Sportech, le rendez-vous manqué de la souveraineté ?

En embarquant en décembre dernier avec les entrepreneurs français choisis pour accompagner le président de la République en Côte d'Ivoire, Cédric Messina nourrit un peu plus sa réflexion sur le numérique, les jeunes entreprises innovantes, l'écosystème, les grands groupes et le collectif. Une réflexion en forme d'analyse.
(Crédits : DR)

C'est une sensation étrange qui accompagne cette première sélection en bleu. Il est un peu plus de 21h, en ce mois de décembre. A peine débarqué à Abidjan, le choc est brutal. Les yeux englués par une fatigue cumulée, cela semble incroyable de se retrouver dans ce coin là. A ce moment-là. Le dernier avion vient ainsi de se poser sur cette piste authentique. Il porte fièrement son blason tricolore. Vous voyez, celui qui vous inspire parfois un sentiment cocardier quand vous êtes à l'étranger. A quelques jours de Noël, c'est un dernier challenge que tente de relever cette délégation hexagonale. Celui de porter haut les couleurs économiques françaises, dans le sillage d'un déplacement présidentiel annoncé en grande pompe dans les médias. Ces deux jours en terre ivoirienne sont aussi les premiers pas de cette sportech, portée par cet imposant GIE à la composition certaine (faite de grands groupes et de jeunes pousses prometteuses). Nous portons tous en nous l'espoir de laisser une trace.

Le sport, vrai levier économique ?

Au fond, nous partageons même l'ambition d'assister à la naissance d'une famille en pleine structuration. En 48 heures, nous avons enchaîné. Parfois déchanté. Surtout intégré le chemin semé d'embûches qu'il reste à parcourir pour ce secteur qui peine encore à émerger. Quand vous êtes une start-up comme My Coach, ce sentiment est prégnant au quotidien. Le sport est-il réellement perçu comme un levier économique ? Se déplacer à l'ombre des grands groupes vous renvoie forcément à la sensation désagréable d'une équipe coupée en deux. D'un côté, notre CAC40 assis sur ces certitudes, sa résilience et sa capacité d'investissement mais aussi son grand âge (105 ans en moyenne) et son inertie, de l'autre, une jeune génération d'entrepreneurs qui s'agite sans jamais parvenir à l'intéresser. Comme si une force sous-jacente empêchait inexorablement leur rencontre sur le marché français. Le défi numérique ne reste qu'un jeu pour la plupart d'entre eux, tout au plus un sujet à la mode à épingler dans leur fonctionnement. Cet univers du sport numérique suscite justement cette ambivalence. Plus que tous les autres segments, le nôtre est encore structuré sans être totalement sclérosé. Avec de véritables barrières à l'entrée agissant comme un rempart pour cette souveraineté.

Un match, des règles

Mais pourquoi donc n'arrive-t-on à préempter plus rapidement ce marché français ? Et si ce n'était finalement qu'un problème culturel. L'analogie avec « l'essentiel c'est de participer » a été fait à maintes reprises. Mais quel lourd fardeau à porter dans une guerre économique qui n'a pas de frontière. Nous nous retrouvons tous les jours dans un match où les règles ne sont pas les mêmes pour tous. Alors imaginez si en plus vos propres dirigeants ne pensent plus que vous êtes leur futur champion. Ah le fameux, ils sont meilleurs sans jamais avoir vu la solution... Pour autant, j'ai encore ce fol espoir d'un choc émotionnel qui nous rapprocherait. Finalement, c'est dans l'adversité que notre société s'est toujours constituée. L'épopée France98, la sensation de 2018, le parcours des barjots, la symphonie de la coupe Davis 91, le coup de pagaie d'Estanguet ou la dernière foulée de Marie José et les autres n'étaient jamais annoncés. Si aujourd'hui le mot souveraineté résonne encore comme un contresens. Celui du repli et d'un protectionnisme qui ne sonnent pas toujours bien chez les auditeurs de tout bord. Je pense malgré tout que cette notion incarne la réussite économique de cette sportech. Le spectre de la concentration d'un marché pourrait même pointer le bout de son nez. Imaginez cette crainte d'un monopole créatif, pourtant synonyme de bénéfices et de rayonnement culturel chez les autres. Nous voulons tous exister. Mais nous n'existerons pas tous. C'est par cette idée qu'il va falloir commencer. Je ne l'avais pas rédigé ainsi en cette fin d'année. Mais aujourd'hui, ce séjour prend tout son sens. Il prend espoir dans l'équipe qui commence à se constituer. Et si notre victoire était née en cette fin d'année ?

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