Qualité de l'air  : «Les zones à faibles émissions doivent être combinées à une action plus large » (AtmoSud)

Après le tabac et l'alcool, la qualité de l'air est la troisième cause de mortalité en France. Il est donc urgent d'agir, y compris dans le Sud où tous les départements sont concernés, avec des pollutions aux origines diverses. Les Zones à faibles émissions, qui visent à exclure des villes les véhicules les plus polluants, sont une réponse. Mais une réponse partielle, qui doit s'inscrire dans une politique globale d'amélioration de la qualité de l'air ... et de la qualité de vie. C'est en tout cas ce que pense l'association Atmosud, référente en la matière sur le territoire régional.
(Crédits : DR)

Oxydes d'azote, ozone, particules fines... Voilà les trois principaux polluants qui minent la qualité de l'air dans le Sud, comme l'explique Damien Piga, directeur des relations extérieures et de l'innovation chez Atmosud.

Les premiers, aussi appelés NOx, dépassent les valeurs réglementaires européennes dans plusieurs territoires de la région. « Les oxydes d'azote sont principalement émis par la combustion de carburants fossiles », que celle-ci provienne de l'industrie pétrolière, du transport routier ou maritime. Ils sont à l'origine de diverses pathologies pouvant provoquer des cancers, et le risque croît avec leur niveau de concentration dans l'air.

L'ozone, quant à lui, est le fruit d'une « recomposition de différents polluants - des oxydes d'azote et des composés organiques volatiles issus de l'industrie- accélérée par le rayonnement solaire ». D'où les nombreux pics de pollution à l'ozone en période estivale, particulièrement dans les grandes métropoles.

A ces deux polluants gazeux, il faut en ajouter un solide, en suspension : les particules fines. « Il s'agit d'une très grande famille de polluants dont l'impact varie en fonction de la composition chimique et de la taille des particules. Plus celles-ci sont fines, plus elles pénètrent l'appareil respiratoire voire la barrière sanguine ». Avec ces particules, le risque pour la santé est toujours présent mais croît avec la concentration dans l'air. Et si les deux premiers polluants épargnent certains territoires, les particules fines d'un diamètre de 2,5 microns [les plus petites, ndlr] sont présentes absolument partout. « Parmi leurs émetteurs les plus importants, on trouve le chauffage au bois, les engrais agricoles et les pesticides », énumère Damien Piga.

Atmosud, un observatoire reconnu

Gouvernée de façon collégiale par l'État, les collectivités locales, les acteurs économiques et industriels ainsi que les associations de défense de l'environnement, Atmosud est une association qui fédère, étant également agréée par le Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires.

Composée d'une équipe de soixante personnes et dotée de trois antennes à Martigues, Marseille et Nice, elle compte deux principaux piliers d'action. Atmosud est d'abord un observatoire de la qualité de l'air. Observatoire qui s'appuie sur deux outils majeurs. « Nous avons des cabines de surveillance qui aspirent l'air ambiant et permettent d'analyser sa composition. Nous nous appuyons également sur des techniques de calcul numérique pour avoir des informations sur l'ensemble du territoire. Et nous utilisons pour cela des données en provenance de l'industrie, du comptage routier, ou encore des données météorologiques et environnementales qui permettent de prendre en compte la dispersion des polluants ». Sur la base des données ainsi collectées, l'association cherche à « favoriser l'engagement des acteurs », explique Damien Piga. Que ces acteurs soient des industriels, des citoyens ou des collectivités locales.

Un impact limité

Les Zones à faibles émissions (ZFE) constituant une action publique d'amélioration de la qualité de l'air, la structure s'y intéresse forcément. « Quand on regarde la carte des pollutions sur les principales agglomérations de la région, on constate qu'elles se concentrent surtout le long des principaux axes routiers. Donc si on veut améliorer la qualité de l'air dans ces villes, on a besoin de travailler sur le transport routier ». D'autant que les polluants émis par ce dernier le sont au niveau du sol, donc tout proches des voies respiratoires des passants. Et ce, dans des espaces plutôt confinés où l'air se renouvelle peu.

Le transport routier, c'est précisément ce à quoi s'intéressent les ZFE qui « consistent en un renouvellement du parc de véhicules ». D'autres options auraient pu être choisies, comme l'interdiction de circuler sur certaines zones, quel que soit le type de véhicule. « En Italie par exemple, il existe des zones où seuls les résidents ont le droit de circuler en voiture ».

En renouvelant le parc de véhicules, les ZFE sont censées - en plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre - agir sur l'un des trois polluants cités précédemment : les oxydes d'azote. Mais de façon limitée. « Dans le transport routier, on trouve deux sources d'émission d'oxydes d'azote : les fumées d'échappement et l'usure mécanique (usure des pneus, des freines...) qui représente 60 % des émissions ». Le choix de véhicules moins polluants permet d'agir sur les fumées d'échappement mais pas sur l'usure, inévitable même pour une voiture électrique.

Dès lors, estime Damien Piga, « si l'on veut vraiment agir sur la qualité de l'air, il faut que les ZFE soient combinées à des actions plus larges ». Parmi elles, « l'arrêt de l'artificialisation des sols en ville, l'amélioration des transports en commun et le développement de la mobilité douce ».

L'écueil de l'acceptabilité

Autant d'outils qui permettraient de réduire le trafic routier, générateur de pollution de l'air, mais pas seulement. « Moins de voitures c'est aussi moins de bruit, moins d'insécurité. Cela a un impact sur la qualité de vie, sur le bien-être ». Des arguments qui auraient la vertu de favoriser l'acceptabilité de mesures restrictives à l'encontre du transport routier. Mesures qui risquent d'impacter le plus fortement les populations les moins à l'aise financièrement, posant la question de la répartition des efforts.

Une acceptabilité par ailleurs mise à mal à Marseille par l'exclusion des navires, croisières notamment, de la zone à faibles émissions. « A Marseille, 49 % des émissions d'oxydes d'azote sont d'origine maritime tandis que 33 % sont d'origine routière ». Les navires ont beau émettre plus en hauteur et en milieu semi-ouvert - ce qui limite les concentrations de polluants -, leur exclusion des ZFE peut être, là aussi, perçue par beaucoup comme injuste.

Enfin, l'acceptabilité des ZFE est mise à mal par leur caractère vertical, celles-ci étant le fruit « de lois descendantes imposées par l'État », rappelle Damien Piga. Des lois que les collectivités locales semblent avoir du mal à s'approprier pleinement comme en témoigne la faible communication de leur part sur ce sujet - selon une étude de l'Ipsos, 44 % des habitants de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur ne sauraient ainsi pas de quoi il s'agit. Pour les autres, comme pour les entreprises concernées par ces zones, de nombreuses incertitudes demeurent. Et avec elle leur lot de craintes.

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