Pourquoi de plus en plus d’entreprises se lancent dans le tourisme de savoir-faire

Épisode 2 - En Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, 180 entreprises organisent des visites, s’inscrivant dans ce que l’on appelle le tourisme industriel. Si celui-ci leur permet de générer des revenus supplémentaires grâce aux boutiques d’usine dans lesquelles s’achèvent souvent les visites, il constitue avant tout un moyen d’améliorer la notoriété d’une marque et de fidéliser les clients grâce à la mise en avant des savoir-faire et engagements des entreprises.
(Crédits : DR)

Depuis les années 2010, un nombre croissant d'entreprises ouvrent leurs portes au public. S'il s'agit parfois au départ de répondre à la demande croissante de clients de plus en plus curieux des modes de fabrication, la visite d'entreprise devient souvent capitale dans leur développement économique. Et ce pour plusieurs raisons.

D'abord parce que les visites, gratuites ou non, se traduisent bien souvent en ventes. D'autant que d'après Entreprise et découverte, 81 % des entreprises en région disposent d'une boutique d'usine. A la Verrerie de Biot, les ventes réalisées sur le site de l'atelier sont vitales. Elles représentent 75 % du chiffre d'affaires de l'entreprise. L'épidémie, qui l'a obligée à interrompre ses visites, a eu donc un impact très significatif. « On ne compte même pas », déplore Anne Lechaczynski.

Cette part est bien moindre pour la savonnerie Marius Fabre qui a plutôt opté pour une stratégie de diversification. « Les ventes en boutique représentent un peu moins de 10 % de notre chiffre d'affaires », assure Julie Bousquet-Fabre, codirigeante de l'entreprise. « Mais c'est rare que les gens ne repartent sans rien, d'autant que la visite est gratuite et que nos produits sont accessibles en termes de prix ».

« On estime que les achats consécutifs à une visite sont 2,5 fois supérieurs à ceux réalisés sans visite », souligne François De Canson, président du Comité régional de tourisme en PACA. Si la dépendance vis-à-vis des ventes en boutique d'usine n'est pas la même pour toutes les entreprises, toutes soulignent le rôle majeur que le tourisme industriel joue en terme d'image de marque.

Valoriser les salariés

Une image qui se construit d'abord auprès des salariés. « Pour eux, c'est valorisant de pouvoir montrer son travail, d'être impliqué dans ce type de démarche », observe Cécile Pierre, déléguée générale d'Entreprise et découverte. D'autant que la plupart des entreprises choisissent de s'appuyer sur leur personnel qu'elles forment plutôt que de recourir à des prestataires extérieurs. A La Confiserie du Roy René, deux personnes sont entièrement dédiées au tourisme. « Elles créent le contenu des visites, le font évoluer, travaillent sur la promotion avec les partenaires locaux », assure la directrice générale Laure Pierrisnard. Le personnel en boutique est par ailleurs formé pour assurer les visites en cas de forte affluence.

Chez Marius Fabre, cinq permanents à l'année se relaient entre les deux boutiques et les visites, et 13 saisonniers sont appelés en renfort l'été. Mais toute l'équipe de production est concernée puisque  la visite se veut la plus immersive possible. « On n'a pas voulu créer un couloir pour les visiteurs. On préfère qu'ils soient au cœur de la fabrication, qu'ils passent par la salle des chaudrons, qu'ils empruntent le parcours quotidien de nos opérateurs de production et qu'ils puissent discuter avec le maître-savonnier », explique Julie Bousquet-Fabre.

Donner des gages de qualité

« Derrière les visites d'entreprise, il y a un enjeu fort autour de la communication », confirme Cécile Pierre. « C'est notre meilleure carte de visite », complète Julie Bousquet-Fabre. « On montre nos savoir-faire, les gens comprennent pourquoi nos produits sont uniques. Ça les fidélise ».

A Salon-de-Provence, ces visites sont un vecteur d'exportation du calisson hors de la région et du pays. « Le calisson n'est pas encore si connu que ça dans les autres régions françaises, et encore moins à l'étranger ». L'export ne représente ainsi que 5 % du chiffre d'affaires de la confiserie. « Nous nous donnons pour mission de le faire connaître et notre Musée du calisson aide à cela. Avant la crise, on avait beaucoup de visiteurs étrangers qui rapportaient le produit chez eux et en devenaient les ambassadeurs ».

Ce travail sur l'image d'entreprise vaut aussi pour ceux qui ne vendent pas. « A Bollène, nous avons accompagné la Compagnie nationale du Rhône pour organiser des visites », assure Cécile Pierre. Sur le site d'Entreprise et découverte, il est promis au visiteur de « plonger au cœur des énergies renouvelables en visitant le site CNR de Bollène qui compte une centrale hydroélectrique, une écluse, un parc éolien et deux parcs photovoltaïques ! ». La directrice générale de l'association l'assure, « le CNR a besoin de se faire connaître, d'être associé à son territoire afin d'obtenir une prolongation de son marché ».

Mettre en avant ses engagements

Créer un sentiment d'ancrage. Et montrer patte blanche. C'est ce qui motive notamment l'ouverture au public de l'usine Altéo à Gardanne. Une manière de rassurer et de montrer les mesures prises suites aux accusations concernant les rejets de boues rouges en mer. Des visites qui s'organisent dans le cadre des Indus3days portés par l'Office du tourisme de Gardanne. « Pendant 15 jours, on propose des visites auprès de plusieurs dizaines de partenaires. Et Alteo fait partie de ceux qui attirent le plus car les gens ont beaucoup de questions à poser ».

Les visites sont une manière pour les entreprises de répondre aux exigences de toujours plus de transparence des consommateurs. Elles permettent aussi de valoriser les engagements pris par les entreprises en matière sociétale et environnementale. « Relocaliser une partie de sa production, s'approvisionner en circuit court, tout cela a un coût. C'est donc important pour les entreprises de valoriser leurs engagements de ce type. La visite d'entreprise sert beaucoup à cela », observe Cécile Pierre.

C'est le cas de la Confiserie du Roy René qui s'est engagée depuis 2015 dans la relocalisation de la production des amandes qu'elle utilise dans ses nougats et calissons. En 2020, elle inaugure un parcours dans ses jardins, avec 300 arbres de 20 variétés plantés autour de la fabrique. Une manière de partager sa démarche avec le public. Un public toujours plus enclin à soutenir les initiatives donnant la part belle au local et aux circuits courts.

Lire aussi 5 mnLa Confiserie du Roy René entretient les filières d'approvisionnement... et l'innovation

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