« J’ai la volonté de faire » (Benoît Payan, maire de Marseille)

Élu depuis trois ans à la tête de la deuxième ville de France, Benoît Payan évoque le bilan de mi-mandat, donne sa vision de ce que doit être l’attractivité, assure avoir de bonnes relations avec le monde économique et aborde la difficulté tout autant que la nécessité d’investir. Estimant par ailleurs qu’il faut laisser du temps pour que le Plan Marseille en Grand prenne toute sa dimension et que Marseille doit être avant tout « considérée ».
(Crédits : DR)

LA TRIBUNE - Les résultats du sondage Ifop/Public Sénat pour La Tribune, publiés hier, montrent une bonne appréciation de l'action municipale que vous menez...

BENOÎT PAYAN - Je n'ai pas par habitude de commenter les sondages. Mais ce sondage reflète une majorité au travail, a contrario de certains qui tentent de dénigrer l'image de la ville. Les Marseillais comprennent apparemment mieux le travail qui est fait que certains de ceux qui veulent les représenter.

Ce sondage souligne la façon dont les Marseillais perçoivent le maire de Marseille. Ils vous estiment compétent, portant une vision...

Je travaille 100 heures par semaine, j'ai une volonté de faire, j'y mets toute ma passionCette ville s'est imposée à moi. C'est mon intérêt de la faire changer.

Quand on est adolescent et que l'on essaie de comprendre le monde et que l'on comprend justement que l'on peut contribuer à le faire changer, on n'hésite pas. Marseille a été abîmée, y compris par ma famille politique. Donner pour les autres, cela relève du sacerdoce.

Vous arrivez à mi-mandat. La feuille de route que vous vous êtes fixé lorsque vous avez été élu est-elle respectée ? Quel bilan tirez-vous ? Et quelle vision avez-vous pour les trois ans à venir ?

Il reste encore beaucoup à faire. Ma vision ne s'arrête pas à trois ans, elle se pense sur des décennies. On a besoin d'inventer un futur à Marseille. Je la ferai grandir. Cette ville est magique. Et elle est de plus en plus aimée. La qualité de vie est essentielle. Nous sommes en train de mener le plus grand plan de rénovation des écoles. D'ici la fin du mandat, nous aurons avancé. Marseille est une ville où on fabrique de la culture, des solidarités. Cette ville a été coupée en deux. Il y a une fracture béante. Il faut la réparer et j'y arriverai. Cela signifie mettre les moyens et j'ai, face à moi, beaucoup de challenges. En revanche, il faut repenser le fonctionnement des institutions. Il y a trop de millefeuille et c'est à l'Etat de réfléchir à la meilleure façon de réformer les institutions locales. L'organisation territoriale, c'est n'importe quoi. Plus rien n'a été fait depuis la loi de décentralisation à part multiplier les échelons.

Lorsque vous êtes élu maire de Marseille en décembre 2020, vous évoquez deux sujets : d'abord l'attractivité des investisseurs puis la volonté de recoudre la ville. Comment favorisez-vous cette attractivité ?

Il faut attirer les jeunes, les moins jeunes, les associations qui créent l'emploi, les créateurs d'entreprises... Il existe plusieurs façons de créer de la richesse. L'attractivité n'est pas qu'un simple concept marketing mais elle est doit donner les conditions pour vivre ici. Et pour susciter l'attractivité, il faut du service public. L'attractivité économique se crée, elle ne se décrète pas. On a par exemple ici misé sur l'industrie touristique sans réfléchir. Le sur-tourisme ne serait pas une bonne chose pour Marseille. En revanche, un tourisme qui crée des emplois sur le territoire, cela m'intéresse.

Vous avez assisté ce lundi à l'assemblée générale de l'UPE13. Quels sont vos liens avec le monde économique ?

J'ai de bons liens avec le monde économique. Les chefs d'entreprises sont pragmatiques. J'aime tendre les bras aux patrons qui aiment le territoire. Je suis le maire de tous les Marseillais, je ne suis pas le maire d'un camp ou d'un parti. Je ne marchande pas mes convictions.

Vous venez d'évoquer l'attractivité du territoire. Or, pour attirer et pour conserver les talents sur le territoire, il faut des transports adéquats et des logements...

Il faut des transports, clairement. Pas des ronds-points. Marseille est restée trop longtemps seule et isolée. Cela date de l'époque de Gaston Deferre et c'était une erreur. Je le redis, il ne faut pas recréer les mêmes erreurs qu'il y a 60 ans. Pour rappel, Marseille en Grand a fléché des crédits sur les transports en suivant mes options, vers le Nord.

Précisément, le Plan Marseille en Grand n'est pas forcément perçu comme visible de la part des Marseillais, ainsi que le montre le sondage.

Marseille en Grand, c'est structurel, il s'agit de faire du métro et des écoles. Un métro c'est dix ans, une école c'est cinq ans. Nous avons des outils qui permettent d'aller plus vite dans la recherche de partenaires. Marseille en Grand donnera des fruits visibles dans quelques années.

Le Plan Marseille en Grand porte également la volonté d'impulser une vraie stratégie sur les industries culturelles et créatives, avec l'objectif de donner accès à des métiers de l'image, qui font rêver, à des catégories de la population issue des quartiers prioritaires.

Nous avons besoin de fixer les industries culturelles et créatives ici. D'avoir des points d'ancrage. La photo ici est très belle. Tout est là et peu de lieux sont aussi marqués et esthétiques. Marseille c'est l'antiquité, l'Italie, le béton, le turquoise...

Le sondage souligne des points faibles, notamment la gestion financière et les impôts. Comment, à la fois, investir et alléger la charge des Marseillais ?

La taxe d'habitation n'existe plus, les impôts ont baissé et les recettes de la Ville ont baissé. On nous a laissé une ville avec des cailloux dans les caisses. Il est donc difficile de créer. Une bonne gestion, c'est une gestion prévoyante. Je préférais que l'impôt n'existe pas mais c'est l'impôt qui fait une richesse, un pays, un patrimoine commun. Un impôt correctement investi est un plus pour demain.

Le président de la République ne cache pas son amour pour Marseille. C'est plus facile pour demander de l'appui ?

Le président de la République aime sincèrement Marseille. Il la comprend. Il l'aime et moi aussi. Cela aide. Emmanuel Macron a compris que c'est une ville qui a besoin de l'attention de l'Etat. Il faut être courageux pour débloquer autant d'argent et pour cela, je sais qu'il a affronté des vents contraires.

Marseille prend-t-elle enfin sa place de deuxième ville de France ?

Marseille doit être une chance pour la France. C'est mon rôle de la mettre à cette place. Je ne fais pas l'aumône, je demande simplement la justice. Marseille mérite d'être considérée.

Certains comparent Marseille à New York. Partagez-vous cette comparaison ?

Marseille c'est plus San Francisco que New York. San Francisco, comme Marseille, a une population de 900.000 habitants. Comme Marseille, San Francisco a un port de commerce, une industrie portuaire, vit dans les collines, c'est une ville d'immigration, c'est une ville qui a chuté et qui est remontée...

Vous estimez qu'il faut du temps pour redresser la Ville. Envisagez-vous un second mandat ?

Pour le moment, nous sommes au travail.

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Commentaires 4
à écrit le 08/06/2023 à 17:01
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Encore un fossoyeur

à écrit le 07/06/2023 à 9:45
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Marseille comme d'autres villes semble dirigée par une caste hors sol. Même l'élection de cette autorité fait honte à la démocratie. A force de compromis pour se faire élire on est plus entendu.

le 07/06/2023 à 11:38
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Curieuse "analyse" quand on vient de lire les résultats du sondage montrant justement que le "sol" (= les Marseillais) semblent plutôt satisfaits de leurs dirigeants...et pourtant, je ne suis pas spécialement de leur mouvance politique ; mais ça n'in...

à écrit le 07/06/2023 à 8:16
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Quand on entend un élu qu'il a "la volonté de faire", c'est qu'il ne pourra pas plus que les autres... a moins d'être un opportuniste de renaissance qui a des "appuis" !

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