« Le statut associatif des chambres de l’économie sociale et solidaire est une erreur » (Denis Philippe, CRESS Sud)

Si le contexte macro-économique fait qu’elle est davantage et mieux considérée – parce qu’elle s’inscrit dans la durabilité de l’économie, promeut circuits courts et approche circulaire – pour autant l’économie sociale et solidaire peine à obtenir un statut qui soit autre qu’associatif. Une incompréhension et une erreur tout à la fois pour le président de la chambre régionale de Provence Alpes Côte d’Azur. Qui redit le poids pesé régionalement, 13% de l’emploi notamment, et qu’ici aussi, c’est le business modèle et donc la pérennité des entreprises qui compte.
(Crédits : DR)

L'économie sociale et solidaire n'a jamais été autant regardé avec les yeux de Chimène. Durable, promouvant les circuits courts, la re-employabilité, le circulaire, l'ancrage territorial, l'ESS s'inscrit parfaitement dans les défis post-crise, sanitaire, mais pas que. Un momentum qui semble s'inscrire dans la durée. Une évolution dans les mentalités et les considérations qui valide une approche de l'économie longtemps pas tout à fait considérée sérieusement. Et si l'ESS semble parée de beaucoup de vertus, pour autant, le bât blesse toujours du côté du statut. Car, las, telle sœur Anne, les chambres de l'ESS (CRESS) ne voient toujours rien venir.

Devenir la première région de France

Des CRESS qui relèvent actuellement du statut associatif. Une hérésie pour le président de la CRESS PACA, Denis Philippe, qui le résume ainsi : « la mode est allée plus vite que législation ». Un Denis Philippe remonté, qui rappelle le poids pesé, à hauteur de 13% de l'emploi régional, avec 15.000 entreprises réparties sur le territoire - elles étaient 17.000 avant la crise sanitaire, le delta étant composée d'associations sans modèle économique, dépendantes des subventions, ce qui explique leur disparition. « Nous pourrions être la première région ESS de France », souligne Denis Philippe, qui en ferait presque un challenge. Car, pour l'heure, c'est la Bretagne...

Et si Denis Philippe insiste tant pour que le statut de l'ESS évolue c'est pour être raccord avec la réalité terrain. « Le statut des CRESS n'est pas logique. Dans l'ESS, comme ailleurs, c'est le modèle économique des entreprises qui compte ». Une façon de couper court aux bonnes vieilles idées préconçues qui verraient l'ESS comme une façon d'entreprendre qui ne serait pas sérieuse. « Nous devons également balayer devant notre porte », souligne cependant le président régional. Comprendre, savoir bousculer les lignes, sortir de sa zone de confort, le faire savoir... La CRESS Provenc Alpes Côte d'Azur qui a elle-même basé son business-modèle sur trois pieds, l'un sur les fonds publics dédiés au développement des entreprises, le second sur les adhésions directes, le troisième étant constitué des partenaires au soutien économique.

Alternative à l'économie dominante

Revoir la loi Hamon, qui date de 2014, est donc nécessaire. Indispensable pour inscrire différemment l'ESS dans le paysage économique, pour qu'elle ne soit pas moins considérée dit encore Denis Philippe. Qui attend beaucoup de Marlène Schiappa, la secrétaire d'Etat en charge de l'Economie sociale et solidaire, qui s'est dit disposée à faire passer « l'ESS de la marge à la page ».

Et où on revient à ce momentum. Idéal pour faire bouger les lignes. Alors même que les crises ont, dit Denis Philippe, « montrer les limites de certains modèles, que l'on a touché du doigt les excès de la mondialisation et que l'on revient à du bon sens, l'envie d'achats responsables, d'économie circulaire ». Mais, dit aussi le président de la CRESS PACA, il faut tordre le cou à une idée reçue : non l'ESS n'est pas contre le capitalisme. « Nous sommes A-capitaliste. L'ESS aussi doit être capable d'évoluer. Si nous ne le faisons pas, d'autres le feront pour nous. Nous devons faire changer l'approche de l'économie dominante ».

Le mouvement, côté entreprises, se mesure assez facilement. Il suffit de considérer toutes les volontés de devenir entreprises à impact, entreprise engagée, entreprise à mission... « Nous sentons bien les volontés d'aller vers un autre modèle et l'ESS ne doit pas passer à côté. De nouveaux modes d'organisations émergent et nous devons avoir la capacité à les accueillir, à leur ouvrir les bras et à ne pas rester sur nos prés carrés ». Un Denis Philippe qui exhorte à une remise en question salvatrice. « Nous manquons de vision aujourd'hui. Nous devons savoir ce que nous voulons, comment nous devons être organisés. La réalité de l'ESS ce sont les entreprises ».

Option financement

L'ESS qui n'est pas moins éloignée des problématiques de financement. La loi Hamon a  introduit les titre associatifs pour se faire. "Nous avons été la première chambre à y avoir recours", note Denis Philippe. "Cela nous permet de toucher les grandes entreprises désireuses d'investir dans l'économie sociale et solidaire". L'ESS qui collabore avec d'autres acteurs, de la Banque des Territoires à France Active. "L'avantage d'être mutualiste, c'est que nous parlons à tout le monde", plaisante presque Denis Philippe. Qui rappelle - et c'est l'actualité qui y fait écho - que c'est en Provence Alpes Côte d'Azur qu'est né l'initiative de consacrer un mois à l'ESS. Initiative désormais nationale. Et c'est aussi du Sud que pourrait partir un mouvement plus large, volontaire et déterminé à ce que le statut des CRESS évolue. Durablement.

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