Made in France  : Unsibeaupas annonce sa liquidation... et cherche son repreneur

Installée à Salon-de-Provence, cette TPE s'était lancée en 2017 sur le marché de la chaussure, faisant le double pari d'une production française et de la vente à domicile. Un choix mis à mal par l'épidémie de covid-19. Tandis que l'actuelle crise de la consommation qui frappe le secteur de l'habillement ne l'a pas épargnée. Unsibeaupas vient d'annoncer sa liquidation. Mais ne désespère pas de trouver un repreneur qui pourra capitaliser sur ses atouts.
(Crédits : DR)

Unsibeaupas baisse le rideau. Vendredi 20 octobre, la TPE l'annonce sur fond noir sur son site internet : « Fin de l'histoire ». Et de préciser : « Unsibeaupas a été placé en liquidation judiciaire. C'est la fin d'une magnifique aventure de plus de 6 ans visant à défendre l'excellence de nos savoir-faire français ».

Née en 2017, Unsibeaupas - qui ne comptait plus que deux salariés au moment de sa liquidation - avait fait le pari de proposer des chaussures fabriquées en France, et en particulier à Romans-sur-Isère, capitale française de la chaussure dont l'histoire remonte au Moyen-Âge. Au XIXème siècle, cette filière drômoise se porte très bien, jusqu'à atteindre dans les années 1960 un pic de 200 entreprises et 5.000 salariés. Mais une décennie plus tard, la concurrence internationale et l'arrivée sur le marché de pays aux très faibles coûts de main d'œuvre provoque l'effondrement de la filière. De sorte qu'en 2019, Romans-sur-Isère ne compte plus que 600 salariés de la chaussure.

Une vente à domicile mise à mal par le covid-19

Il n'empêche, Unsibeaupas y croit. Le savoir-faire français en matière de chaussure n'a pas dit son dernier mot. Pour vendre ses produits - dont une partie est personnalisable -, la TPE mise sur la vente à domicile, un mode de distribution convivial, qui permet d'essayer les chaussures, même lorsqu'on habite loin des bassins de consommation.

Mais cette stratégie est rapidement mise à mal par l'épidémie de covid-19, puis par la crise de la consommation causée par l'épisode d'inflation qui s'ensuit. « En un peu plus de cinq ans, nous n'avons pas réussi à atteindre l'équilibre économique », explique Antoine Fauqueur, fondateur d'Unsibeaupas. « Notre chiffre d'affaires est équivalent à celui que nous avions réalisé l'année précédente mais il se structure très différemment. Nous n'avons pas réussi à relancer la vente à domicile depuis le covid-19. À la place, nous avons réorienté notre modèle vers plus de e-commerce, avec une spécialisation sur le mariage ».

Rendez-vous manqués

Un segment sur lequel l'activité croît de 60 %. De sorte qu'Unsibeaupas est parvenue à obtenir une part de 1% sur le marché des mariages, fournissant 2.500 mariées sur les 250.000 mariages réalisés chaque année. « Le marché de la chaussure se porte mal, mais celui du mariage est en stagnation voire en légère progression. Le mariage est un moment particulier de la vie. On veut acheter des produits qui ont du sens ». Or, pense Antoine Fauqueur, « les marques made in France qui s'en sortent sont celles qui trouveront des niches dans lesquelles s'exprimer ». Malheureusement, à cause du covid-19, l'entreprise n'a pu capitaliser que trop tard sur ce positionnement, qui lui a finalement seulement permis de compenser les pertes réalisées par ailleurs.

Au delà de ce positionnement de niche, Unsibeaupas avait une seconde idée qui lui aurait permis d'équilibrer son modèle : l'internalisation d'une partie de sa production, jusqu'alors entièrement confiée à des sous-traitants. « Nous voulions lever des fonds pour investir dans un atelier de découpe. Cela nous aurait permis d'accroître notre marge ». Malheureusement, elle n'est pas parvenue à trouver ces fonds. « Cela n'a pas été facile car notre marché n'est pas très porteur en ce moment. Mais aussi parce que nous nous trouvons dans une zone grise : nous sommes un peu trop gros pour être financés par des business angels, mais trop petits pour accéder aux fonds d'investissement. Pour les PME, il est difficile de passer le cap des 500.000 à 1 million d'euros ».

Responsabilités partagées

Un sujet dont Antoine Fauqueur aimerait voir les pouvoirs publics s'emparer. « Je ne fais pas partie de ceux qui demandent de baisser les charges sociales car je pense que nous avons un modèle social à défendre. Je pense en revanche qu'il faut aider les PME à trouver des relais pour se financer ».

Des efforts sont aussi nécessaires, selon lui, afin de mieux informer les consommateurs. « Beaucoup de gens prétendent faire du made in France alors que seulement 10 à 20% de leur produit est réellement fabriqué en France. Il nous faut une labellisation qui permette de mieux faire la part des choses ». Et de citer le label Origine France Garantie, encore peu reconnu.

Côté consommateurs, l'entrepreneur en appelle aussi à la responsabilité. « Ce qui marche aujourd'hui, c'est le très bas-de-gamme et, à l'inverse, le luxe. Les entreprises de milieu-de-gamme - où l'on retrouve beaucoup de PME du made in France - ont du mal à trouver leur place. Beaucoup de marques de ce type ont déjà mis la clé sous la porte. Face à cela, les choix de consommation sont capitaux. Ils ont un impact sur nos emplois. On ne peut peut-être pas toujours acheter du made in France pour des raisons de coûts, mais il faut être vigilant aux arbitrages que l'on fait ».

A la recherche d'un repreneur

Malgré ce contexte peu propice, Antoine Fauqueur ne désespère pas de trouver un repreneur à même d' « accélérer sur les secteurs où nous avions de bons résultats, sur le mariage et le digital. Il faudrait donc quelqu'un qui soit capable d'assurer le développement commercial digital, mais aussi de s'occuper de l'organisation de la production ». L'entrepreneur se dit par ailleurs disposé à accompagner cet éventuel le temps qu'il faudra, afin de lui faire bénéficier de l'expertise acquise au fil de ces presque six années. Et d'ajouter que le repreneur pourra s'appuyer sur une communauté de 12.000 clients engagés. De même que sur le savoir-faire des artisans avec qui l'entreprise travaillait, et pour qui cette liquidation a un impact significatif. «Nous faisions travailler quatre ateliers qui comptent au total une trentaine d'artisans. Unsibeaupas représentait 20% de leur chiffre d'affaires, soit environ six emplois».

Pour l'heure, trois candidats à la reprise se sont manifestés. « Nous aimerions en trouver un dès novembre pour être prêt début 2024 ». Histoire de profiter au mieux de la période de janvier à juin, au cours de laquelle Unsibeaupas avait pour habitude de réaliser deux tiers de son chiffre d'affaires.

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