricole Provence Côte d’Azur)

Hausse des taux, défaillances d’entreprises, logement des actifs, décarbonation mais aussi investissements, soutien aux projets structurants, aux pépites et entreprises qui performent… l’équilibre quand on finance un aussi vaste et disparate territoire que la Côte d’Azur et les Alpes de Haute-Provence n’est pas simple et surtout pas linéaire, souligne le directeur général de l’établissement bancaire qui a souvent dit voir dans la crise une validation du modèle adopté par la banque coopérative. Mais une économie qui se transforme demande de savoir sortir de sa zone de confort. Une adaptabilité nécessaire, estime encore José Santucci.
(Crédits : DR)

Les données chiffrées, qu'elles soient celles issues de la Banque de France, de l'Insee ou des chambres de commerce et d'industries montrent toutes une résilience certaine de Provence Alpes Côte d'Azur. Une conjoncture que José Santucci observe avec intérêt, pointant ce qui va bien et ce qui doit rester sous surveillance. « Dans le territoire que nous couvrons, la conjoncture semble résister mieux que ce que l'on pouvait imaginer, étant donné le contexte de remontées des taux d'intérêt, de l'inflation - que l'on avait oublié et qui se rappelle à l'ordre. L'effet de ralentissement imaginé existe mais il n'a pas basculé dans un phénomène de récession. Le tourisme produit de bons résultats, la fréquentation reste élevée même hors saison... » égraine le directeur général du Crédit Agricole Provence Côte d'Azur. Mais qui pointe aussi le secteur sous surveillance, celui du bâtiment et plus généralement de l'immobilier, « qui a bénéficié de taux bas, ce qui a permis de trouver de la solvabilité dans un marché où la demande était supérieure à l'offre. Cependant la remontée des taux va avoir un impact sur cette solvabilité et la capacité à acheter », avec, en observation de l'activité des transactions, une demande qui s'écroule sur le neuf et une probabilité que le marché ancien « se bloque aussi ». Quant à l'immobilier tertiaire, si le besoin demeure, le temps de réflexion est désormais plus long.

Montrer l'exemple

« Les projets sont drivés par l'activité. Comme le niveau d'activité reste élevé, les projets aussi », analyse José Santucci. Avec un élément qui tout de même change la donne, celui des transitions, ce qui exige d'avoir « une vision d'avenir différente de celle du passé, qui rejaillit sur la façon de mener des projets en adéquation avec la nouvelle économie. En intégrant le risque. Il va falloir engager davantage de paris risqués et c'est le bon moment pour le faire ».

Ce qui ne se fera pas sans capacité d'investissement. « Pour construire cette nouvelle économie, il va falloir investir beaucoup », insiste le directeur général du Crédit Agricole Provence Côte d'Azur. La transition, forcément, oblige à sortir de sa zone de confort, ce qui semble presque logique pour José Santucci. « Etant donné notre rôle dans les territoires, nous pouvons prendre un peu plus de risques que nos clients. Nous devons jouer ce rôle d'éclaireur, de locomotive, profiter de nos expériences pour conseiller ». Montrer l'exemple en quelque sorte...

Ce qui vaut pour des actions de décarbonation justement, la banque expliquant avoir développé une flotte automobile électrique pour les collaborateurs, le trajet domicile/travail étant, par nature, assez important. Côté cible des particuliers, l'établissement indique, par exemple, collaborer avec deux entreprises pour lesquelles il joue le rôle de distributeur de panneaux solaires.

Digital, RH : le défi de l'attraction

Autre domaine élément de transition, le numérique a bousculé les modèles des banques traditionnelles face à l'arrivée sur le marché de celles que l'on appelle les neo-banques. Mais toutes ont pris le virage, en cherchant à en faire un axe de différenciation et de services, le but revendiqué étant de faciliter le quotidien du client, et de la fidéliser. « Le Crédit Agricole est la première banque digitale », revendique José Santucci, s'appuyant pour l'affirmer sur les 8,5 millions de clients utilisateurs de l'application dédiée - « nous allons toujours vers la facilité pour le client » - mais rappelant que si la cyberfraude est un défi sur ce segment, « les fraudeurs, en revanche, n'ont pas réussi encore à créer de fausses agences ». Une façon de plaider pour l'omnicanalité, « le canal physique reste rassurant ».

Rassurant n'est peut-être pas exactement ce qui permet d'attirer mais question recrutement, nerf de la guerre de toutes filières, se montrer innovant est une façon de consolider une attractivité complexe à conserver. « Le changement qui s'est opéré sur le marché du travail a été assez brutal, post-covid. Recruter, dans nos métiers, devient plus compliqué. Nous déployons une politique de recrutements assez régulière », ajoute José Santucci. Et pour cause, le Crédit Agricole Provence Côte d'Azur a des objectifs de croissance visant le million de clients rapidement, là où son portefeuille de clientèle s'établit à 950.000 clients. Et qui dit croissance du portefeuille dit croissance des effectifs pour l'accompagner. Ainsi en 2022, 230 embauches ont été effectives, « un record », assura José Santucci. Qui estime qu'il « faut mettre plus d'énergie et de créativité dans le recrutement », quitte pour cela à mener des jobs dating dans les stations de ski et sur les plages.

Garder l'enthousiasme

L'innovation, pas uniquement technologique, est certes au cœur des transformations et des stratégies. Très observée, elle est désormais regardée avec davantage de rigueur. Notamment pour ce qui est des startups. Des pépites qui « auront plus de pression concernant la viabilité de leur business-model », souligne José Santucci, « au moment où on n'aura jamais autant besoin d'innovation et de projets qui accompagnent les mutations ».

Attendu et sans doute pas neutre dans la dynamique économique, la perspective des JO 2024 et, cette année, de la Coupe du Monde de rugby peuvent provoquer des effets d'entraînement qui font du bien au moral des acteurs économiques, mais pas seulement. « On peut penser qu'en termes de tourisme, être une vitrine mondiale aura un impact. Il existe dans le sport des valeurs dont nous avons besoin, notamment la notion de collectif, ce qui manque parfois dans notre société », note José Santucci. Estimant que l'environnement économique comme la société justement se situent dans un mode d'adaptation, de profond changement qu'il ne fait pas contrer. « Nous sommes dans un phénomène non pas de dépression mais de transition ».

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.