Trafic, décarbonation, international : quid de la stratégie de l’Aéroport Nice Côte d’Azur ?

Deuxième aéroport français après Paris, la plateforme aéroportuaire qui fait partie du groupe Aéroports de la Côte d’Azur a présenté un bilan 2022 meilleur qu’attendu. Entre un positionnement géographique qui est fait l’un des leviers principaux pour l’économie, pas seulement locale, l’intérêt conforté des compagnies aériennes notamment américaines comme Delta et le déploiement de son plan de décarbonation, Nice Côte d’Azur continue de dérouler sa feuille de route, son président du directoire insistant sur la notion de qualité du tourisme plutôt que quantité. Un paradigme qui, d’ailleurs, ne concerne pas uniquement le transport aérien.

Il y a eu la crise soit deux années de purgatoire pour l'économie, qui ont remis en cause des activités, des modèles, des habitudes. Dont le transport aérien. Qui en 2020 était objet de polémique notamment sur son plan carbone. Pour autant les professionnels, aéroports et compagnies s'étaient déjà emparés du sujet, contraints par la technologie qui ne répond pas assez vite aux préoccupations, lesquelles se sont, aussi sous l'effet de la crise, accélérées. Et si désormais on réfléchit davantage à l'intérêt de se déplacer, à la rationalisation de la chose, le plaisir de redécouvrir d'autres contrées ne s'est pas estompé ni le besoin pour les acteurs économiques de se déplacer.

Effet attractivité renforcé (et l'Amérique du Nord confirme)

Les résultats du trafic d'Aéroports de la Côte d'Azur, publiés fin 2022, en attestent : avec 84% de croissance par rapport à 2019 et 12, 12 millions de passagers enregistrés, Nice Côte d'Azur a donc rapidement retrouvé une activité qui n'a pas grand-chose à envier à l'avant-crise, d'autant que l'embargo sur les vols russes « retire » 3% à 4% au trafic total. « Le trafic s'est mieux comporté que ce que les perspectives laissaient présager fin 2021 », explique Franck Goldnadel. D'autant que le début 2022 s'était mollement comporté mais la réouverture du terminal 1 en mars a permis d'accompagner la forte reprise de l'activité estivale, notamment avec le retour de certaines lignes à l'international. Et on le sait, l'activité touristique s'est fort bien comportée durant l'été avec un taux d'occupation de 81%, 56% des professionnels estimant que celui-ci était meilleur que l'été 2020. Une dynamique qui concerne tout autant l'aviation d'affaires. Il faut dire que les manifestations de grande envergure comme le Festival du Film de Cannes ou le Grand Prix de Formule 1 de Monaco, ont joué à plein l'effet attraction. A l'automne, l'activité ne s'est pas moins bien comportée et ce, jusqu'à la trêve des confiseurs.

2022 a donc été une année exceptionnelle et Nice Côte d'Azur, une destination qui a suscité une appétence forte de la part des compagnies américaines. Un intérêt nord-américain qui n'est pas neutre. Si United, La Compagnie et Delta opèrent depuis la Côte d'Azur, l'annonce de cette dernière de l'ouverture de la ligne Nice-Atlanta à l'été 2023 conforte la confiance placée dans la plateforme azuréenne. D'autant que cette ligne « nous connecte au premier hub américain et nous ouvre l'ensemble des Etats-Unis », analyse Franck Goldnadel. Des Américains qui sont loin de bouder le Sud de la France, qui plus est, favorisés par la parité euro/dollar.

Où il est question des besoins du marché

Dans ce contexte quelle stratégie appliquer ? « Nous allons continuer de développer le réseau long-courrier. Nous continuons d'ouvrir des lignes en Europe, avec un objectif de qualité pas de quantité. Nous ne souhaitons pas le volume pour le volume mais contribuer à un tourisme qualitatif », indique le président du directoire. La Chine, qui a été une destination longue à travailler - Nice avait obtenu de longue haleine une ligne directe - n'a pas (encore) repris et cela ne figurera probablement pas sur la feuille de route 2023.

Une feuille de route qui se travaille en étroite écoute avec les offices de tourisme comme avec le CRT Côte d'Azur et le CRT Provence Alpes Côte d'Azur. Mais en étroite écoute aussi avec le monde économique. Lequel serait tenté par une ligne vers Miami. Mais, prévient Franck Goldnadel, « il faut que cette ligne soit rentable ». Or, précisément, Delta - avec sa ligne vers Atlanta - ouvre son hub qui « nous permet d'adresser le Nord comme le Sud des Etats-Unis ». Une ligne stratégique qui ouvre un potentiel non négligeable pour la plateforme aéroportuaire.

Un choix... solaire

Une plateforme qui fait figurer sur sa roadmap la poursuite de son plan de décarbonation. Pour rappel, Aéroports de la Côte d'Azur est le premier aéroport français à avoir été labelisé Airport Carbone Accreditation 4+, le plus haut degré de certification en matière environnementale. Et sur le sujet, le groupe affirme un objectif de neutralité carbone sans compensation à horizon 2030. Déjà mis en place, le raccordement du terminal 1 à la station d'épuration de la Métropole Nice Côte d'Azur permet de récupérer les énergies fatales des eaux usées de la collectivité. Soit un gain de 700 tonnes de CO2 annuels. L'engagement de réduire encore la consommation d'électricité suite aux recommandations gouvernementales se poursuit également, l'électricité ici étant intégralement d'origine renouvelable. En termes de collecte de déchets, un plan de sensibilisation envers les usagers de l'Aéroport (comprendre passagers mais aussi les partenaires), déjà initié, sera définitivement opérationnel d'ici le printemps 2023. Des panneaux solaires vont également être posés, comme à Cannes-Mandelieu. Il y a aussi ce projet de ferme solaire, qui concerne la plateforme du Golfe de Saint-Tropez et pour laquelle une phase de consultation est activée. D'une capacité de 6 Gwh, elle va générer plus que le besoin de l'aéroport, faisant de celui-ci un producteur d'énergie net.

Cycle LOT, guidage par satellite : l'innovation testée (et approuvée)

« Nous avons un levier d'action sur nos partenaires afin de réduire les consommations d'énergie », pointe Franck Goldnadel. Ce qui peut se traduire par de la forte incitation comme par de la collaboration active. Et innovante. Car le sujet du verdissement du transport aérien concerne tous les acteurs et le travailler ensemble est indispensable pour que le déploiement de solutions nouvelles soit le plus rapide et efficace possible. Outre ce que l'on peut classer dans des actions de bon sens, il y a également le côté plus technique. Il y avait déjà eu, par exemple, ce vol Air France Nice-Paris embarquant une partie de SAF. Le biocarburant qui est un des leviers majeurs de la décarbonation. Et qui a été au cœur d'une expérimentation menée à Nice Côte d'Azur, un Airbus A 380 ayant effectué en réel un cycle LTO (pour landing and take-off), équipé de biocarburant sur l'un de ses moteurs. Un essai dans les conditions qui sont celles du quotidien de l'aviation et qui a un intérêt essentiel quand on sait que c'est précisément le LTO qui est, de toutes les phases de vol, celle ayant le plus d'impact environnemental. Expérimentation rendue possible par la collaboration avec le Service de navigation aérienne. « Le cycle LTO est un enjeu pour toutes les compagnies. C'est un levier de décarbonation à court terme », souligne Franck Goldnadel. Une innovation qui en accompagne une autre, la descente continue par guidage satellite, prochainement mise en place, d'ici la fin de l'année. « Cette approche est une approche plus fine, elle permet notamment d'utiliser moins de carburant ». Ou comment faire de l'impact sur le territoire un impact neutre en carbone mais pas neutre en attractivité.

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