Spécialiste de la valorisation des coproduits agro-alimentaires, comment Hubcycle sert l'industrie

Installée à Avignon, cette entreprise valorise des coproduits végétaux qu'elle transforme en ingrédients compétitifs pour l'industrie, agroalimentaire surtout. Après une année 2023 qui lui a permis de quintupler son chiffre d'affaires - dont 30 % réalisé à l'international -, elle prépare une nouvelle levée de fonds qui doit l'aider à changer d'échelle, et saisir pleinement le potentiel de son marché.
(Crédits : DR)

Hubcycle trace sa route. « On avance bien », assure son fondateur Julien Desage. Preuve en est : un chiffre d'affaires multiplié par cinq entre 2022 et 2023, atteignant le cap des deux millions d'euros. « Nous avons réussi le passage à échelle industrielle d'un modèle qui n'existait pas ».

Un modèle qui vise à valoriser une grande diversité de coproduits d'origine alimentaire, pour un large nombre d'applications. Ce, grâce à une approche très transversale.

Tout commence en 2015, alors que Julien Desage poursuit un master de chimie en ingénierie des cosmétiques et qu'il effectue un stage au sein d'une parfumerie grassoise. « Quand on fabrique un parfum, on n'utilise qu'une petite partie des molécules d'un produit. Je me suis dit que dans ce qu'il en reste - les déchets - il y a peut-être des éléments qui pourraient intéresser d'autres industriels ».

Pour une tonne de produits vendue, 2,8 tonnes de CO2 évitées

Hubcycle est ainsi en contact avec des fournisseurs de coproduits (épluchures d'orange, résidus de la fabrication d'un jus de fruit...), autant qu'avec des clients intéressés par les ingrédients issus de la valorisation de ces coproduits. « Nous travaillons sur 950 gisements de coproduits, ce qui correspond à environ 300 fournisseurs, généralement des PME qui réalisent 5 à 500 millions d'euros de chiffre d'affaires ». Quant aux clients, Hubcycle en recense une soixantaine. Des fournisseurs et clients qui sont surtout issus de l'univers agroalimentaire. « Nous nous sommes focalisés sur cette industrie qui est plus compatible à nos attentes en matière de volumes que la cosmétique par exemple ».

Un marché très normé, dans lequel Hubcycle tente de rassurer ses parties prenantes, à la fois par sa présence humaine, mais aussi grâce à un travail appuyé sur les enjeux de qualité. « Le fournisseur et le client ne sont pas forcément soumis aux mêmes normes. Nous avons développé des processus très précis pour développer des produits de qualité qui soient adaptés aux normes de chacun ». Sans que les contraintes soient trop importantes, à un prix compétitif, sans quoi les clients se détourneraient probablement de ces solutions à l'impact écologique pourtant bien moindre.

« Nous avons réussi à chiffrer les émissions de CO2 évitées. Nous économisons en moyenne 2,8 tonnes de CO2 par tonne de produit vendu ». Des économies liées au moindre recours à l'agriculture puisque l'utilisation de coproduits réduit les besoins extractifs. Et cette moyenne cache de grandes disparités en fonction des produits concernés. « Sur des carottes bio de saison cultivées dans le Nord de la France, l'impact sera moindre. Sur du cacao cultivé dans des zones déforestées, il est bien plus important ».

Semences, vanille, résidus de jus concentrés...

Parmi les solutions de valorisation développées par l'entreprise, une technologie consistant à valoriser « toutes les semences qui n'ont pas germé ». Pour les semenciers, c'est l'occasion de mieux valoriser ces dernières. Et à l'autre bout de la chaîne, Hubcycle propose à des clients de l'agroalimentaire des poudres utilisables dans des recettes. « Et ce qui est génial, c'est que la qualité de la matière produite est meilleure et moins chère que ses équivalents », se félicite l'entrepreneur. Autre exemple : les résidus issus de la concentration de jus, « cela peut permettre d'obtenir des matières plus compétitives sur des marchés en rupture, comme c'est le cas des cranberries ». Il cite enfin un travail sur la vanille, produit à forte valeur ajoutée, plus encore ces dernières années. « On récupère les grains suite à l'extraction des arômes, on les purifie et ils peuvent être utilisés dans l'industrie de la glace ».

Des innovations nées d'une recherche et développement quasiment exclusivement réalisée en interne, au sein de l'Agroparc d'Avignon. « La vélocité attendue de la part des startups n'est pas vraiment compatible avec le recours à des prestataires externes ».

Une vélocité que l'entreprise veut encore amplifier, tant le marché est immense. « 2 millions d'euros de chiffre d'affaires, c'est une goutte d'eau dans l'agroalimentaire ». Pour cela, une nouvelle levée de fonds - après une précédente de 5 millions d'euros en 2022 - est prévue. « Elle doit nous permettre de recruter massivement ». À savoir, 45 personnes supplémentaires, pour atteindre 60 à 70 salariés d'ici fin 2024. « Il faut que nous fassions grossir notre équipe commerciale. On est aussi à l'écoute du marché pour racheter d'autres entreprises qui font de l'upcycling ou qui ont tous les atouts pour en faire ».

30 % à l'export

Et les perspectives de développement de l'entreprise ne se limitent pas à la France, Hubcycle réalisant d'ores et déjà 30 % de son chiffre d'affaires à l'international. « La prochaine étape sera de disposer de bureaux à l'étranger, en Amérique et en Asie ». En Amérique car « le marché est dix fois plus gros qu'en Europe. Avec autant de travail, on peut décupler nos volumes et faire des économies d'échelle significatives ». En Asie, l'enjeu est « de sourcer des coproduits qu'on ne trouve pas ici. Notamment des épices, plus complexes à travailler ».

Pour poursuivre son essor, l'entreprise souhaite aussi collaborer avec l'État français afin de valoriser les solutions de valorisation de coproduits. « Ce que nous faisons est assez nouveau, il n'y a donc pas encore de lois ou même de recommandations qui inciteraient à préférer des matières premières faiblement carbonées comme les nôtres. Nous allons mener un travail collaboratif avec l'État pour voir ce qui est faisable, et de quelle manière on pourrait motiver les entreprises à recourir à ces options moins carbonées qu'elles ne favorisent pas toujours ».

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