A Marseille, la ZAC de la Capelette face au défi de la ville de demain

Épisode 2 - Après 25 ans d’errements, l’aménagement de cette zone d’aménagement concertée de 75 hectares reprend corps. Elle doit faire face à plusieurs défis parmi lesquels le risque d’inondation qui oblige à penser une ville plus dense, mais aussi plus agréable et plus verte.
(Crédits : DR)

Habitants et salariés de la zone veulent y croire. La Capelette s'apprête à changer de visage. En témoignent les chantiers en cours, promettant une grande école pour 2023. Un tramway et un cinéma pour 2025.

De quoi répondre à l'urgence, tout en reconnectant davantage le quartier au centre-ville. Mais l'aménagement de la zone ne s'arrête pas à cela. Des études complémentaires sont en cours, en même temps qu'habitants et salariés sont invités à faire connaître leurs envies et besoins : quels équipements publics ? Quels types d'espaces verts ? Comment rendre le quartier plus agréable à vivre et plus attractif ?

A partir de la synthèse de ses réponses, les pouvoirs publics devront essayer de proposer un projet en phase avec ces attentes, tout en préservant l'activité économique locale, relativement riche.

Entreprises du bâtiment, de la logistique, des transports, Société des eaux de Marseille, blanchisserie industrielle, concessionnaires automobiles, torréfaction...  Le tissu entrepreneurial est important, avec des « entreprises plutôt vaillantes, qui souhaitent rester sur le territoire », observe Lionel Royer-Perreault, le maire de secteur. Plutôt une bonne chose en matière d'emploi.

« Marseille a beaucoup souffert d'une spécialisation de son territoire, avec les entreprises d'un côté, les logements de l'autre », constate Mathilde Chaboche, adjointe à la Ville en charge de l'urbanisme. « A l'inverse, je pense que cette activité économique doit s'intégrer au reste, se mélanger aux logements et aux équipements publics ».

Seul inconvénient : l'architecture de ses entreprises, pas nécessairement en phase avec la montée en qualité résidentielle voulue du quartier. « Il s'agit de bâtiments des années 1980, 1990, assez paupérisés. Il faudrait pousser les exigences en termes de bâti, et développer autour les équipements publics nécessaires à la dynamique du quartier, comme des parcs ou des équipements sportifs », pense le maire de secteur et président de la Soleam.

Lire aussi 7 mnZac de la Capelette à Marseille : deux décennies de désillusions

Le principe de la ville du quart d'heure

Ces équipements, particulièrement plébiscités tant par les habitants que par les salariés de la zone, contribueraient à s'inscrire dans le concept de « ville du quart d'heure », qu'appelle de ses vœux l'adjointe à l'urbanisme. Il s'agit en fait d'un modèle de ville idéale où les habitants pourraient pratiquer dans un rayon de quinze minutes, à pied ou en mobilités douces, toutes les activités essentielles qui constituent leur vie : travailler, emmener leurs enfants à l'école ou à la crèche, faire leurs courses, pratiquer du sport, se cultiver, se soigner, ou encore avoir des relations sociales.

Cet idéal exige du foncier. Les rez-de-chaussée d'immeubles offrent des possibilités. De même que les quelques friches de la zone. Mais il faudra aussi construire du logement, essentiel pour répondre à la demande (celle de familles mais aussi d'étudiants et de personnel hospitalier exerçant au sein de l'hôpital de la Timone, à 2 kilomètres), et pour assurer l'équilibre financier de l'aménagement -les logements générant des recettes considérables tandis que les équipements constituent des dépenses.

Attention néanmoins : pas question de reproduire les erreurs du passé et de construire à nouveau des immeubles de grande densité comme cela a été fait en 2017, avec trois îlots de 8 étages accueillant environ 500 logements chacun.  Ce qui constitue, de l'avis de Lionel Royer-Perreault, « une vision datée de l'urbanisme ».

Du côté de l'agence Attitudes urbaines - qui réalise l'état des lieux et les propositions de programme des aménagements et constructions -

 on promeut des immeubles de « trois ou quatre étages maximum », mieux intégrés au paysage, et plus haut-de-gamme pour faire « augmenter la valeur mobilière des logements du quartier ».

L'enjeu de la résilience face aux aléas climatiques

Des immeubles qui, comme les équipements publics, devront répondre à un défi : celui de l'adéquation avec le Plan de prévention des risques d'inondation. Ce qui implique de maintenir les capacités d'absorption du sol, et donc de ne plus construire sur certains terrains.

« Ce PPRI nous rappelle qu'il faut composer avec la présence de la nature. Une nature que la ville de Marseille a tendance à oublier, notamment car plusieurs cours d'eau sont enterrés et ne contribuent donc pas au paysage, à l'identité de la ville », observe Mathilde Chaboche. « Ce PPRI est une bonne chose car il nous évitera de mettre des personnes en danger. Mais c'est évidemment un défi qui oblige à libérer des espaces de la construction », et donc à penser une ville plus dense. Mais pour que cette densité soit acceptée, elle doit s'accompagner d'un bon maillage en matière d'équipements publics et d'espaces verts.

Pour faire face au défi du développement urbain en zone inondable, huit groupements ont imaginé un aménagement du quartier résilient vis-à-vis des aléas environnementaux dans le cadre d'un appel à manifestation d'intérêt du Ministère de la Transition écologique sur l'Aménagement des territoires en mutation exposés aux risques naturels (Amiter). Deux projets ont été retenus concernant l'aménagement de la ZAC de la Capelette, proposant par exemple diverses infrastructures à même d'absorber l'eau, ou encore une passerelle qui permettrait de traverser le quartier en toute sécurité en cas d'inondation. Ces propositions sont censées alimenter la réflexion de la Métropole.

De nouvelles opportunités économiques

Réinventer le quartier, c'est aussi offrir des perspectives à des commerçants susceptibles de s'installer. Mais aussi à de nouveaux acteurs économiques, à l'image de l'entreprise La Fraîche dont deux représentants étaient présents lors de la synthèse des travaux de concertation au centre social de la Capelette.

Constatant le manque d'offre en faveur d'une alimentation saine et durable dans le quartier, ils sont venus sonder l'intérêt des habitants vis-à-vis de leur offre de ferme urbaine en aquaponie, fusion de l'aquaculture et de l'hydroponie qui permet de faire vivre ensemble plantes et animaux aquatiques dans un système clos et hors-sol. Plutôt pratique dans un secteur où les terres sont très polluées du fait de leur histoire industrielle.

Leur projet emballe d'emblée l'assemblée qui envisage un potager partagé avoisinant la ferme aquaponique, où petits et grands pourraient cultiver quelques légumes, pour passer du temps ensemble et se reconnecter à la terre.

Seront-ils entendus dans leur volonté de reconnexion avec la nature et de lien social ? Ils devraient être fixés le 26 avril prochain, date à laquelle les élus, à partir des résultats des ateliers de concertation, présenteront une programmation finale. Donnant, peut-être enfin, un nouveau souffle à ce quartier.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.