Comment le Groupe Ippolito est devenu une ETI de la mobilité durable (mais pas seulement)

Le sujet de la mobilité c’est son cœur de métier depuis la fin dès année 60, lorsque l’entreprise naît à Villeneuve-Loubet, près de Nice. De l’automobile à la mobilité durable, il y a plusieurs pas que l’entreprise, dirigée aujourd’hui par la troisième génération, s’est empressée de faire, mue par la certitude qu’il fallait prévenir plutôt que guérir. Rester dans sa zone de confort n’est pas vraiment la philosophie de son dirigeant, Pierre Ippolito, pour qui l’ouverture d’esprit c’est savoir regarder ailleurs. Et regarder donc aussi, d’autres secteurs, comme le tourisme et l’hôtellerie. Tout en essayant, sur le sujet de la mobilité propre, de secouer le cocotier et d’encourager le collectif, nécessaire pour faire émerger le changement et des solutions, quitte à devenir aussi organisateur de salons professionnels.
(Crédits : DR)

Il fut un temps où elle était une jolie PME, évoluant de façon pérenne, dans un secteur majeur : l'automobile. Créée par Joseph Ippolito en 1968, elle a grandi au fil du temps, comme toute entreprise pérenne qui s'ancre dans son environnement économique. Une opération de croissance externe plus tard, qui voit les effectifs doubler, voilà la petite entreprise familiale se structurer en holding avec des filiales par implantation géographique, plutôt que par métiers. C'est l'arrivée de Pierre Ippolito, en 2014, qui va changer la donne, la vision et la structuration. « L'entreprise était le prototype de la belle PME qui se développe sereinement tout en gardant une vision de structuration identique », résume celui qui en est le directeur général et représentant de la troisième génération. « Nous étions davantage un agrégat de PME qu'une ETI ».

 D'agrégat à ETI

Structurer cela signifie déjà s'accorder sur un nom unique plutôt que de cumuler plusieurs appellations. Ce sera Azur Trucks. « Il fallait que les salariés aient une culture d'appartenance à un nom commun », souligne Pierre Ippolito. Une première étape, « la plus facile ». Car qui dit structuration globale dit outils de back office communs et autres mutualisations qui vont bien. Un chantier pour le coup plus complexe, mais indispensable.

« Il fallait une structuration juridique dans une vision métier et non plus géographique. Nous sommes passés d'un agrégat de 12 PME à ETI. Cela change forcément l'approche de tous les collaborateurs ». Un changement significatif - culturel et de fonctionnement - qui exige accompagnement et pédagogie. « Nous avons été transparents », dit Pierre Ippolito, « les salariés ont compris pourquoi nous passions de PME à entreprise de taille intermédiaire ».

Sortir de sa zone de confort

Pour grandir, il faut aussi sortir de sa zone de confort. Ouvrir le regard. « Le territoire des Alpes-Maritimes est riche mais pas suffisamment pour devenir une ETI », indique Pierre Ippolito. C'est en allant chercher dans le Var des relais de croissance que le groupe a ainsi changé d'échelle. La clé du succès étant, dit-il aussi, de savoir jouer le combo croissance organique et croissance externe.

Où on en vient au sujet du cruel déficit d'ETI en France. « Nos PME sont dans une zone de confort. En France, le marché est assez propice pour qu'elles se développent, suivant l'inflation. Ce n'est pas parce qu'on va voir ailleurs que l'on se déracine. Les chefs d'entreprises doivent avoir l'envie et la volonté, car le territoire a besoin de cela. Il est plus bénéfique pour le territoire d'avoir dix ETI plutôt que 30 PME ».

Car les ETI ont un pouvoir d'entrainement. Et Pierre Ippolito d'explique que les actions collectives portées par ces entreprises de taille intermédiaire sont souvent plus efficaces que celles portées par les politiques. « Si les politiques ont l'opportunité d'avoir des ETI qui accompagnent le territoire, cela fait du sens. Nous sommes peu nombreux, nous devons nous rassembler pour accompagner le territoire », estime celui qui est aussi le président de l'Upe06.

Lire aussi« Il faut que l'entreprise soit libre de ses prises de risques » (Pierre Ippolito, UPE06)

Diversification : la règle de ce « qui fait du sens »

Vecteur de croissance, la diversification est une autre brique qui porte les ETI. Et sur ce point, le Groupe Ippolito a appliqué ce qu'il recommande : sortir de sa zone de confort. Car c'est vers le tourisme et l'hôtellerie qu'il a tourné son regard. Là où ça pourrait paraître surprenant, Pierre Ippolito y voit des façons d'accompagner l'économie territoriale, des leçons à apprendre et un exercice qui apporte beaucoup. Reconnaissant que « la diversification fait peur, mais en montrant que cela fonctionne, ça va changer l'approche culturelle ». Le tout étant d'appliquer les fondamentaux : s'entourer des bonnes personnes et avoir une vision globale. « Toute diversification doit avoir du sens ». Un exercice qui, tant qu'il se pratique de façon à maîtriser l'ensemble de la chaîne de valeur, mais bien vue, notamment par la sphère bancaire. Mais s'aventurer sur un marché autre ne rassure pas. « La première raison de la diversification est souvent une vision défensive. La seconde, est d'écouter une fibre personnelle », analyse Pierre Ippolito. « Ma diversification est territoriale. Je ne veux pas aller au-delà des frontières de la région, mais je veux continuer à créer de la valeur, ce qui a du sens territorialement ».

C'est peut-être cela, la règle : « il faut partir d'une logique de bon sens. Un entrepreneur doit toujours être dans un objectif de croissance, de progrès, et la diversification se pose à un moment donné ». Et celui qui est aussi le patron des patrons dans les Alpes-Maritimes de faire une distinction précise entre « le chef d'entreprise, qui crée et gère et l'entrepreneur, qui crée, gère, recrée... se met dans un mouvement de création perpétuelle. L'entrepreneur est un éternel insatisfait ».

Haro sur le silo, accélérer sur le collectif

Si on en revient au cœur de métier, le spécialiste de l'automobile est aujourd'hui un expert de la mobilité durable. Et sur le sujet il y a à dire, à faire, à accompagner, à évangéliser... Un sujet où l'accélération en matière de remise en question des modèles économiques établis est fulgurante. « Il était indispensable de se poser la question du modèle économique. Dans trente ans, ce business model ne sera plus le même, cela pousse inévitablement à se poser la question de comment négocier le virage : pour moi-même et parce que je suis un leader, pour montrer l'exemple ». La transition, Pierre Ippolito l'embrasse totalement. « Aujourd'hui, je milite pour moins de camions en ville. Il ne faut pas aller contre ce qui avance. On ne sait pas ce que sera la mobilité demain. On sait que l'hydrogène ne sera pas une solution avant dix ans ». Mais on peut tester et aussi soutenir l'innovation, via un accompagnement capitalistique dans les startups, avec Transcan, spécialiste de la logistique, implanté à Carros, à quelques kilomètres, travailler sur la logistique du dernier kilomètre... « Il ne faut pas avoir de vision en silo, mais jouer collectif, que chacun qui dispose d'une brique contribue à un flux intelligent ». Où il est question de chaîne de valeur partagée. De vision aussi, car sur ce point « il n'est pas possible, tout seul, d'avoir une vision globale, même avec la plus large ouverture d'esprit possible ».

Ippolito

Benchmark offert au territoire

C'est l'une des raisons qui pousse le Groupe Ippolito a créer les 13 et 14 avril prochain, un salon dédié à la mobilité des professionnels, baptisé Mobili'Pro. Car entre pénurie des semi-conducteurs qui met à mal les rythmes de livraisons de nouveaux véhicules industriels, se pose celui de la durabilité des flottes intégrant les logiques d'économie circulaire, l'évolution des métiers aussi qui va avec, le mix énergétique, le recyclage... « Le benchmark et la réflexion que nous avons mené pour le Groupe, nous l'offrons au territoire ». Où là encore il est question de collectif qui joue effet d'entraînement. Avec l'idée que « le politique se mette dans la roue du collectif ». Pour tracer la route d'une mobilité durable... dans tous les sens du terme. Pour rappel, le Groupe Ippolito, qui intègre 28 métiers, emploie 940 personnes et a réalisé en 2022, un chiffre d'affaires de 244 millions d'euros.

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