De l'impact environnemental au management interne, les entreprises s'adaptent à la RSE

Attente de la société ou contraintes réglementaires, la RSE est devenue un sujet transversal pour les entreprises. Une politique qui mêle la baisse des émissions polluantes des activités, la sensibilisation et le management, mais qui se heurte parfois à la hausse des coûts que cela induit.
(Crédits : DR)

RSE, ESG ou plus récemment CSRD... Bien des noms ont été donnés au sujet des engagements des entreprises à être responsable. Ces sigles ont bien des différences, certains répondent à des exigences internes et d'autres externes, mais au sein des sociétés, on considère que « c'est la même chose ». Forcément, cette approche plutôt nouvelle dans les faits nécessite des changements dans l'organisation et la manière de mener son activité.

Au sein de la Société des Eaux de Marseille Métropole (SEMM), la directrice générale Sandrine Motte confirme que l'entreprise porte « une grande responsabilité écologique en traitant bien les effluents qui sont rejetés en milieu naturel, mais aussi d'un point de vue social, car l'eau doit être accessible à tous ». Aux côtés d'autres dirigeants, réunis dans le cadre d'une table-ronde organisée par BNP Paribas et KPMG à Marseille, elle évoque néanmoins les difficultés d'aller plus loin sur les sujets de RSE. « Le plus dur, c'est d'embarquer les parties prenantes dont les pouvoirs publics. Il faut du courage, les transformations ne se font que si l'on a des exemples concrets », glisse-t-elle.

Le rôle des parties prenantes

Pour Olivier Storch, directeur général du logicien Ceva Logistics (filiale de CMA CGM, propriétaire de La Tribune), l'enfer, c'est aussi les autres. « On peut promouvoir une logistique verte, mais les clients regardent les prix et le temps de transit. Lorsque nous proposons une solution avec moins d'émission de CO2, elle est souvent plus chère et plus lente, 15% des clients sont prêts à payer », explique-t-il. Une situation qui provoque ensuite un blocage sur le reste de l'échelle selon le dirigeant, puisque les 85% restants regardent leurs propres clients qui ne veulent pas subir une hausse des tarifs.

A l'heure de l'inflation et du manque de pouvoir d'achat, tout est bon pour ne pas augmenter ses prix sur le consommateur final. « D'après les calculs, qui ne sont pas propres à Ceva Logistics, en renchérissant de 40 centimes le prix d'une télévision ou de 70 centimes celui d'un smartphone, nous pourrions utiliser des bateaux moins émetteurs de CO2 », avance Olivier Storch. Une situation qui traduit également le manque de sensibilisation du coût de la transition énergétique. « Un camion coûte 100 000 euros, un camion électrique 350 000 euros », illustre le dirigeant.

La production à grande échelle permettra peut-être à l'avenir d'écraser ce surplus, mais cette étape paraît encore loin aujourd'hui. L'approche du prix peut aussi amener à réfléchir à un changement de modèle plus large comme l'esquisse Sandrine Motte, alors que l'eau est depuis peu considérée comme une ressource précieuse : « Ma vision, c'est de réfléchir différemment au business model de mon entreprise, aujourd'hui en France tout le système est fait pour que plus les gens consomment plus nous facturons et gagnons notre vie ». Difficile cela étant à l'échelle du dirigeant de changer complètement un modèle.

Chez Jifmar, entreprise aixoise d'ingénierie et de support opérationnel en mer, c'est un donneur d'ordre qui a donné le ton. La société provençale est notamment derrière le navire hybride, combinant diesel et voiles, Canopée qui apporte les éléments d'Ariane 6 vers Kourou, en Guyane. Utiliser un tel système était une volonté d'ArianeGroup pour réduire ses émissions alors que le lancement d'une fusée rejette entre 200 et 400 tonnes de CO2 dans l'atmosphère.

Des règles internes à appliquer

Dans ces situations, le sujet environnemental concerne l'activité en elle-même, mais ce n'est pas toujours le cas pour d'autres entreprises, à l'image du groupe courtier Candide. « Nous avons peu de poids sur les parties prenantes », reconnaît sa directrice générale, Marie Andrieu. « Nous avons pris le parti de former », enchaîne-t-elle. La dirigeante évoque des participations à des fresques, des conférences, mais aussi des dispositifs comme la Convention des Entreprises pour le Climat ou l'expérience The Week qu'elle « recommande ». Chez Candide, cela représente « 350 collaborateurs formés », avance la directrice générale qui partage sa « fierté du temps pris par la managers pour laisser les gens se former ».

Insuffler cette dynamique pour aligner toutes les strates de l'entreprise est essentiel. Chez Jifmar, cela est passé notamment par une réorganisation interne. Avec une responsable RSE qui est aussi chargée de la communication « pour expliquer » ce qui est fait, expose Jean-Michel Berud, fondateur et président de cette société qu'il décrit comme « très en pointe en termes d'ESG » avec « cinq rapports » déjà réalisés.

L'un des enjeux est aussi de « rendre les collaborateurs plus heureux au bureau et ce n'est pas forcément simple », notamment depuis le Covid. « Nous sommes revenus sur le télétravail avec 10 jours par an. Aujourd'hui, les managers ne managent pas suffisamment bien, ce n'est pas seulement un titre manager, c'est s'occuper de son équipe et définir une production qui est dans un objectif d'ESG comme trouver des solutions pour améliorer la vie de tous à bord d'un bateau et au bureau », détaille Jean-Michel Berud.

Car si la RSE est souvent associée à l'environnement, la gouvernance et le volet sociétal sont tout aussi importants. Un « S » important chez Ceva Logistics qui emploie près de 120 000 personnes dans le monde. « Nous essayons de promouvoir une approche homogène de respect de la réglementation du travail et d'éthique, ce n'est pas simple car dans certains pays ce n'est pas la culture de dénoncer des conflits d'intérêts ou de parler de harcèlement », explique Olivier Storch qu décrit « un argument essentiel pour nos clients ». Des donneurs d'ordres qui veulent se conformer aux attentes de la société pour garantir leur pérennité.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.