"Les réseaux de connaissance ont permis à un demandeur d'emploi sur trois d ? accéder à un emploi"

La crise n?est pas encore le lointain souvenir d?une hibernation passagère. Loin s?en faut. La région absorbe le choc en différé. Rencontre avec Catherine d?Hervé, directrice régionale de Pôle Emploi.

Finalement, la capacité de résilience de la région à la crise s'effrite ?

L'on a cru, de par la structure de l'appareil productif régional, à une certaine capacité de résistance. En temps de crise, certains des particularismes de la région sont des atouts : la faiblesse du poids de l'industrie et la relative diversification de son tissu réduisent l'impact d'une crise touchant un secteur particulier. Bénéficiant du poids important de la sphère publique dans l'emploi régional (26%), elle est aussi moins sujette aux aléas soudains.
Mais la région a néanmoins absorbé le choc de la récession mais plus tardivement. Aujourd'hui, toutes les données sont en décalage avec le niveau national. Fin janvier 2011, en région, le nombre de demandeurs d'emploi inscrits à Pôle emploi de catégories A, B, C s'est établi à 344 004. Il a augmenté de 6,3 % sur un an alors qu'il est stable au niveau national. Evidemment, il y a des disparités selon les départements et les publics cibles.
Parmi l'ensemble des demandeurs d'emploi de catégories A, B, C, le nombre d'hommes augmente de 5,1% sur un an, celui des femmes de 7,6%, les moins de 25 ans de 1,2%, ceux de 25 à 49 ans de 5,1% et ceux de 50 ans et plus de 15,3%. Sur un an, les inscrits depuis un an ou plus augmentent de 18,5% et depuis plus de deux ans, de 25,4%.

Quels sont les motifs des dernières inscriptions ?

En janvier, les entrées (catégories A, B, C) avaient augmenté au cours des trois derniers mois de 6% : de 1% pour licenciements économiques, de 4,2% pour autres licenciements, de 4,3% pour fins de mission d'intérim, de 9,2% pour fins de CDD, de 3,6% pour démissions. Parallèlement, les sorties ont baissé de 0,2 % : de 11% pour arrêts de recherche, de 4,7% pour défaut d'actualisation tandis que celles pour reprises d'emploi déclarées (+0,1 %), entrées en stage et radiations administratives (+10,1 %) augmentent dans le même temps.
Il faut faire très attention à la lecture de ces données. L'augmentation des inscriptions peut être aussi un signe d'amélioration de la perception du marché. Des analyses ont montré qu'un climat plus propice à la croissance se traduisait par une augmentation du nombre de personnes qui s'inscrivaient. Derrière le motif d'inscription, il y a des comportements, des situations familiales, des histoires personnelles. C'est un matériau brut qu'il faut décrypter avec prudence.


Que deviennent ceux qui sortent de vos listes ?

Plus de la moitié des sorties enregistrées mensuellement sont sans motif identifié. Les dernières données dont nous disposons (étude de juin 2009 à Mars 2010) montrent que la reprise d'emploi est citée en premier lieu, pour 45,6% des demandeurs d'emploi interrogés. Pour 18%, il s'agit d'un défaut d'actualisation suivi d'une réinscription, 6% pour formation, 7% pour arrêt de recherche temporaire (maladie maternité, retraite).
Pour les deux tiers des personnes ayant repris un emploi, les contrats sont à parité égale des CDI et CDD. Les missions d'intérim et les contrats aidés représentent chacun environ une reprise d'emploi sur dix.
Un peu plus de la moitié des reprises d'emploi (50,7%) s'effectue au sein d'une entreprise du secteur privé dont 16 % chez un artisan, un commerçant, une profession libérale ou un exploitant agricole. Une reprise sur sept est un poste au sein de l'État, d'une collectivité territoriale, d'une entreprise publique ou nationale. Un employeur sur dix est une entreprise d'intérim, une association ou correspond à une création d'entreprise du demandeur d'emploi (environ 10% chacun). Les réseaux de connaissances (personnelles ou professionnelles) ont permis à un demandeur sur trois d'accéder à un emploi, devant les candidatures spontanées pour près d'un quart. Pôle emploi se situe en 3ème position des canaux de recrutement (17% des reprises d'emploi).


Quels sont les secteurs d'activité où il y a des tensions sur les emplois ?

278 373 offres d'emploi ont été déposées en 2010 (ndlr : Pole emploi représenterait entre 17 et 20% du marché de l'emploi), en hausse de 10% sur un an. Elles émanaient d'entreprises des services à la personne et à la collectivité, de l'hôtellerie-restauration, du commerce, de la construction.
Il s'agit souvent de propositions à durée déterminée, ce qui rend difficile le recrutement dans des délais satisfaisants car les demandes portent davantage sur des emplois durables et se pose également le problème du logement, même si des efforts sont faits localement  pour proposer des solutions. Ainsi, à Gap, des internats de lycée sont mis à disposition des saisonniers.
Les offres d'emploi durables (117 796 déposées en 2010, en hausse de 7% sur un an) proviennent notamment des sections " commerce et réparation d'automobiles et de motocycles" ainsi que des activités "de services administratifs et de soutien".
Les métiers de bouche, de la logistique et de la santé ont des difficultés de recrutement, bien souvent en raison d'un déficit d'image, des conditions de travail, ou de rémunération. Nous avons par ailleurs dans cette région des gisements d'emplois dans des niches, pas dans des proportions considérables mais à ne pas négliger, dans la plaisance et le nautisme, la sellerie....


Comment Pôle Emploi digère sa réforme ?
La première année fut très compliquée. Depuis la rentrée 2010, nous avons repris la main sur les grands fondamentaux avec pour objectifs d'assurer un saut qualitatif dans les services rendus aux actifs et aux entreprises. Envers les demandeurs d'emploi, il s'agit d'améliorer la qualité de l'accueil, d'optimiser l'accueil téléphonique du 3949 et d'accélérer le traitement des dossiers d'indemnisation (entre 6000 et 7000 dossiers jours).
Auprès des entreprises, nous voulons installer une relation commerciale différenciée, renforcer nos campagnes de prospection qui va se traduire par une augmentation des offres recueillies. L'objectif est d'atteindre 270 000 offres par an contre 253 000 en 2010.
Il s'agira aussi de mettre en œuvre l'évolution de notre offre de services. À partir d'avril, nous mettons en œuvre l'Entretien d'Inscription et de Diagnostic : l'ensemble des formalités (inscription, entretien avec le conseiller sur le projet professionnel, instruction du dossier d'indemnisation) se fera le même jour avec un agent unique. Pour l'accompagnement des chômeurs de longue durée (60 000 personnes inscrites dans la région), nous attendons des précisions sur la dotation budgétaire qui nous sera allouée pour mettre en œuvre des actions spécifiques.


Propos recueillis par Adeline Descamps


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