Comment Microsoft et la Région Sud font de leur partenariat un accélérateur d'usage de l'IA

ENTRETIEN - Jean-Philippe Courtois, vice-président exécutif et président partenariats de transformations nationales chez Microsoft corporation, et Renaud Muselier, président de la Région Sud, détaillent leurs attentes pour l'avenir après la signature d'un partenariat entre le géant américain et la collectivité pour développer l'intelligence artificielle dans l'administration et plus largement sur le territoire.
(Crédits : DR)

Dans l'ordre du jour de la dernière assemblée plénière fin mars, une délibération sort de l'ordinaire avec la création d'un partenariat entre la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et Microsoft autour de l'intelligence artificielle (IA). Un vote qui se traduit par le test depuis plusieurs semaines par les agents régionaux d'outils du géant américain - notamment Copilot - afin d'automatiser certaines tâches. Pour l'instant, il s'agit de la rédaction automatique de comptes rendus de réunion et de vérifier si les dossiers de demande de subventions sont bien complets.

Une première étape qui doit déboucher sur un développement plus important de l'IA dans la région, aussi bien pour les démarches de la collectivité que pour son attractivité économique. Jean-Philippe Courtois, vice-président exécutif et président Partenariats de transformations nationales chez Microsoft Corporation, et Renaud Muselier, président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, partagent leurs attentes.

LA TRIBUNE : quelle est la genèse de ce partenariat entre Microsoft et la Région Sud concernant l'utilisation de l'intelligence artificielle ?

JEAN-PHILIPPE COURTOIS : C'est la rencontre de deux énergies positives, l'envie des équipes de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, à l'initiative du président Renaud Muselier, et notre côté la volonté de montrer que l'IA pour être accessible pour jouer plusieurs rôles afin d'améliorer la productivité des agents, la satisfaction des citoyens ainsi que l'attractivité économique, sociale et environnementale du territoire.

RENAUD MUSELIER : Nous sommes allés très vite puisque notre premier échange a eu lieu lors du forum économique de Davos en janvier. C'est la rencontre entre un immense professionnel qui apporte des réponses et un curieux qui aime être le premier. L'IA est un passage obligé, elle est partout, ceux qui s'y opposent seront rapidement hors-jeu. Pour nos 6.000 agents, dont 2.000 en centrale, réduire les tâches répétitives de faible valeur ajoutée améliore leur qualité de vie au travail et permet à l'institution d'offrir un meilleur service au citoyen.

JPC : La région Sud est la première région à faire ce type d'accord avec nous pour mettre l'IA au service de sa mission. De manière générale, la France doit aller plus vite sur ce sujet. Une étude Pwc montre qu'aux Etats-Unis 78% des entreprises utilisent l'IA contre 68-69% en Europe et 48% en France. Sur le terrain, nous constatons qu'il y a la connaissance de l'IA par rapport à ce que l'on entend, mais la réalité de l'usage est beaucoup plus limitée. C'est pourquoi nous travaillons sur ces cas d'usage.

Avez-vous d'autres partenariats de ce type qui peuvent illustrer la valeur ajoutée de l'IA ?

JPC - Nous avons de nombreux accords à travers le monde, pour vous donner un exemple en Inde existe un projet orienté sur l'accès à la langue car là-bas l'Anglais et l'Hindi ne sont parlés que par la moitié de la population. Nous avons développé un moyen pour utiliser son téléphone, qui n'a pas besoin d'être le dernier mis en vente, pour faire une demande orale dans son dialecte que l'agent conversationnel IA traduit en anglais afin d'interroger les bases de données gouvernementales pour trouver l'accès à la subvention à laquelle il n'aurait jamais pu avoir accès. C'est un exemple parmi d'autres, aux Etats-Unis il y a de nombreux sujets sur l'administration, en Italie l'IA est utilisée par la justice pour préparer des dossiers.

Jean-Philippe Courtois et Renaud Muselier ont officialisé le partenariat entre Microsoft et la Région Sud

Quelles seront les applications en Région Provence-Alpes-Côte d'Azur ?

RM - La directrice générale des services et ses directeurs adjoints ont travaillé main dans la main pour identifier des cas d'usages, 70 ont été repérés et pour l'instant 10 ont été sélectionnés pour une première phase de test.

JPC - Pour un service comme Allo Région Sud, l'IA est mise en oeuvre pour aider la personne répondante dans sa recherche au milieu d'une tonne de documents. Le temps gagné est considérable. D'autres initiatives sont prévues autour des langues étrangères, des ressources humaines pour l'accueil de nouvelles personnes et leur formation par exemple. L'IA est là pour le travail répétitif qui prend du temps sans valeur ajoutée humaine, c'est un copilote (ndlr : Copilot est le nom du chatbot fonctionnant à l'IA de Microsoft).

RM - L'agent ne peut pas connaître toutes les subventions que propose la région...

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Les tests doivent durer huit semaines, quand est-il pour la suite ?

RM - Nous avons réussi à mettre en place ce partenariat en seulement six mois, cela montre que nos équipes sont très motivées et comme nous sommes les premiers, Microsoft aussi est très motivé. Si tout le monde s'approprie ce projet, qui est un désir des élus, les cas d'usages vont se démultiplier.

JPC - Dans les outils que nous utilisions il y a le fameux Copilot qui va orchestrer beaucoup de ces automatismes et il y a ce qu'on appelle Azur OpenAI, c'est le partenariat stratégique que nous avons avec eux et qui nous permet d'accéder aux modèles comme ChatGPT. La Région Sud va pouvoir développer ses propres modèles spécifiques liés à son référentiel de données. Dans les métiers de la Région Sud il y a des tas de données fonctionnelles liées aux subventions, aux modèles économiques, aux lois d'orientation... L'IA va se « nourrir » de cela pour proposer la synthèse aux différents agents économiques et publics.

Ce sont deux briques de base qui seront utilisées par les agents de la région et qui leur permettra de développer de plus en plus des cas d'usage qui leur seront utiles. Que l'administration donne l'exemple avant les entreprises, ce que je n'ai jamais vu auparavant, est important car si des dirigeants voient dans leurs démarches avec la Région que l'IA leur répond et que ça marche, ils s'interrogeront sur ce qu'ils doivent faire pour leur entreprise.

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Justement, ce partenariat prévoit-il un volet pour le monde économique ?

JPC - Nous allons organiser avec la région des webinaires et des événements auprès des dirigeants de PME et PMI pour leur montrer des cas d'usage sur la gestion de la trésorerie, l'embauche d'employés ou encore la réponse à des clients. Le but est de les mettre face à des cas pratiques pour les aider à comprendre que l'IA est accessible, qu'ils peuvent y aller aussi. Nous avons aussi un accord avec Simplon qui va créer des écoles de l'IA à Marseille, Nice et Cannes. Il y a aussi un volet formation qui doit concerner en France 100.000 personnes.

Enfin, il y aura une opération qui s'appelle les genIAles qui va être sur plusieurs jours à Marseille qui va aller au-devant de centaines de femmes qui ne sont pas dans la tech pour leur donner confiance dans la tech et l'IA. C'est le lancement du mouvement, il y aura d'autres initiatives.

RM - Notre territoire est déjà fort sur ce thème avec 26 territoires de formation, des événements comme le SophIA Summit et plus de 300 startups qui travaillent sur l'IA. Nous avons une souche économique que nous essayons d'accélérer avec nos partenaires malgré les critiques de l'opposition (le rassemblement national s'oppose à ce partenariat car il n'est pas noué avec une entreprise française, NDLR).

Nous développons ce volet sur des cas concrets comme la gestion de l'eau, Microsoft travaille avec la société du canal de Provence (SCP) pour améliorer le plus possible la gestion de l'eau du quotidien, des fuites à la distribution, avec de l'IA en plus des outils de la SCP.

Des déclinaison de votre programme d'accélération « generative AI start-up programme » et de la plateforme « A vous l'IA » sont-elles prévues ?

JPC - Cela est discuté et fait partie de la feuille de route. Nous avons ce programme cadre en France et dans le monde, ainsi qu'une cohorte de startups à Station F qui innove dans l'environnement, il faut voir comment nous pouvons adapter une telle initiative avec les particularités de la Région Sud. Il existe de très belles startups ici.

Pour A vous l'IA, ce projet correspond à la formation des 100.000 personnes en France, il englobe également une plateforme qui permet notamment de réaliser des hackathons, nous l'avons proposé à la Région mais ce n'est pas encore entériné.

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