Bilhi Genetics veut démocratiser la médecine prédictive

L’entreprise basée à Marseille développe des tests permettant de prédire l’apparition de fibroses du foie, à l’origine de cancers et de cirrhoses. Mais c’est un test de prédiction de la cicatrisation de la peau qu’elle s’apprête à mettre sur le marché.
(Crédits : DR)

Si Bilhi Genetics a été créée en 2011, son histoire date de plus de quarante ans. A cette époque, Alain Dessein, père du PDG de la start-up et généticien réputé, s'intéresse à la bilharziose, une maladie parasitaire qui touche 250 millions de personnes dans le monde, dont 90 % en Afrique subsaharienne. 20 % des malades développent des fibroses graves à cause du parasite - un ver en l'occurrence -, pouvant elles-mêmes être à l'origine de cirrhoses. Comparant le génome de sujets malades à ceux de sujets sains, Alain Dessein découvre alors que la génétique prédispose à ces fibroses et met la main sur les mutations impliquées, permettant d'en prévenir l'occurrence.

Des découvertes qui constituent les fondations de Bilhi Genetics. Au départ, "l'idée était de développer des tests génétiques pour prévenir la cirrhose chez les patients atteints d'hépatite C", explique Pierre Dessein, PDG de la TPE. "Puis nous nous sommes réorientés vers les cirrhoses liées à l'obésité et à l'alcoolisme". Car si ces deux facteurs sont à l'origine de la maladie, certaines personnes présentent, de par leur génétique, beaucoup plus de risques. "Il s'agirait de tester les personnes les plus à suivre et si celles-ci ont des prédispositions, nous pourrions alors proposer des solutions préventives : régime en cas d'obésité, sevrage pour l'alcoolisme". Alors qu'un quart de la population mondiale souffre d'un trop-plein de graisse dans le foie et est, par là même, susceptible de développer une cirrhose, le marché est immense.

Le marché de la chirurgie plastique pour commencer

Mais c'est sur un autre marché que Bilhi Genetics compte démarrer ses activités commerciales : celui de la chirurgie esthétique. "En septembre-octobre 2018, nous allons mettre sur le marché un test permettant de prédire la cicatrisation de la peau après une chirurgie plastique", annonce en effet Pierre Dessein. "C'est un test génétiquement moins complexe - nous sommes allés très vite - et cela nous permettra de pérenniser notre activité, hors levées de fonds. Il fallait rencontrer le marché rapidement". Une phase de test s'apprête à être lancée dans quatre cliniques en France et en Angleterre, ce qui devrait permettre à l'entreprise de dégager une centaine de milliers d'euros de chiffre d'affaire d'ici la fin de l'année. Selon le modèle économique choisi par l'entreprise, les clients sont les patients via une prescription médicale. Les analyses sont effectuées par des laboratoires  partenaires qui paieront la société au prorata du nombre de tests réalisés.

Pour la mise sur le marché de tests de prédiction des fibroses du foie - qui sont en fait une cicatrisation qui dégénère - à l'origine de cirrhoses, il faudra attendre encore fin 2019-2020, le temps d'achever les essais cliniques. Deux tests seront alors proposés, l'un en cas d'obésité, l'autre pour l'alcoolisme. Une commercialisation qui devrait permettre d'atteindre un chiffre d'affaire de 2 millions d'euros fin 2019, 10 millions en 2020. "Mais ces prévisions sont liées à notre capacité à lever des fonds qui nous permettraient d'accroître notre force de vente", précise Pierre Dessein. Il s'agirait de passer d'une équipe de 18 personnes à 40. Cinq millions d'euros ont été levés depuis la création de l'entreprise.

Rendre la médecine prédictive accessible à tous

Principaux marchés ciblés : l'Europe, mais aussi le Brésil et les Etats-Unis. éCes deux pays ont des taux d'obésité importants, et donc des problèmes de fibroses du foie. Par ailleurs, le marché de la chirurgie plastique y est très important. Il concerne 10 millions de personnes au niveau mondial, dont 4 millions aux Etats-Unis et 2 millions au Brésil". L'Afrique est également en ligne de mire, même si pour l'heure l'entreprise y est engagée à titre humanitaire seulement, proposant prédiction et traitement contre la bilharziose pour les personnes risquant de développer des fibroses. "Dès le départ, nous voulions avoir un fort impact social", explique le PDG, "il s'agissait de trouver un équilibre entre la création de valeur pour nos actionnaires et la recherche de solutions pour ceux qui en ont le plus besoin". Car rendre la médecine prédictive accessible à tous est au cœur des ambitions de Bilhi Genetics.

Une accessibilité qui passe d'une part par une politique de prix raisonnables. "Les tests existants vont de 200 à 4 000 euros. Nous aimerions nous situer quelque part au milieu, offrir une génétique moins chère sans pour autant avoir l'air de proposer un gadget". D'autre part, si aucun remboursement par la Sécurité sociale n'est envisageable au lancement des tests, l'objectif est de l'obtenir à terme. "Mais il faut parler aux payeurs de chaque pays". Un travail de longue haleine même si les arguments ne manquent pas : "la prévention permet une économie de coûts très importante. Par rapport à un test, la prise en charge d'une cirrhose coûte une fortune. Même sur un plan purement financier, mieux vaut prévenir que guérir".

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