« Il est indispensable de poursuivre la modernisation de l’espace aérien » (Reginald Otten, Easyjet)

Présent à Nice où il est venu dévoiler les nouveautés pour la saison d’été, le directeur général adjoint France de la compagnie aérienne low-cost insiste sur quelques points essentiels de la stratégie développée, dont la volonté de faire encore grandir la part dédiée au voyage d’affaires, mais en répétant aussi que les ambitions en termes de décarbonation doivent être à grande échelle, dont l’échelle européenne et d’expliquer pourquoi la modernisation de l’espace aérien fait partie des leviers à activer, vite.
(Crédits : DR)

LA TRIBUNE - Easyjet est très connue pour ses offres tournées vers le voyage de loisirs, comme le confirment les nouvelles destinations que vous venez de dévoiler au départ de Nice pour la saison d'été. Pour autant, la volonté de la compagnie est aussi de prendre sa place sur le segment du voyage d'affaires - qui représente 25% en répartition passagers - là où on vous attendait peut-être moins...

REGINALD COTTEN - Cela fait des dizaines d'années qu'Easyjet s'est positionnée sur le segment voyage d'affaires, en adaptant son produit. C'était une volonté stratégique de la compagnie, ce qui signifie que c'est un segment qui est développé, et ce pas uniquement en France. Cela fait de nombreuses années que nous allons à la rencontre de cette clientèle qui réserve tard et qui a évoluée pour être attirée par ce qu'offre Easyjet sur des courts et moyens courriers point à point. Ce modèle de point à point, sans escales, change la donne, notamment vis-à-vis du prix. Le low-cost, grâce à l'optimisation de ses coûts et l'efficacité de ses opérations, permet des prix attractifs et cela a joué un rôle dans l'attrait pour notre compagnie. Le voyageur d'affaires était face à une surcharge au niveau du prix avec les compagnies classiques, surtout, il y a une dizaine d'années. Le voyage d'affaires cherche l'optimisation quotidienne, c'est-à-dire les bons horaires, les multi-fréquences. Nous avons pu adapter notre offre en fonction de notre croissance, ajouter des fréquences là où nous observions une demande forte, comme sur le domestique français, où le voyage d'affaires est très présent. Et le voyage d'affaires est revenu, post-Covid, nous avons retrouvé la clientèle, aussi bien les grandes entreprises que les petites et moyennes entreprises. Le voyageur d'affaires recherche aussi la ponctualité. Et Easyjet est, aujourd'hui, l'une des compagnies aériennes les plus ponctuelles en France. La question environnementale joue également. Certaines grandes entreprises encouragent leurs salariés à prendre des avions davantage vertueux.

Précisément, sur ce point, vous avez rappelé la commande récente pour la famille des A320 Neo, avec un objectif de 157 avions pour intégrer votre flotte...

A dix ans, notre flotte sera à 80% composé d'avions de la famille Neo. Cela est un vrai objectif. Aujourd'hui, Easyjet est la première compagnie court courrier en Europe à disposer d'une flotte comprenant le plus de Neo, cela représente 25% de notre flotte actuelle avec des livraisons de nouveaux avions qui arrivent, nous dépendons aussi d'Airbus. L'objectif est vraiment de faire la transition et éliminer les vieux avions de notre flotte le plus rapidement possible et, d'ici dix ans, avoir une majorité de la flotte qui soit constituée de Neo, un avion moins bruyant et plus économe en carburant de 16 à 18%.

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La modernisation de l'espace aérien est un autre sujet qui vous tient à cœur... Quelles sont les problématiques et les enjeux ?

Nous pensons que l'organisation de l'espace aérien pourrait être mieux optimisé et permettre ainsi des économies au niveau des trajectoires ce donc des gains en termes d'émissions significatifs. Nous estimons cela entre 10% et 15%. Mais cela reste une prérogative des États et de l'Union européenne. Des projets comme le Ciel Unique européen, qui avait été mis en avant, et qui ont été retardés pour des raisons politiques. Easysjet et d'autres acteurs de l'aérien - toutes les compagnies sont assez alignées sur ce point - estiment qu'il faut pousser ce projet car cela va permettre des gains, d'avoir des trajectoires plus courtes. Cela peut aller vite si les États se motivent et si l'Europe réussit à pousser ces projets. Il existe aussi des inefficacités au niveau local, comme les grèves à répétition, la régulation du contrôle aérien qui crée du gâchis... tout cela, c'est de la pollution supplémentaire. Nous pensons qu'il faut mieux optimiser le contrôle aérien tel qu'il est aujourd'hui, dans les différents États, mais qu'il faut également passer par ces grands projets phares et inciter l'Europe à mettre en avant ces grandes idées qu'elle avait à une époque pour pouvoir atteindre l'objectif de net zéro émission carbone d'ici 2050.

Les décisions prises par les différentes plateformes aéroportuaires, comme à Nice Côte d'Azur avec l'électrification, n'ont pas d'effet de masse comme des stratégies prises au niveau européen mais elles contribuent à la feuille de route de la décarbonation...

Notre feuille de route comprend, justement, de nombreux éléments. Il y a ceux que nous contrôlons et ceux que nos partenaires peuvent nous aider à accomplir. Et puis il y a ceux qui sont plus sociétaux comme la partie électrification et hydrogénéisation qui demandent un investissement de la recherche. Mais la partie aéroportuaire, sur le court terme, joue bien sûr, sa place. Toutes ces initiatives, cumulées, font que nous allons atteindre nos objectifs. Il faut tout mettre en œuvre, en même temps.

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Comment travaillez avec vos partenaires comme Airbus ou Safran sur l'hydrogénéisation du secteur aérien ? Ces groupes ont les connaissances techniques, vous avez la connaissance terrain et des besoins...

Nous avons l'expérience du voyage, les attentes des clients, ce que nous voyons à bord... eux sont sur la partie construction. L'idée est d'aligner tout cela. Cela se traduit par de l'échange de données, des échanges de collaborateurs, d'expériences... C'est comme cela qu'est fondé notre partenariat avec Airbus et Safran au niveau de la motorisation et de l'aéronef lui-même. Nous sommes pleinement impliqués et nous nous consultons mutuellement.

Easyjet regarde-t-elle les startups sur ces questions de décarbonation et d'innovation ?

Tout notre projet environnemental a commencé avec une première collaboration, avec la compagnie Wright Electric, sur la partie électrification de l'aérien, en 2017. Cette compagnie avait pour but de développer un avion 100% électrique et c'est un but qu'elle poursuit. C'est une startup américaine et Easyjet a elle-même, une origine startup nous partageons donc cet esprit, ce qui nous permet de collaborer aisément. Nous ne regardons pas les startups uniquement sur la partie environnementale mais sur de nombreux autres aspects, y compris le service.

Vous croyez moins à la solution du Sustainable Aviation Fuel (SAF) ?

Ce n'est pas que nous y croyons moins, c'est simplement que cela a été mis en avant comme la solution. Le SAF fait partie de notre feuille de route, nous l'utilisons et nous allons continuer de l'utiliser dans les années qui viennent. Cependant, il existe de la complexité autour du SAF, encore beaucoup d'interrogations, ça coûte cher... Ce n'est pas la solution unique pour atteindre notre objectif de 2050.

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Commentaire 1
à écrit le 05/03/2024 à 7:47
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Nos dirigeants s'en tapent de l'écologie c'était seulement pour nous faire payer encore plus. Cette année la plus grosse production de GES de notre histoire et l'année dernière la deuxième, pas besoin de faire un dessin. Nos dirigeants sont nuls.

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