Il y eut beaucoup d'emphase dans les discours le 16 octobre à l'occasion de l'inauguration du stade Vélodrome. À la fois âme de Marseille et symbole du renouveau de la cité portuaire, l'enceinte emblématique de l'OM devra être bien plus qu'une stade : être le centre de vie d'un nouveau quartier. En attendant, il a franchi ce dimanche 19 octobre son record d'affluence : 61 900 spectateurs.

Dans la nuit, il est désormais, avec la Bonne-Mère, un repaire scintillant dans la ville. Le grand coquillage blanc, surmonté d'une gigantesque nappe d'acier de 250 m diamètre suspendu à 65 m au dessus du sol au moyen de quatre points porteurs, a été inauguré la semaine dernière.

Pour l'occasion, pas de fête populaire - celle là est attendue avec les journées portes ouvertes des 25 et 26 octobre - mais une célébration VIP avec la présence remarquée, outre naturellement le maire de la Ville Jean-Claude Gaudin et les représentants des collectivités ayant participé au financement, de Patrick Kanner, le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports (photo), Thierry Braillard, le secrétaire d'État aux sports, Martin Kallen, le directeur général de l'UEFA et Martin Bouygues, PDG du groupe Bouygues. Et en l'absence tout autant remarquée du président de l'UEFA Michel Platini et de Vincent Labrune, le président de l'OM.

Semaine très sportive

En début de semaine, la Ville apprenait qu'elle était désignée Capitale européenne du Sport en 2017 (cf. Un label structurant pour une filière autour du sport ?). En fin de semaine, elle inaugurait, après plus de trois ans de travaux et moyennant une facture de 268 M€, ce qui sera finalement une des pièces maîtresses de cette candidature : un stade reconfiguré à 67 394 places (contre un peu moins de 60 000 auparavant) et couvert.

Par sa capacité, le temple phocéen du sport devient le deuxième stade de France, et par sa rénovation, il intègre la classe des six stades "Élite" français, lui permettant notamment d'accueillir des matches de l'Euro 2016. Jean-Claude Gaudin, le maire de Marseille, a insisté sur le caractère social qu'a toujours joué le stade Vélodrome dans la mesure où c'est le seul lieu susceptible de réunir plus de 60 000 personnes.

Depuis 1937, nombreuses extensions

C'est dans la perspective de la Coupe du monde de football 1938 qu'est imaginée la création d'un stade, projet confié en 1935 à l'architecte parisien Henri Ploquin, auteur de celui de Vichy. Le 28 avril 1935, la première pierre du Vélodrome est posée sur les ruines des anciennes usines automobiles Turcat-Méry. Le 13 juin 1937, il est inauguré avec 35 000 places. L'OM y établit ses quartiers cette même année.

L'emblême de Marseille connaîtra plusieurs extensions au cours du 20e siècle, la plus significative étant pour la Coupe du monde de football 1998, où elle passe à 60 000 places (montant de travaux de 391,9 millions de francs).

Rénovation majeure 

C'est en 2006 que la municipalité a engagé la réflexion sur la reconfiguration du Vélodrome et de ses abords, et en 2008 qu'il a été voté à l'unanimité par le conseil municipal. En 2009, le lancement de l'opération et le recours au contrat de partenariat public privé sont approuvés avec GFC Construction (filiale de Bouygues). Depuis que l'équation du montage financier est connue, la majorité municipale UMP et l'opposition socialiste ferraillent à ce propos.

Sur un coût de construction à 267,27 M€ (hors immobilier) 132,5 M€ viennent des contributions publiques (67 % par la Ville de Marseille et à 33 % par les partenaires publics : État : 28 M€, CG13 : 30 M€, MPM : 20 M€ et Région : 12 M€), 30 M€ des droits à bâtir fournis par le programme immobilier entourant le stade (centre commercial, 600 logements, bureaux, hôtel). Le solde est pris en charge par le privé.

PPP

Conçu en PPP, ce mode de financement astreint la Ville, qui a souhaité rester propriétaire des lieux en refusant la possibilité d'un bail emphytéotique, à payer pendant 31 ans une redevance annuelle brute de 23,5 M€ (dont il faut déduire 12,5 M€ de recettes garanties par l'exploitant et le loyer payé par l'OM) à Arema, une filiale de Bouygues (photo : Martin Bouygues), choisie pour exploiter le stade. Une facture que la collectivité cherche à alléger en ayant recours au naming (marque accolée au stade) garantissant 6 M€ de revenus et en revoyant le contrat de location de son occupant.

 La ville avait fixé la redevance à 7,4 M€ par an mais un bras de fer, qui a duré tout l'été, a finalement abouti à un accord mi août sur un loyer de 3 M€, assortis d'une part variable indexée sur les recettes du club.

Nouvel enjeu : polyvalence du stade

Pour rentabiliser son investissement, la Ville a assigné la mission à Arema de lisser l'exploitation de l'outil de façon à occuper les temps morts sportifs en louant l'espace pour l'accueil de matchs d'autres disciplines (à l'instar du top 14 de rugby par exemple) mais aussi les salons pour l'organisation de séminaires d'entreprises, colloques, spectacles ... Avant le record d'audience de ce jour - 61 900 personnes pour la rencontre entre Marseille et Toulouse -, la meilleure affluence avait été enregistrée, non pas pour le foot, mais pour un match de rugby à XV en 2007 (59 120 spectateurs). L'on a oublié également que le Vél' était jadis le théâtre de meetings politiques, comme le 11 avril 1981 pour le communiste Georges Marchais ou le 17 avril 1988 pour le fondateur du parti frontiste Jean-Marie Le Pen.

Le stade, pièce emblématique d'un projet urbain de désenclavement

 "Nouvelle cathédrale de Marseille", selon l'expression de Jean-Noël Guérini, président du CG13, le stade participe d'un grand projet de requalification et est "avec le MuCem, les deux signatures architecturales symboliques de la métamorphose de Marseille", s'est enflammé le président de Marseille Provence Métropole. La nouvelle cathédrale du sport sera le centre de vie et de convergence d'un nouveau quartier de 20 ha s'étendant le long des berges de l'Huveaune, bordés d'une longue promenade aménagée.

 
Le projet urbain prévoit la réalisation d'un programme immobilier de 750 logements (résidence intergénérationnelle avec étudiants et seniors), d'un centre commercial de 40 boutiques (qui a fait l'objet de nombreux recours de l'association "En toute franchise", mais dont les arguments viennent d'être rejetés par le rapporteur public du Conseil d'État, première étape avant la décision finale), de 1 200 m² de bureaux, de deux hôtels (de 2 et de 4 étoiles), d'une clinique du sport ("Monticelli-Vélodrome") et d'un parking RTM de 750 places.

A.D

Photos inauguration : ©Franck Pennant

Photo Nuit : © Claude Almodovar

Photo virtuelle : ©architecture urbanisme

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