C'est un organisme microscopique, appelé champignon mycorhizien, qui fait symbiose avec la plante et favorise son développement. A l'aide de l'intelligence artificielle (IA), qui prédit le champignon le mieux adapté à une zone, il est une alternative innovante aux fertilisants chimiques, capable de revitaliser les sols. Cette solution mise au point par la start-up Mycophyto a ainsi le potentiel de contribuer à la régénération de la biodiversité, à l'heure où celle-ci s'effondre à un rythme inégalé. D'autres pépites tricolores développent elles aussi des technologies de rupture susceptibles de devenir des armes efficaces tant dans la lutte climatique que dans celle contre l'érosion de la biodiversité.
Ainsi de la jeune pousse Prométhée qui, pour répondre aux problématiques liées au dérèglement climatique, prévoit de mettre en orbite la première constellation de petits satellites d'observation de la Terre en Europe, capable de rafraîchir les images toutes les 45minutes. De quoi permettre de « suivre en temps quasi-réel des situations très critiques », assure le président et fondateur Olivier Piepsz. En clair, d'observer, de détecter et de surveiller les catastrophes naturelles ainsi que la gestion des ressources naturelles, entre autres.
Passer à l'échelle
« La technologie est un élément exceptionnel et très important pour aller plus loin dans le respect de la biodiversité », avance pour sa part Rédouane Bellefqih, directeur général de Deloitte Consulting France. L'IA, notamment, va être clé « pour accélérer et permettre d'avoir des résultats mesurables » dans ce domaine qui pendant longtemps est resté un angle mort de la bataille environnementale.
Mais pour que ces différents outils innovants aient un impact, encore faudrait-il les industrialiser. « Nous avons besoin de produire plus », estime en effet Ludivine Alenda, porte-parole de Mycophyto. Or « il n'est pas facile de changer d'échelle, surtout pour les start-up de la deeptech qui ont vocation à opérer des ruptures dans les usages », pointe-t-elle. « Il existe pléthore d'outils avec des niveaux de maturité différents, du satellite au drone en passant par l'IA », analyse de son côté Rédouane Bellefqih. S'il se montre optimiste sur la capacité des start-up à innover, « le vrai enjeu, ce sont l'acculturation et le passage à l'échelle », martèle-t-il.
Modèles algorithmiques énergivores
Apporteuse de solutions, l'intelligence artificielle, en particulier, suscite néanmoins des craintes, voire des discours alarmistes, y compris de la part de ses propres concepteurs, comme le montre une récente lettre ouverte signée par des sociétés telles que GoogleDeepMind ou OpenAI, évoquant le risque d'extinction de l'humanité. Des discours qui, cependant, selon Aurélie Jean, docteure en sciences et spécialiste de la modélisation algorithmique, « nous écartent des vrais enjeux derrière l'IA ».
D'abord, celui des biais cognitifs. « On crée des modèles qui vont traiter les individus différemment, a fortiori injustement, en fonction de leur genre, la couleur de leur peau, la langue qu'ils parlent, leur origine sociale », du fait de l'absence de diversité parmi les personnes qui les conçoivent, rappelle la scientifique. Ensuite, l'enjeu social. Et de citer l'exemple de ces « sociétés qui font appel à de la main d'œuvre peu onéreuse dans les pays émergents pour nettoyer la data ». Enfin, l'IA n'est pas sans engendrer, à son tour, une empreinte environnementale. « Pour faire tourner les modèles, il faut des serveurs, des capteurs IoT... Ce hardware nécessite parfois des matières premières rares, dont l'extraction peut abîmer les sols naturels », note Aurélie Jean. Des pistes existent, à l'instar des nouveaux modes de transport de l'information par la lumière pour accélérer la communication et diminuer la consommation énergétique. En outre, il est possible de « développer des modèles qui optimisent la consommation », assure Aurélie Jean.
Le coût de la décision
Contre-exemple cependant, en 2021, GoogleBrain avait entraîné l'un des plus gros modèles algorithmiques de traduction - une opération financée à hauteur de plusieurs millions de dollars - pour apporter, in fine, un gain de précision de seulement 3 %... Lorsqu'on entraîne un modèle, « il faut se poser la question : à quoi cela sert, et, pour évaluer le coût de la décision : qu'est-ce que cela va apporter ? ».
Sans verser dans le « solutionisme scientifique ou technologique », l'auteure de « Data et sport, la révolution » assure que « la culture scientifique est fondamentale », tant pour comprendre la nature et la vie que pour trouver des solutions environnementales concrètes. Une voie qui passe par davantage d'investissement, dans la recherche publique comme dans la R&D privée, ainsi que par des ponts entre milieux industriels et académiques. Or sur ce point, la France a encore du chemin à faire...
Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !