Les data centers, futurs projets d’intérêt national majeur ?

Point d’arrivée de nombreux câbles sous-marins, Marseille est un terrain de jeu idéal pour les data centers. Ces grands hangars qui abritent des données numériques essaient d’être le plus proche de ces mêmes câbles afin de gagner quelques millisecondes. Le gouvernement veut faciliter, via un projet de loi, l’installation de ces infrastructures pas toujours très bien vues par les élus ou riverains.
(Crédits : DR)

Avec un ciel nuageux et des températures loin d'être estivales, la fermeture d'un bout des plages marseillaises n'a presque pas été remarquée. Par chance pour les baigneurs, le blocage n'est que temporaire, le temps pour Orange de faire connecter un câble sous-marin de 21.700 kilomètres reliant Singapour et la ville phocéenne. Une infrastructure cachée aux yeux du grand public qui assure le transit des données.

L'opération a beau être impressionnante dans sa mise en place, elle devient doucement une routine à Marseille. Depuis plusieurs années, les arrivées de ces câbles se multiplient dans la deuxième ville de France. Au point de créer de facto un « hub numérique mondial », avancent les différents acteurs du secteur pour qui Marseille est promise à devenir la cinquième ville la plus connectée du globe. En d'autres termes, il n'est pas exagéré de dire qu'il s'agit de l'un des lieux les plus importants du monde pour le transit intercontinental des données numériques avec un peu plus de 15 câbles désormais arrimés.

Des réticences d'élus et riverains

Un statut "naturel" - les câbles posés au fond de la mer empruntent les grandes voies maritimes, Marseille profite donc de sa position géographique - dont le monde politico-économique se réjouit régulièrement depuis l'arrivée des premiers câbles... mais sans toujours connaître le réel l'impact pour l'attractivité territoriale. Pour l'instant, le hub numérique mondial n'a pas attiré de grandes entreprises. En début d'année, Jean-Luc Chauvin, le président de la Chambre de commerce et d'industrie d'Aix-Marseille-Métropole pointait la nécessité de ne pas être attentiste. « Nous sommes bien positionnés, mais il faut créer une filière », plaidait-il. Reste à déterminer lesquelles. Ce type d'installation sert particulièrement aux secteurs ayant besoin de volumes de données importants et d'un débit rapide, comme le jeu vidéo, le cinéma ou les places boursières.

A l'heure actuelle, la seule phase immergée de cet iceberg de données numériques est l'implantation de data centers. Des grands hangars qui abritent les données aspirent à se trouver le plus proche possible des câbles pour gagner de précieuses millisecondes. Le port de Marseille-Fos (GPMM) et ses alentours immédiats ont d'ailleurs été largement plébiscités pour les sociétés voulant poser leurs serveurs. Ce qui inquiète certains élus ou riverains à cause de la gourmandise en énergie de ces installations et les nuisances qu'elles peuvent provoquer. Une réticence qui existe partout où des data centers s'implantent.

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Un enjeu national

Une situation qui n'échappe pas au gouvernement. Pour faciliter les implantations l'exécutif souhaite pouvoir qualifier en « projet d'intérêt national majeur » certains « centres de données ». Une mesure glissée dans le projet de loi sur la simplification de la vie des entreprises, a repéré Le Monde. De quoi permettre de s'affranchir de certaines règles administratives et d'accélérer des procédures. Le permis de construire sera délivré par l'Etat et pas par la mairie concernée, ajoute Le Monde. Pour obtenir ce statut, le data center doit revêtir « eu égard à son objet ou son envergure, notamment en termes d'investissement, une importance particulière pour la transition numérique, la transition écologique ou la souveraineté nationale » indique le projet de loi.

Car, à l'image des crispations locales autour des projets de production d'énergies renouvelables alors même que la décarbonation est acceptée, les data centers constituent un maillon essentiel de la chaîne du numérique. La dématérialisation des usages et des pratiques renforcent les besoins. Et là aussi, il est question de souveraineté. « Le port est un noeud de raccordement pour l'Europe du Sud, c'est aussi un sujet de sécurité pour la France », rappelle Christophe Castaner, en présentant les axes de son nouveau mandat de président du conseil de surveillance du GPMM. Dans l'enceinte portuaire, les implantations devraient s'arrêter après les projets encore en cours. « Il y a peu de perspectives supplémentaires », avance l'ex-ministre. Les data centers vont donc s'éloigner des rives marseillaises et de la ville en elle-même. La zone commerciale de Plan-de-Campagne, à quelques kilomètres, est fréquemment évoquée comme nouvel eldorado. A confirmer...

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