Dans le Sud, la Région déploie un Plan Or Bleu et sa stratégie pour contrer les tensions autour de l'eau

Alors que la disponibilité de l'eau décroît du fait du réchauffement climatique et de l'artificialisation des sols, la consommation de cette ressource n'a cessé de croître au fil des années, laissant craindre des tensions de plus en plus exacerbées. Pour éviter cela, la Région Sud annonce un « Plan Or Bleu » destiné à économiser cette ressource et à mieux penser sa gestion. Un plan qui s'appuie sur les forces en présence, et qui n'hésite pas à s'inspirer d'expériences menées de l'autre côté de la Méditerranée, notamment en Israël.
(Crédits : DR)

Il y a à peine quelques années, l'expression « or bleu » pouvait sembler exagérée dans un pays comme la France. De fait, l'eau est une ressource renouvelable. Et les territoires les moins bien lotis sont jusqu'alors toujours parvenus à trouver des parades pour disposer d'eau tout au long de l'année.

Puis le réchauffement climatique, qui avançait jusque là sourdement, a laissé échapper ses premiers fracas. Lors de l'été 2022, 70 départements français sont concernés par des restrictions d'usage de l'eau. Des fleuves s'assèchent. Des sols se craquellent. Et des robinets sont coupés. L'impact du réchauffement climatique sur l'eau est bel et bien palpable, notamment en Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Une région où l'eau est utilisée à 70 % par le monde agricole. Elle est aussi le socle de nombreuses activités de loisirs et de tourisme, par exemple le long de ses gorges, de ses lacs et de ses massifs forestiers pour qui de graves épisodes de sécheresse peuvent être synonymes d'accès interdit. De quoi craindre une guerre de l'eau ?

Préserver les atouts régionaux


R
enaud Muselier, le président de la Région Sud, n'y croit pas. « Je le répète : il ne faut pas s'inquiéter. Notre région a toujours souffert du manque d'eau et nous avons toujours réglé ces problèmes par le passé ». Et d'ajouter à cette comparaison historique une comparaison géographique : « Nous ne sommes pas dans la même situation que la Loire. Nous avons le Rhône, le lac de Sainte-Croix, la société du Canal de Provence... On a la technique. On a les savoir-faire ». Des atouts que le réchauffement climatique nécessite néanmoins d'améliorer. D'où la volonté de la Région Sud - qui dispose déjà d'un plan Climat et qui revendique un budget dont 100 % des fonds attribués prennent en compte la préservation du climat - de s'engager sur ce sujet avec le lancement de son Plan Or Bleu. Un plan qui martèle trois mots clés : sobriété, solidarité et innovation.

Concernant la sobriété tout d'abord, le plan prévoit un investissement de 680 millions d'euros dans la réalisation d'économies d'eau, notamment en développant des projets avec la Société du Canal de Provence, société d'économie mixte qui assure l'approvisionnement en eau en Provence, détenue à plus de 80 % par les collectivités territoriales.

Solidarité régionale

Pour éviter les tensions liées à l'eau, la Région veut aussi encourager une forme de solidarité entre les différents territoires de la région dont les problématiques, les pratiques et les modes de gestion sont assez hétérogènes, ce qui peut parfois aboutir à des intérêts divergents et donc à des situations conflictuelles.

D'où la nécessité de « mettre tout le monde autour de la table », ce que prévoient depuis octobre plusieurs Assises départementales de l'eau. Doivent s'ajouter à cela, le 7 juin prochain, des États régionaux de l'eau organisés par la Région. Réunissant tous les départements, la Société du Canal de Provence ou encore l'État, ces états régionaux auront vocation à dresser un état des lieux et à envisager une stratégie qui permettra de répondre aux diverses problématiques soulevées.

Enfin, le troisième volet du plan concerne l'innovation, essentielle pour apporter des réponses aux immenses défis que présente le réchauffement climatique. Une innovation qui doit notamment porter sur la réutilisation des eaux usées pour l'irrigation, l'industrie, le nettoyage des rues ou encore la recharge des nappes souterraines. Un sujet sur lequel le président de Région promet de lancer « la plus grande expérimentation de France », en associant à ces travaux des scientifiques d'Université d'Aix-Marseille ainsi que la Société du Canal de Provence. Le territoire compte aussi un certain nombre de startups en mesure d'apporter une plus-value sur ces sujets. Celles-ci seront accompagnées au titre du soutien aux entreprises.

Inspiration israélienne

Si la Région envisage de s'attaquer à ce sujet, c'est notamment parce que les freins juridiques à la réutilisation des eaux usées en France sont en train d'être levés. Récemment, le ministère de l'agriculture Marc Fesneau a ainsi annoncé que la législation allait prochainement assouplir et permettre de clarifier les règles en la matière. Une façon pour la France de rattraper son retard alors que d'autres pays ont déjà fortement avancé sur le sujet. « En Espagne, 20 % des eaux usées sont réutilisées quand nous sommes à 3 % », assure Renaud Muselier. Mais s'il est un exemple qui l'inspire tout particulièrement, c'est bien celui d'Israël, pays qui exporte beaucoup de produits agricoles et où ce taux s'élève à 80 %.

Un exemple tel que la Région prévoit d'envoyer une mission sur place en mai prochain. Elle s'intéressera également aux méthodes d'arrosage au goutte à goutte, à la désalinisation d'eau de mer ou encore à des techniques d'épuration de l'eau à base de lumière ultraviolette. Des outils dont elle espère s'inspirer pour relever les défis de l'eau, tout en ouvrant l'économie régionale à de nouveaux marchés.

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