Jennifer Court, le sens du partage (et inversement)

C’est au Japon que cette ex-tradeuse découvre le concept de cuisine partagée. Une évidence pour celle qui a préféré les fonds de sauce aux fonds d’investissement. Après un an de maturation, elle vient d’ouvrir sa première Kyoyu Kitchen à Cannes. Et se prépare déjà à dupliquer le concept à Marseille.
(Crédits : DR)

Elle se dit déterminée, acharnée même, quand il s'agit de travail. "C'est simple, je ne lâche jamais rien", sourit celle qui vient d'ouvrir à Cannes la cuisine partagée Kyoyu Kitchen. Elle, c'est Jennifer Court, 39 ans dont 17 passés à l'étranger. Tradeuse pour des fonds d'investissement, elle suit le parcours classique du financier aguerri. New York, Zürich, Genève, Singapour... jusqu'à ce que "l'envie d'autres choses" l'emporte sur les chiffres. Et c'est dans la cité-état insulaire que le déclic se produit. "Là-bas, la cuisine française marchait très fort. Je me suis lancée. En autodidacte". L'idée ? Adapter les tropéziennes, la pâtisserie et non la chaussure, au goût asiatique. Un concept intéressant... mais qui retombe comme un soufflé. "Il n'y avait pas de marché", regrette-t-elle. L'échec toutefois n'entame pas son enthousiasme. Ne dit-on d'ailleurs pas qu'il est le père du succès ? Convaincue d'avoir trouvé sa voie, la néophyte se plie aux règles de l'art et entreprend sa reconversion. D'abord auprès du chef pâtissier Julien Perrinet avant de s'aventurer dans un cursus de formation traditionnel.

Mauvais profil

Retour en France donc. Sur le papier, the place to be pour se parfaire derrière les fourneaux. Et pourtant. Le pays de la gastronomie boude sa candidature. L'ex-tradeuse est recalée de l'école hôtelière de Cannes et du lycée Paul Augier de Nice. "Mauvais profil", lui dit-on, comme si un bac+5 ne pouvait pas postuler à un CAP. C'est donc en Espagne, au sein de l'école Haufmann de Barcelone, qu'elle entame son apprentissage. Celui-ci passe par les tables des chefs Steve Moracchini (Juan les Pins), Gordon Ramsay (Paris) ou encore Ferran Adria Acosta (Ibiza)... et la conforte dans son choix. La cuisine oui, mais à sa manière, et les manettes en main. Dont acte.

Vive le chou

Direction le Japon. C'est en effet à Tokyo qu'elle tente de nouveau sa chance. Non pas avec les tropéziennes comme à Singapour mais avec les choux à la crème qu'elle décline à tous les parfums. Bonne pioche. En trois ans, elle ouvre deux pâtisseries françaises où le chou est roi. C'est le succès. Et puis, un jour de 2019, dans la ville chinoise de Wuhan, un virus inconnu apparaît. La suite, tout le monde la connaît. L'épidémie devient pandémie. Les pays se confinent. Or "question aides, le Japon n'est pas la France", relève-t-elle. Jennifer Court ferme ses boutiques et quitte le pays du Soleil levant, un petit pincement au cœur, mais un grand projet en tête. Celui de monter dans sa région natale le concept de cuisine partagée où elle réalisait sa production.

Jennifer Court

Jennifer Court, ex-tradeuse, qui a choisi de développé le concept de cuisine partagée

Kyoyu comme partage

Là encore, Jennifer Court ne fait rien au hasard. Elle s'inscrit au concours Act in Sales de Cannes, histoire de valider son idée. Et gagne. Elle toque également du côté de France Active qui la désigne projet de l'année. Incubée par Les Premières Sud, elle crée l'entreprise Karma Kitchen puis part à la recherche d'un local au cœur de la Cité des Festivals. "Une vraie difficulté", indique-t-elle. Mais là aussi, l'acharnement paie. Et c'est en ce début juillet, qu'elle ouvre enfin ses portes, sous l'appellation Kyoyu Kitchen. Kyoyu signifiant partage en japonais.

L'objectif : permettre aux entrepreneurs des métiers de la bouche en général, les traiteurs, professionnels de la vente à emporter et de l'événementiel en particulier, de se lancer plus facilement et plus rapidement en disposant des outils de production sans l'investissement afférent. Soit, une cuisine individuelle de 4 m linéaires dans un local partagé de 173 m² auxquels s'ajoutent 80 m² de stockage ainsi qu'un espace lié à l'événementiel. Un secteur que l'entrepreneuse entend naturellement adresser à travers une cuisine mobile qui rendrait visible les chefs durant les événements type MIPIM et consorts. Surtout, Jennifer Court caresse l'idée de franchiser à terme le concept. Et commence déjà à œuvrer en ce sens, avec l'ouverture espérée d'un deuxième site, bien plus grand (4000 m²), à Marseille.

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