Dans le Sud, la tension sur les métiers du numérique est plus forte qu’ailleurs

68% des recrutements numériques sont jugés difficiles par les entreprises en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Alors que les besoins dans ce domaine sont importants, les offres de formation peinent à suivre.
(Crédits : DR)

Numérisation ou digitalisation, chacun à sa préférence mais qu'importe, les deux mots sont sur toutes les lèvres des acteurs économiques. Pour les entreprises, réussir à incorporer et à maîtriser les outils informatiques pour améliorer ses process est une étape clef. Encore faut-il trouver les personnes à mettre aux manettes. C'est là que la machine s'enraille d'après les chiffres de la grande économie du numérique. L'observatoire de ce groupement public, baptisé GEN_SCAN a mis au point un indice de tension des métiers du numérique qui mesure « le rapport entre le besoin estimé à partir du nombre d'offres d'emplois publiées et la capacité de formation en nombre de cursus disponibles ». Avec 1,92, Provence-Alpes-Côte d'Azur décroche le plus mauvais score. Un indice largement supérieur aux deux autres plus mauvais élèves, l'Île-de-France et le Pays de la Loire, dont l'indice est respectivement de 1,1  et 1,05.

A l'intérieur même de la région, il existe de nombreux écarts dans le département. L'indice dépasse les 2 dans les Bouches-du-Rhône alors qu'il ne présente qu'un petit 0,62 pour les Hautes-Alpes. Les Alpes-Maritimes sont le deuxième territoire le plus tendu (1,91) devant le Var (1,7) puis les Alpes-de-Haute-Provence (1,41) et enfin le Vaucluse (1,37). On remarque que les principales tensions se situent dans les deux départements où se trouvent les principaux bassins de vie et d'emploi.

La tension autour des métiers du numérique n'est pas propre à Provence-Alpes-Côte d'Azur, mais le fait qu'elle présente la situation la plus critique peut paraître paradoxale. La région est en effet « le siège de nombreuses initiatives gouvernementales et privées pour encourager la croissance de l'économie numérique, telles que des incubateurs de startups, des centres de recherche et des programmes de financement » comme le rappelle GEN_SCAN qui évoque également « ses clusters technologiques, tels que Sophia Antipolis, qui abrite de nombreuses entreprises de haute technologie et de recherche ».

Un manque de cursus

Quand on regarde dans le détail de l'indice de tension, le constat est clair : c'est du côté de la formation que le Sud est à la traîne. Il arrive en effet en toute fin du classement du nombre de cursus proposés (hors Corse et Outre-mer). En revanche, au classement des offres d'emplois, Provence Alpes Côte d'Azur se situe en cinquième position sur douze. Pas étonnant donc que 68% des entreprises jugent difficiles les recrutements numériques dans la région, ainsi que le souligne une étude Pole Emploi de 2022. Seule la Nouvelle-Aquitaine et le Pays de la Loire ont un taux supérieur (Auvergne-Rhône-Alpes et Centre-Val de Loire étant également à 68%).

« Les acteurs du numérique ont du mal à embaucher », confirme Mathieu Nebra, cofondateur de la plateforme de cours en ligne Openclassroom, qui pointe la difficile mise à l'échelle des offres de formation : « les organismes n'ont pas toujours assez de place ». Une limite physique que le groupe ne connaît pas et sur lequel il compte s'appuyer pour se développer... Notamment dans la région. Car le nombre d'apprenants en Provence-Alpes-Côte d'Azur chez Openclassroom n'est que le cinquième en France. « L'une des raisons que nous identifions est l'accès aux financements qui doit être facilité », estime Mathieu Nebra. Il pointe également les choix politiques de favoriser selon les territoires des lieux physiques plutôt que des parcours en ligne.

"Tous les métiers sont du numérique"

La difficulté pour la formation est de pouvoir faire monter en compétences une personne sur une période courte car les besoins évoluent constamment. « Un cursus de cinq ou dix ans n'a pas de sens, on ne connaît pas les attentes sur les métiers à cet horizon là, juge Mathieu Nebra. Un community manager n'avait pas besoin de connaître Tik Tok il y a peu car ça n'existait tout simplement pas alors qu'aujourd'hui c'est l'un des principaux réseaux sociaux ». Le boom de l'IA symbolise cette mutation perpétuelle et la nécessité de former en continu. Actuellement les recrutements directement liés à l'intelligence artificielle sont assez faibles, en revanche son utilisation dans d'autres métiers demande d'apprendre à maîtriser cet outil.

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Les métiers les plus en tension sont dans le domaine du pilotage de projet ou du e-marketing. Des besoins qui ne sont pas « spécifique à Provence-Alpes-Côte d'Azur » mais plus forts pointe Mathieu Nebra. Au 1er septembre, ce sont plus de 4.000 offres d'emplois qui sont recensés sur la Grande Ecole du Numérique. « Les besoins sont gigantesques », estime le dirigeant. « Tous les métiers sont du numérique dans les outils qu'ils peuvent utiliser, personne n'est à l'abri de devoir faire évoluer ses compétences », enchaîne-t-il. La numérisation démarre à peine et n'est pas prête de s'arrêter...

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