SP3H, un outil et une stratégie qui encouragent le déploiement des nouvelles générations de carburants

Installée à Aix-en-Provence, cette entreprise a développé un scanner miniaturisé capable d'analyser la qualité d'un carburant en temps réel. Un outil qu'elle veut mettre au profit de l'essor de nouvelles générations de carburants moins polluants. Pour les professionnels, mais aussi pour les particuliers.
(Crédits : DR)

On estime qu'ils seraient responsables de 28,7 % des émissions françaises de gaz à effet de serre. Les transports sont parmi les cibles prioritaires des politiques environnementales visant à maintenir une température vivable sur terre. En témoigne le développement des Zones à faibles émissions (ZFE) dans 45 villes françaises d'ici 2025.

Pour réduire l'impact de ces transports, on peut chercher à réduire le nombre de véhicules thermiques. Ou encore à privilégier des carburants plus propres. C'est par exemple le cas des agrocarburants - plus communément appelés biocarburants -fabriqués à partir de matières agricoles telles que de la betterave ou du colza, des matières premières plus renouvelables que les énergies fossiles, mais qui ont pour défaut d'entrer en concurrence avec la production d'alimentation humaine. D'où l'intérêt de nouvelles générations de carburants, notamment de carburants de synthèse, conçus à partir de déchets en tous genres : déchets alimentaires, plastique ou encore ménagers.

Prouver l'utilisation de carburants moins polluants

Afin d'encourager l'utilisation de tous ces carburants, l'État offre aux entreprises de transports de bénéficier d'un sur-amortissement. Reste alors à prouver que le carburant utilisé est bien un biocarburant ou un carburant de synthèse. « Le groupe Volvo Renault a mis au point une technologie permettant de vérifier qu'un carburant utilise de manière irréversible du biocarburant », explique Alain Lunati, PDG de SP3H. « Mais ils ne sont pas en mesure de reconnaître un carburant de seconde ou troisième génération ». C'est sur ce point que se distingue la société aixoise.

Créée en 2005,SP3H a mis au point un scanner miniaturisé capable d'analyser la qualité d'un carburant ou d'autres types de fluides en temps réel. « Notre force est d'avoir un capteur le plus généraliste possible, que l'on spécialise grâce à l'intelligence et les modèles mathématiques que l'on y intègre », assure Alain Lunati. Un outil qui, du fait d'avoir été miniaturisé, coûte moins cher que les solutions concurrentes.

A destination de constructeurs de bus et poids lourds

Déjà, ce dispositif a séduit des acteurs de la pétrochimie, mais aussi du transport. En particulier des constructeurs de bus et poids lourds soucieux de permettre à leurs véhicules d'entrer dans les Zones à faibles émissions, et ce alors que l'électrification de ce type de transports n'est pas aisée, tant d'un point technique qu'économique.

C'est le cas de l'entreprise allemande Man à qui SP3H vend sa solution depuis le début de l'année. Devrait s'y ajouter Mercedes, ainsi qu'«un ou deux groupes de constructeurs de bus et poids lourds en 2023 ».

Une demande face à laquelle l'entreprise a pu se doter de nouvelles capacités de production, grâce au plan France Relance et au soutien de l'Ademe. Avec l'objectif de pouvoir atteindre d'ici 2024 une capacité de production de 5.000 capteurs par an, réalisée dans des locaux au sein du Technopole de l'Arbois, à Aix-en-Provence, tout en s'appuyant sur un réseau de sous-traitants. « Notre travail est de récupérer les boîtiers qu'ils nous fournissent et d'y mettre toute l'intelligence artificielle pour l'analyse du carburant ».

Grâce à ces perspectives, l'entreprise a pu se lancer et recruter. De sorte qu'elle compte désormais 13 salariés. « Nous aimerions être entre 25 et 30 d'ici deux ans ». Côté chiffre d'affaire, le cap du million d'euros devrait être franchi en 2022.

Ouvrir la porte du marché des particuliers

Ensuite, SP3H aimerait élargir sa clientèle en s'adressant aux particuliers. D'où sa présence au Consumer Electronics Show de Las Vegas en janvier prochain. « Nous allons y présenter une version de notre capteur adaptée au grand public ». Un capteur qui permettra d'évaluer un carburant à travers une application disponible sur téléphone portable. « Cela s'adresse au marché américain où l'on n'a pas fermé la porte au thermique et où les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont les mêmes ». Mais aussi au marché européen, bien que l'UE prévoie d'interdire les véhicules thermiques à l'horizon 2035.

Pourtant, «dans des pays européens comme l'Italie, l'Allemagne, les pays baltes ou scandinaves, les carburants de synthèse ne sont pas réservés aux professionnels. Les particuliers peuvent s'en procurer auprès de 8.700 pompes sur le continent ». Ce n'est pas le cas en France, pays que l'entrepreneur estime « phagocyté par le tout électrique » alors qu'on y compte encore 40 millions de véhicules thermiques. Et de s'interroger : « Que fera Mme Dupont qui a sa 307 depuis quelques années ? Dans trois ans, elle n'aura plus accès aux centre-villes. Si elle ne peut plus utiliser sa voiture, c'est une perte sèche. Et ce ne sont pas les 7.000 euros d'aides à l'achat d'une voiture électrique qui lui suffiront ».

D'où un travail d'influence mené avec d'autres acteurs défendant la possibilité pour les personnes utilisant ces carburants d'entrer dans les ZFE. Pour adoucir et rendre plus acceptable la décarbonation de nos modes de déplacements et éviter ce que l'entrepreneur qualifie de « gentrification de la mobilité urbaine », qui conduirait à exclure des centres-villes les personnes dont les revenus sont faibles, d'autant plus lorsque les réseaux transports en commun ne sont pas suffisamment adaptés.

« Nous voulons rallonger un peu la période de transition tout en réduisant significativement les émissions ». Le temps que des solutions réellement décarbonées - et accessibles à tous - soient mises en place.

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