Réchauffement climatique : ce que préconisent les scientifiques de la Méditerranée

Alors que la COP28 se poursuit à Dubaï, le Mediterranean Experts on Climate and environnemental Change (MedEC), qui réunit les scientifiques du bassin méditerranéen, appuie sur la nécessité de privilégier les solutions naturelles – telles l’agro-écologie ou la restauration des zones humides – et d’abandonner, vite, le recours aux énergies fossiles. De dire, en revanche, son interrogation face aux solutions de stockage de carbone.
(Crédits : DR)

Le réchauffement climatique et les solutions pour lutter contre son accélération sont actuellement le cœur des échanges qui se déroulent à Dubaï, hôte émirati de la COP28. Un rendez-vous très attendu parce que se tenant dix ans après la première COP et parce que beaucoup, surtout, est espéré des décisions et accords qui pourront en découler.

Si le GIEC est souvent la référence en matière scientifique, le MedEC, acronyme pour Mediterranean Experts on Climate and environnemental Change, fait lui aussi autorité sur le sujet. Un MedEC qui s'est créé en 2015, précisément pour porter un focus sur la Méditerranée, le GIEC n'ayant pas une approche spécifique sur le bassin, puisque son prisme privilégie les continents.

De 1,5° à 2°, le 0,5° qui fait la (grosse) différence

La Méditerranée est évidemment un centre névralgique pour les pays qui y sont rattachés. La vision et la réflexion communes sont nécessaires pour tenter d'harmoniser les décisions et orientations prises, ainsi que l'explique Joël Guiot, directeur de Recherche au Centre européen de recherches et d'enseignement en géosciences de l'environnement (CEREGE) au sein d'Aix-Marseille Université. Sur l'acceptabilité d'une transition climatique, « que ce soit en Méditerranée ou ailleurs, on ne prend pas suffisamment de décisions fortes », prioritairement, dit-il car un changement significatif entraînerait un changement des modèles économiques. « On essaie de proposer des solutions qui sauvent l'économie en espérant qu'elles sauvent aussi le climat ».

Joël Guiot de revenir sur ce 1,5° à ne pas dépasser et à ce 2° dont on s'approche, pourtant, inexorablement. « Les conséquences sont extrêmement différentes selon que les températures augmentent de 1,5° ou 2°. Notamment, on note la disparition de deux fois plus d'espèces. Et cela vaut également pour les glaciers ». Le scénario de températures augmentant de 2° pour ensuite redescendre à 1,5° d'augmentation ne change rien car ce qui aura disparu ne reviendra pas. « Le glacier antarctique ne reviendra pas, par exemple ».

Développer la recherche dans les pays du Sud

Les décisions obligeant au Zéro Artificialisation Nette, qui n'ont pas soulevé, de la part de certains acteurs, un enthousiasme débordant, sont-elles efficaces ? Oui, dit Joël Guiot, « le sol est l'une des réponses participant à la lutte contre le changement climatique ». Mais le directeur de Recherche au CEREGE ne dire aussi que tout ne se résume pas non plus au simple fait de planter des arbres. Car tout dépend de l'arbre planté. Cependant, empêcher l'artificialisation, régénérer les sols dégradés c'est permettre l'absorption du Co2. « Une agri-écologie bien faite utilise moins d'eau que l'agriculture traditionnelle ».

Quand on réfléchit à l'échelle méditerranéenne, tous les pays du bassin sont-ils égaux ? « Il faudrait aider les pays du Sud à développer leur propre recherche », note Joël Guiot, soulignant l'importance, par exemple, de travailler sur les oasis, ce qui concerne le Maroc, l'Algérie et le Sahara. D'appeler également à une plus forte collaboration entre les COP, ce qu'a porté, il y a peu, avec succès, Alain-Richard Donwahi, le président de la COP15, consacrée à la lutte contre la désertification.

Sur le principe de l'union fait la force, Joël Guiot rappelle comment les Îles du Pacifique se sont unies pour imposer le non dépassement d'une hausse des températures de 1,5°. « Les pays de la Méditerranée devraient s'en inspirer ».

Le MedEC qui plaide, par ailleurs, comme il l'a écrit dans son rapport déjà en 2020, pour un plan climat décliné à l'échelle locale. Mais à quel degré de proximité cela se comprend-t-il ? « A tous les niveaux, départemental, régional... ». Ce qui plaide notamment pour l'initiative de l'Etat de décentraliser la COP en COP régionales, dont le Sud est l'une des premières engagées, elle qui avait déjà, par la volonté de son président Renaud Muselier, décidé d'avoir une « COP d'avance ».

Privilégier les solutions basées sur la nature

Sur les causes du réchauffement, sur les solutions aussi, on sait déjà beaucoup. Concrètement, quelle mesure doit-être immédiate ? « L'abandon des énergies fossiles le plus vite possible ». Ce qui signifie, pour Joël Guiot et le MedEC, la fin de l'extraction pétrolière. « Il faut s'orienter vers des solutions basées sur la nature que sont l'agroécologie et la restauration des zones humides. En rendant ces zones à la nature, nous aurons des ceintures de protection », capables de protéger des aléas climatiques.

Le stockage du carbone, testé notamment par de grands groupes comme par des startups, est-il a envisagé comme solution d'avenir ? « Une énergie importante est nécessaire pour le comprimer, d'autant qu'il ne sera pas stocké là où il est capté. Et que toute fuite est possible ».

D'insister encore pour dire qu'un dépassement de températures qui atteindrait 3° ou 4° aurait notamment pour conséquence de rendre la zone intertropicale invivable. De prévenir, encore, sur ces méga-feux, rarissimes auparavant en Méditerranée et dans le Sud de la France, mais désormais plus si rares en Grèce, Sicile ou en Afrique du Nord. « Ce phénomène va s'amplifier chez nous. Le principal risque pour la forêt est celui-ci ». De noter, par ailleurs, ces incendies marines, dont on parle moins, mais qui pourtant, provoquent la disparition des plancton, coraux et gorgones. « La température élevée qui se cantonnait à la surface de la mer se retrouve désormais en profondeur ». Autant de signes qu'il faut passer de la prise de conscience à la prise de décisions. Vite et bien.

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Commentaire 1
à écrit le 08/12/2023 à 8:56
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On retrouve la pollution de la crème solaire à plus de 40 kilomètres des côtés les gars, alors oui faut faire quelque chose hein mais si vous voulez sauver votre mer il va falloir faire vraiment beaucoup plus.

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