Investissement et actionnariat féminins, des game changers (trop) peu valorisés

Si les business angels font partie du paysage du financement, le business angelisme au féminin a encore quelques combats devant lui. Car malgré les discours, la réalité du terrain est tout autre. C’est tout le propos de Florence Richardson, la présidente du réseau national Femmes Business Angels, présente à Marseille pour un événement autour du sujet. Et qui redit à quel point il faut lever les freins, autant ceux mis par les investisseuses elles-mêmes que par ceux qu’on leur oppose.
(Crédits : DR)

Le discours est récurrent sans que fondamentalement le paysage ait changé. On manque de jeunes filles dans les filières scientifiques, la place et la confiance accordées à une femme dirigeante d'entreprise se heurte encore à une foule d'a priori... que dire alors d'une femme qui se positionne comme investisseur et actionnaire d'une entreprise en croissance ?

Dans le monde du business angelisme, les femmes sont des business angels comme les autres. En théorie. Mais dans la vraie vie, celle de l'économie réelle, ce n'est pas aussi simple, comme le souligne Florence Richardson. Tout comme faire confiance à une femme chef d'entreprise ce n'est toujours pas gagné, faire confiance à une investisseuse ne l'est pas davantage. La faute notamment à un contexte où « les écarts de salaires créent des écarts de patrimoine », souligne la présidente de Femmes Business Angels, quand les femmes elles-mêmes, bien que gérant parfaitement les finances du quotidien, ont une fâcheuse tendance à minimiser leur culture financière. Ou comment créer des freins, là où il n'y a pas lieu d'en avoir.

Meilleure appétence au risque

Les mêmes causes provoquant les mêmes effets, si le manque de mixité dans les entreprises génère des biais il en va de même dans l'absence de financement féminin, cette absence allant même jusqu'à contrarier précisément la mixité de la gouvernance des entreprises alors même que l'on sait que c'est dans la mixité que réside le meilleur succès. « Un actionnariat et une gouvernance mixtes constituent une valeur ajoutée certaine que l'on apporte à l'entreprise, ce sont des facteurs de performance », répète Florence Richardson, rappelant la complémentarité des analyses et des approches business entre investisseurs et investisseuses.

Des femmes prêtes à investir dans des startups ou toute entreprise qui se développe mais qui n'osent pas ? De moins en moins cependant si l'on tient compte de la nouvelle génération, beaucoup plus investie, plus appétente au risque aussi. « Au cours de ces dernières années, nous avons enregistré une augmentation des profils d'investisseuses », reconnaît Florence Richardson. « Les jeunes générations n'ont pas forcément une capacité d'investissement moins limitée mais elles ont une appétence à prendre des risques plus élevée ».

Lire aussi« Dans le financement des startups aussi, la mixité est la vraie bonne réponse » dit Femmes Business Angels Sud

 3.200 milliards de dollars : ce potentiel financier inexploité

Au-delà des discours et des ressentis issus du terrain, il y a un chiffre, particulièrement significatif. Celui des 3.200 milliards de dollars qui représente, à l'échelle mondiale, le potentiel de l'investissement généré par des femmes. « C'est un potentiel qui pourrait être injecté dans l'économie mondiale. C'est une force de frappe sous exploitée d'autant que les femmes ont un fort intérêt pour des projets à impact. C'est cela le game changer : créer un cercle vertueux », insiste encore Florence Richardson.

Comment alors provoquer le changement concret ? « Il faut démontrer qu'investir dans une entreprise, devenir business angels c'est accessible, qu'il n'est pas nécessaire de posséder de compétences particulièrement pointues, qu'il s'agit souvent de bon sens et qu'ensemble, les business angels savent parfaitement analyser les projets ».

Du besoin de rôle modèles... modernes et d'une fiscalité incitative

Ou on en revient aussi aux rôles modèles. Ces femmes qui ont une personnalité, un parcours inspirants, qui donnent envie... Sur ce point, c'est Dominique Mucchielli, la présidente de Femmes Business Angels dans le Sud, qui secoue le cocotier. « Il faut des exemples de femmes actuelles, des rôles modèles qui permettent de s'identifier. C'est plus Aurélie Jean que Marie Curie ». Ce sont aussi ces dirigeantes au long cours qui deviennent business angels à un moment de leur parcours professionnel, capables d'engendrer un effet d'entraînement. Mais il ne faudrait pas oublier le sujet fiscal. « Si nous voulons davantage de femmes qui investissent, il faut augmenter les avantages fiscaux liés à l'investissement ». Et de dire attendre beaucoup de la proposition de loi déposée le 8 mars par la députée Renaissance, Marie-Pierre Rixain - à qui l'on doit l'instauration des quotas dans les comités exécutifs - concernant une fiscalité plus équitable. « Il ne faut pas qu'une femme soit dans l'obligation de choisir entre la nounou ou l'investissement dans une entreprise », dit encore Florence Richardson. Evidemment, tout passe aussi par l'éducation. « La culture financière et économique est mauvaise. Il faut sensibiliser les jeunes femmes à l'autonomie financière au plus tôt. Notre vocation est d'éveiller à l'investissement ».

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