Adastra Films : de films d’auteur à documentaires ?

La société de production, installée à Cannes, s’est inscrite depuis 15 ans dans le paysage cinématographique français. Distinguée dans divers festivals, dont dernièrement avec LaRoy, film américain qui a remporté trois prix au festival américain de Deauville, l’entreprise bénéficie, tout autant qu’elle en fait partie, de la chaîne de valeur des industries culturelles et créatives, laquelle s’est structurée fortement ces dernières années.
(Crédits : DR)

Il y a quinze ans, installer sa société de production à Cannes révélait du challenge voire de la gageure. Tout au moins d'un point de vue du marché domestique. Car si, vu depuis Paris, il fallait défendre une implantation en province, à l'étranger - notamment aux Etats-Unis - le choix de la Capitale du 7ème art relevait d'un choix évident et plein de sens.

« Ne pas être basé à Paris à longtemps été un frein, car tous les décideurs - les plateformes, les distributeurs, les vendeurs internationaux..., sont à Paris. Nous avons justement énormément travaillé notre réseau dans les festivals, à commencer par le Festival de Cannes », détaille Sébastien Aubert, son dirigeant et co-fondateur.

Reconnaissance internationale

Une décennie et demie plus tard, Adastra Films n'a plus à se justifier d'une installation dans la ville du Festival du Film. D'abord parce que la PME a grandi, passant de la production de courts métrages à celle de longs métrages.

Toujours avec des films d'auteur, avec la volonté de faire réfléchir sur la société, ses évolutions. Adastra enchaîne les films et les récompenses, se distinguant dans divers festivals qui comptent tels Sundance, Berlin ou Tribeca. « Nous avons produit, depuis 2008, six longs métrages, 17 courts métrages », raconte Sébastien Aubert. « Nombre de nos films ont circulé dans le monde entier, comme Sundance aux Etats-Unis, ou Berlin. LaRoy, notre tout dernier bébé, tourné en 2022 aux Etats-Unis, avec un réalisateur américain, a en effet remporté trois prix lors du Festival américain de Deauville - le Grand Prix, le Prix du Public et le Prix de la Critique. C'est la première fois que nous sentons un écho incroyable au cours d'un festival ». Et de fait, les récompenses obtenues lors de tels rendez-vous professionnels, ça aide à grandir, à susciter l'intérêt, à ouvrir le réseau... « Quand on est primé dans un festival, cela apporte une crédibilité qui permet sur le film suivant d'aller voir de façon plus confortable les décideurs et les financeurs ».

L'effet chaîne de valeur

Et si le contexte 2024 est plus facile que celui de 2008, c'est aussi parce que l'environnement en proximité a évolué. Cannes, justement, a opté pour une stratégie de constitution de filières, ajoutant des maillons aux maillons existants, notamment via le projet Noveltry et le Cinéum. « Nous avons pu voir cet écosystème grandir sous nos yeux », dont l'arrivée de l'Université et de studios de post-production. Ce qui a radicalement changé la perspective pour Adastra, qui n'a désormais plus que quelques mètres à franchir, quand auparavant elle devait se rendre à Marseille ou Paris pour réaliser la post-production.

« Cela apporte un vrai gain de productivité ». A quelques kilomètres de là, la Victorine, également restructurée, vient compléter cette chaîne de valeur. « Brûle le sang », le prochain long métrage d'Adastra en a fait sa base arrière, pour les castings, les essais...

Le goût de la salle de cinéma

Si la fréquentation des salles de cinéma peine à retrouver son niveau d'avant la crise, Sébastien Aubert explique que les blockbusters, ces succès incroyables souvent très attendus, ont la capacité à drainer les amateurs du 7ème art vers les cinémas. De rappeler aussi que les habitudes prises durant la crise sanitaire - tel l'abonnement aux plateformes de streaming - sont encore bien ancrées dans la façon de consommer le cinéma.

« Avatar 2 est vraiment le film qui a permis de retrouver la salle de cinéma car il a été le premier grand film sorti après la crise. Oppenheimer et Barbie ont aussi contribué. Et côté français, Les Mousquetaires, ont permis de relancer la machine, mais nous n'avons pas encore atteint les niveaux d'avant crise ».

Anatomie d'une chute, récompensée par la Palme d'Or au dernier Festival du film de Cannes et sélectionnée pour les Oscars peut-il contribuer au goût retrouvé de la salle de cinéma ? « Bien sûr, c'est un film extrêmement qualitatif, qui fait ce que nous essayons de faire chez Adastra, c'est-à-dire faire un film d'auteur avec une exigence artistique, un film qui fait réfléchir, avec un parti pris et une vision, un film qui reste accessible pour toucher un grand public ».

Le docu après le long et le court ?

Versé depuis presque deux décennies sur le court puis le long métrage, Adastra pourrait peut-être prochainement ajouter le documentaire à son portefeuille.

Souvent talon d'Achille des projets, complexe pour le néophyte mais majeur pour le professionnel, le financement est un sujet central. Sébastien Aubert a ainsi créé son propre fonds afin de pouvoir enclencher les projets, tant il est souvent long d'attendre telle subvention ou telle autre aide. « Nous levons généralement de petites sommes, entre 30.000 euros et 50.000 euros. Pour LaRoy, notre film américain, nous avons levé près d'un million d'euros auprès d'investisseurs essentiellement américains mais aussi français », indique Sébastien Aubert. Qui pilote également l'agence Films 06, pendant plus corporate.

« Beaucoup venaient à nous pour réaliser des films d'entreprises. Sauf que nous faisions du cinéma. Nous avons donc créé notre agence en 2012 afin de répondre à cette demande. Aujorud'hui toutes les entreprises veulent une vidéo. Cela sert le référencement Google, la présence sur les réseaux sociaux... »

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Azur Business Adastra

Un décideur économique invité chaque semaine

Depuis novembre 2021, La Tribune et BFM Nice s'unissent pour proposer chaque semaine une chronique économique, baptisée Azur Business, qui décrypte l'économie du territoire, ses enjeux, ses défis, les réussites et les problématiques. Tous les mardis, un invité vient apporter son analyse sur une thématique précise.

BFM Nice Côte d'Azur est à retrouver sur le canal 31 de TNT régionale et sur les box au canal 285/518 (SFR) et 360 (Bouygues).

La chronique est animée par Céline Moncel pour BFM Nice et Laurence Bottero, rédactrice en chef Méditerranée-Afrique du quotidien économique La Tribune.

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