Dans le Sud, l'agriculture résiste mieux mais « va dans le mur »

Le mouvement de contestation des agriculteurs s'étend en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Malgré une production axée principalement sur la viticulture ainsi que les fruits et légumes, les filières agricoles régionales se retrouvent elles aussi en grande difficulté.
(Crédits : DR)

Hasard du calendrier, c'est à un mois tout pile du début du prochain salon de l'agriculture que le mouvement de contestation s'étend davantage en région. En Provence-Alpes-Côte d'Azur, elle a démarré le mardi 16 janvier avec une mobilisation dans le Vaucluse. Mais c'est bien ces dernières heures qu'elle prend une autre tournure avec un cortège reliant Orange et Montélimar (Drôme) ce mercredi et des actions attendues dans les Alpes-de-Haute-Provence et les Hautes-Alpes jeudi. « C'est en train de démarrer chez nous », constate André Bernard, président de la chambre d'agriculture régionale. S'il ne bat pas le pavé, retenu par ses obligations d'élu, il soutient totalement la démarche.

Les agriculteurs mettent en avant une situation intenable pour leur profession qu'ils estiment coincée entre une hausse des coûts de production liée notamment à l'inflation et des normes administratives trop strictes ce qui débouche sur une rémunération trop faible. Un contexte auquel la forte concurrence internationale vient rajouter une couche. « Je le vois comme un ras-le-bol face à un empilement de difficultés pour chaque filière », juge Bénédicte Martin, présidente de la commission agriculture au conseil régional.

Une agriculture diversifiée et haut de gamme

En Provence-Alpes-Côte d'Azur pourtant, la crise est moins forte car l'agriculture y est « atypique » comme le décrit la chambre d'agriculture dans sa photographie de ce secteur.  « 78 % des exploitations ont une orientation exclusivement végétale (contre 42 % sur le plan national), 17 % une orientation exclusivement animale (35 % sur le plan national) et 5 % un profil mixte culture-élevage (23 % sur le plan national) », détaille la chambre consulaire. La viticulture y est très présente puisque plus d'une exploitation sur trois (40%) y est consacrée.

« Nous sommes moins frappés que certaines grandes régions laitières ou céréalières de moyen potentiel », reconnaît André Bernard qui pointe la « diversité » en Provence-Alpes-Côte d'Azur et une production plutôt haut de gamme. « Les deux tiers s'inscrivent dans la démarche qualité et nous avons 25% de bio », note-t-il. Une agriculture qui résiste mieux, mais qui n'est pas épargnée, à l'image du bio qui est en recul dans les achats dans un contexte de réduction du pouvoir d'achat. Dans son rapport publié en 2022, la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf) note que les chiffres de 2020 placent le Sud à la deuxième place des régions avec le plus important solde disponible - qui traduit la performance annuelle d'exploitation -, rapporté par équivalent temps plein et exploitation agricole.

Une production en baisse

Une situation qui n'est pas suffisante pour passer au travers d'une crise selon André Bernard, qui prévient que « toutes les filières sont touchées ». Il alerte notamment sur la viticulture, « le principal moteur économique », aujourd'hui à la peine. « J'ai trois caves, l'une en coopérative et les deux autres particulières, elles sont à la vente », illustre-t-il. Une tendance que confirme Bénédicte Martin qui se dit « très inquiète » pour la filière. « Il y a un phénomène structurel de dé-consommation qui touche déjà le Côte du Rhône et va s'étendre aux autres vins. La viticulture ne représente plus une garantie, d'ailleurs les exploitants cherche à se diversifier avec des oliviers, des pistaches ou des amandes »,  développe-t-elle.

Sur les fruits et légumes, les perspectives ne sont pas bonnes non plus. « Les pommes et les poires qui sont une grande filière ont des problèmes de capacité à produire, c'est aussi vrai pour la cerise qui est très importante chez nous et va dans le mur », constate Bénédicte Martin. Ce que confirme André Bernard qui parle d'un « décrochage significatif » de la production, bien que la filière de la pomme vient de connaître une bonne année. L'emblématique lavande est aussi concernée avec « un tiers des plants arrachés » selon le président de la chambre d'agriculture.

La cause avancée de toutes ces difficultés de production est l'impossibilité d'utiliser des « protections », comprendre des produits chimiques. « Nous sommes dans une compétition olympique, il faut courir avec des sabots et des ficelles au pied, forcément c'est plus dur », s'agace, avec le sens de la formule, André Bernard. Si ces interdictions d'utiliser certains produits doivent être compensées par des alternatives, ces dernières mettent « trop de temps » pour être prêtes par rapport à la réalité d'un agriculteur. Une autre manière de dire que les attentes de mesures de la part du gouvernement doivent être rapides... À mettre en oeuvre.

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Commentaires 2
à écrit le 25/01/2024 à 8:00
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Avec quelle eau ???

le 25/01/2024 à 8:23
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Ils feront comme les Shadocks, ils pomperont, tant qu'il y a à pomper. Faute d'eau au robinet les gens prendront leur douche une fois par semaine. Il faudrait anticiper les contraintes futures. Les eaux grises, ça nécessite des infrastructures.

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