Farm3 est-elle la ferme du futur  ?

Entrée dans le giron de l'accélérateur du parfumeur Robertet, Villa Blu basé à Grasse, l'agritech originaire de Besançon développe des fermes de cultures aéroponiques sur-mesure qui visent à sécuriser l'approvisionnement en plantes de qualité des industriels dont le cœur d'activité dépend du végétal. Une innovation de rupture qui adresse les problématiques des domaines de la viticulture, de l'agro-alimentaire, de la parfumerie et de la sylviculture pour laquelle la jeune pousse va représenter la mobilisation de la France au service des objectifs de développement durable à l'ONU le 18 juillet prochain.
(Crédits : DR)

Comment produire localement des essences d'arbres ou des pieds de vigne plus tolérants à la sécheresse avec moins d'eau et sans pesticide ? Comment obtenir des fraises des bois aussi productives que leurs homologues maghrébines en France ? Ce sont quelques-uns des sujets sur lesquels planche l'agritech Farm3. Né en 2019, ce centre de recherche en phénotypage (étude des effets de l'environnement sur la croissance des plantes) et équipementier agronomique basé à Besançon accompagne les industriels dont la matière végétale est essentielle à leur activité pour sécuriser leur approvisionnement fragilisé - à court ou moyen terme - par le dérèglement climatique et les événements géopolitiques. "Nous proposons une alternative technologique pérenne à la solution très temporaire qui est de produire toujours plus loin, et ce, en sécurisant la production sur le territoire", explique Romain Schmitt, biologiste et cofondateur avec sa femme Lise Alalouf-Schmitt de la jeune pousse.

Muscler la plante

"L'idée, poursuit-il, consiste à stimuler la plante, à la muscler en créant des conditions de stress pendant sa phase de croissance. Celle-ci apprend de cette expérience et une fois replantée s'avère capable de survivre avec moins d'eau sans qu'on ait impacté son génome". Sur le papier, la chose apparaît séduisante, qu'il convient toutefois de vérifier. C'est tout l'objet de FarmCube : une chambre de culture aéroponique modulaire imaginée, conçue et brevetée par l'entreprise où sont contrôlés les aspects nutritifs et hydriques de la plante ainsi que son environnement climatique. "Nous pouvons induire des environnements qui existent ailleurs sur la planète ou même qui n'existent pas et regarder comment ceux-ci vont influer sur le développement du plant et répondre aux problématiques des industriels".

Une première version s'est intéressée à la sylviculture, lauréate du concours d'innovation I-Nov 2021. Cette ferme verticale à destination des pépiniéristes ou des instituts de recherche forestiers, autonome en eau et en énergie, dispose de chambres de culture de 20 m² qui peuvent faire pousser jusqu'à 5.000 plants choisis pour leur rapidité de croissance et leur résistance. Une innovation qui fait partie des cinq initiatives choisies par la Commission 2030 pour représenter la France à l'ONU lors du Forum politique de haut niveau des Nations Unies pour le Développement durable qui se tiendra le 18 juillet à New York.

D'autres versions se concentrent sur les pieds de vigne ou encore les fraises des bois. "Nous faisons de la prestation agronomique pour nos clients qui viennent avec leurs problématiques. En fonction, nos chercheurs créent un protocole expérimental que nous déployons dans notre centre de phénotypage de Besançon. A l'issue de cette première phase, les paramètres nécessaires à faire grandir le plant avec la qualité voulue sont intégrés dans une ferme 4.0 conçue en interne afin de permettre une production plus industrielle, en complémentarité du champ ou de la serre existante." Voilà pour le process.

Les molécules d'intérêt

Lequel adresse aussi le secteur de la parfumerie. A cet égard, l'intégration le 21 mars dernier de la jeune pousse au sein de l'accélérateur Villa Blu du groupe Robertet, spécialisé dans les parfums et arômes, leader mondial des ingrédients naturels basé à Grasse, avec 703 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022 pour 2.233 collaborateurs, lui ouvre des perspectives évidentes. "Nous souhaitons travailler avec eux sur la molécule d'intérêt de la plante que l'on extrait pour faire le parfum. C'est une problématique différente car on ne va pas chercher ce qui est nécessaire à son évolution ou à sa reproduction, mais à la production de cette ou ces molécules qui peuvent être du déchet." L'autre avantage à cette accélération, l'écosystème des ingrédients de Robertet, qui "va nous renseigner sur les ingrédients qui demain auront de la valeur."

A ce jour, l'activité de Farm3 est exclusivement centrée sur la phase recherche et prestation de services. "Notre priorité est d'expérimenter un maximum de problématiques pour engranger le plus de connaissance possible". Cependant "tous nos clients nous ont fait part de leur volonté d'aller jusqu'à la ferme de production sur mesure une fois les résultats de recherche finalisés", avance Romain Schmitt. Lequel vise un équilibre entre l'activité recherche et l'activité production dès 2026. En attendant, l'entreprise qui emploie 14 personnes table sur un chiffre d'affaires de 500.000 euros à la fin de l'exercice en cours. "Nous en avons déjà réalisé la moitié". Elle est également bien engagée dans un processus de levée de fonds, d'un montant espéré de 4 millions d'euros, qui selon le dirigeant, devrait se conclure à l'automne.

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