Pulpe de Vie et le pari de la grande distribution

Installée à Marseille, la marque qui propose des cosmétiques bio fabriqués à partir de fruits et légumes invendus vient de se faire une place dans les rayons des magasins Lidl après avoir rejoint ceux de Monoprix un an plus tôt. Un déploiement qui valide le pari entamé quatre ans auparavant : celui de la grande distribution et d’une stratégie basée sur de gros volumes.
(Crédits : DR)

Les couleurs acidulées de Pulpe de vie dénotent au milieu des flacons L'Oréal et autres Le Petit Marseillais. Ce qui peut surprendre aussi - et c'est moins visible- c'est la taille de l'entreprise qui porte la marque : Biovence. 8 personnes. Minuscule par rapport à ses voisins de rayon. « On est une des dernières TPE en cosmétiques dans la grande distribution », reconnaît Julie Ducret, la fondatrice de la marque à la tranche de pamplemousse.

Pas parce que les TPE sont peu nombreuses dans le milieu des cosmétiques, loin de là. Mais plutôt parce que celles-ci se tournent plus naturellement vers d'autres marchés, ceux des parapharmacies et des magasins spécialisés notamment, privilégiant ainsi des volumes moindres en contrepartie d'une marge plus importante.

Lorsque Julie Ducret fonde Pulpe de vie, c'est également son positionnement. Jusqu'en 2017. « Je me suis rendue compte que dans les cosmétiques, ce type de stratégie ne marche pas, à moins de proposer des produits très chers, avec du botox ou d'autres actifs très coûteux ».

Or sa cible à elle, ce sont les jeunes femmes. Des femmes au budget plus restreint, dont la peau nécessite des technologies moins coûteuses.

Pour les séduire, elle mise sur des produits attrayants, par leurs couleurs, par leur odeur fruitée, mais aussi par une certaine éthique de plus en plus plébiscitée par ce public. Les produits contiennent des actifs extraits de fruits et légumes bio invendus car non conformes, ou « moches ». Une ligique anti-gaspillage en somme. Une éthique qui concerne aussi les contenants, faits à partir de matières recyclées et aussi légers que possible. Quant aux prix, ils sont maintenus en dessous de barrières psychologiques. Pas plus de 10 euros pour les soins. 3 euros maximum pour l'hygiène.

Après Monoprix, Lidl

Ce positionnement permet à la marque d'entrer progressivement dans les principales enseignes de la grande distribution : Carrefour, Auchan, Leclerc, ou encore Système U et Intermarché. En 2020, Monoprix s'ajoute à la liste. Malgré les difficultés rencontrées par la chaîne de magasins face à l'épidémie de covid-19, la cheffe d'entreprise se réjouit de la performance qu'elle y réalise. « On est présent dans 90 Monoprix sur les 280 que compte le groupe. Ce sont surtout des gros magasins, un peu partout en France ». Et l'accord devrait a priori être reconduit l'an prochain. Avec l'ambition de faire encore mieux. D'autant que le public de Monoprix est particulièrement compatible avec la marque : jeune, urbain, soucieux de consommer mieux et prêt à dépenser un peu plus pour cela. « C'est vraiment notre cœur de cible ».

Cela ne l'empêche pas de répondre à des opportunités plus surprenantes, comme celle d'entrer, en mars 2021, à Lidl, connue pour sa politique de prix bas et où, en matière de cosmétiques, les TPE sont absentes. « J'ai rencontré le patron et il a adoré mes produits », explique Julie Ducret. « C'est vrai que c'est assez atypique. Mais cela prouve qu'il y a une tendance forte en faveur des produits plus responsables ». A ce jour, la marque est présente dans 450 Lidl sur un total de 1006 magasins. « Et on est très souvent en rupture. Ça fonctionne très bien ».

Une gamme hygiène pour s'enraciner sur le marché de masse

Si Pulpe de vie perce également dans le secteur du hard discount, c'est aussi parce que, en plus des soins que propose depuis l'origine la marque, elle s'est engagée fortement dans le secteur de l'hygiène en proposant depuis deux ans du dentifrice, du shampooing, du gel douche ou encore du savon. Des produits qui se vendent essentiellement en grande distribution, à un prix moindre, et qui lui permettent de mettre en œuvre sa stratégie de gros volumes : réduire les marges, vendre plus, réduire les coûts de revient, réduire les prix, vendre plus... et s'engager ainsi dans un cercle économiquement vertueux.

En parallèle de la grande distribution, la marque investit aussi le numérique via son site internet où elle réalise une part croissante de ses ventes, avec un effet très dynamisant du covid-19 et des confinements. « Désormais, sur un chiffre d'affairse total de 2,8 millions d'euros, 500.000 euros proviennent de notre site ». Ce dernier permet aussi de fidéliser des clientes très utilisatrices d'internet, en communiquant directement auprès d'elles et en leur proposant des avant-premières. Le site est également le moyen de retrouver toute la gamme soins de la marque, la grande distribution privilégiant plutôt les produits d'hygiène.

S'appuyer sur des usines de plus grande envergure

Au-delà de ces choix concernant la distribution, la stratégie de gros volumes de la marque s'exprime aussi dans sa production. Ainsi, si les soins restent sous-traités par le façonnier historique de Pulpe de vie, à La Fare-les-Oliviers, la production des produits d'hygiène a été confiée à des usines françaises de plus grosse envergure afin de réaliser des économies d'échelle.

L'an prochain, Julie Ducret espère voir le chiffre d'affaires de sa marque atteindre le cap des 5 millions d'euros, grâce à l'entrée à Lidl notamment.

Pour poursuivre sa stratégie de gros volumes, Pulpe de vie entend proposer des produits d'hygiène dans des formats plus importants, avec un système de recharge, ce qui permettra dans le même temps de réduire la quantité d'emballages. Quant à la gamme de soin, elle devrait être épurée. « Là, nous avons 25 références, il ne faudrait en garder que 15. On a des anti-âge, ce n'est pas pertinent étant donné notre cible et notre manque de légitimité sur ce créneau. On doit plutôt se concentrer sur de l'hydratation universelle ou sur les produits contre les imperfections de la peau. Et il faut se cantonner à une routine beauté simplifiée : un nettoyant, une crème et un sérum. Pas plus. Cela nous permettra de réduire nos stocks et de nous concentrer sur nos meilleures ventes ». Se recentrer, pour plus d'efficacité.

Mais qui dit gros volumes dit aussi investissements. « Comme beaucoup de PME, nous avons des problèmes de trésorerie. L'accélération est importante. Il faut trouver comment financer cette croissance ». Si elle en avait les moyens, la chef d'entreprise aimerait investir davantage sur le numérique : référencement, rémunération d'influenceuses... « Il faut aussi payer la production, les stocks, le lancement de produits ». Ainsi, si l'entreprise s'y était refusée jusqu'alors, une levée de fonds est aujourd'hui loin d'être un sujet tabou.

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