Tarian Pharma développe un bouclier contre les effets secondaires des traitements anti-cancéreux

A Grasse, cette biotech a mis au point un médicament pour prévenir les brûlures causées par la radiothérapie chez des patientes atteintes de cancer du sein. La mise sur le marché est prévue en 2025. En parallèle, elle veut développer, à partir de la même molécule, d’autres médicaments ciblant d’autres types d’effets secondaires, dans le cancer du sein mais pas seulement.
(Crédits : DR)

On le sait, les effets secondaires liés aux thérapies anti-cancéreuses peuvent être lourds, voire handicapants. C'est pour cette raison que désormais, de nombreux traitements sont assortis de la prescription de médicaments censés les prévenir. Il en existe pour éviter les nausées, la chute du nombre de plaquettes, la fatigue... mais rien contre les troubles liés à la peau et au cuir chevelu.

Pourtant, ces derniers posent problème chez deux tiers des patients traités pour un cancer. Et chez un de ces patients sur trois, ils sont tellement handicapants qu'ils conduisent à modifier le traitement, au risque de réduire ses chances de réussite.

Pour prévenir ces effets secondaires, Philippe Andres et ses deux associés - tous anciens collègues au sein du site R&D de Galderma à Sophia Antipolis - fondent Tarian Pharma. « Tarian signifie bouclier en gallois [un des associés est gallois, ndlr]. Nous avons choisi ce terme car notre mission est de protéger les malades face à des effets secondaires qui ont des conséquences psychologiques, sociales et professionnelles ».

Repositionnement d'une molécule déjà utilisée en dermatologie

Pour construire ce bouclier, les trois hommes partent d'une molécule qu'ils ont côtoyée lorsqu'ils travaillaient pour Galderma. « Elle était utilisée contre la rosacée, une maladie qui provoque des rougeurs sur le visage. On a repositionné cette molécule en oncologie car elle a la capacité d'atténuer quatre types d'effets indésirables ». Le premier d'entre eux, c'est l'alopécie, ou perte des cheveux. Le second, ce sont les brûlures liées à la radiothérapie. Le troisième : le syndrome douloureux des paumes de main et plantes de pied. Et enfin, une forme sévère d'acné que l'on retrouve dans certaines immunothérapies.

Quatre effets secondaires non pris en charge, qui se manifestent tous dans les traitements contre les cancers du sein, la première cible de Tarian Pharma. Un positionnement qui s'explique aussi par la fréquence de cette maladie et par le symbole qu'elle porte, touchant notamment des patientes en activité professionnelles pour qui les effets secondaires peuvent s'avérer particulièrement pénalisants.

Pour les traiter, la biotech a choisi de proposer son médicament sous forme de gel à appliquer localement sur la peau. « Cela permet d'éviter les interactions entre médicaments, d'autant que ces personnes en utilisent souvent plein à la fois ».

Une première formulation contre les brûlures

Au bout de deux années de mise au point au cours desquelles 150 protocoles ont été testés, la société a sélectionné en mai 2020 une formulation baptisée TAR 05 20, indiquée contre les brûlures causées par la radiothérapie. « Nous sommes entrés dans les premières étapes de son développement. Les résultats précliniques devraient arriver début juin. Nous pourrons ensuite lancer les essais cliniques chez des volontaires sains d'ici décembre 2021 (Phase I) puis chez des malades d'ici un an (Phase II) ». La mise sur le marché est envisagée à l'horizon 2025.

En parallèle, l'entreprise souhaite étoffer son portefeuille de produits pour cibler les trois autres effets secondaires. Avec quelques subtilités à maîtriser. « Dans le cas de l'alopécie, il faut être en mesure d'appliquer le médicament sur le cuir chevelu de patients qui ne sont pas chauves. Il faudra développer un adaptateur pour y parvenir ». Quant au syndrome affectant les paumes de main et plantes de pied, l'enjeu sera de trouver une formulation capable de pénétrer la peau, plus épaisse sur ces zones.

« A la fin de la phase II, nous aurons des éléments de preuve pour nos quatre indications. Cela permettra aux industriels de déterminer la bonne valeur du portefeuille ».

Une dizaine de millions d'euros à lever

Car Tarian Pharma n'a pas vocation à prendre en charge la commercialisation de ses produits. « Soit on signera un partenariat avec un industriel sur l'ensemble de notre portefeuille, soit on vendra la compagnie », envisage Philippe Andres.

Selon lui, si les tests se révèlent concluants pour les quatre indications visées, les traitements proposés pourraient générer 2 milliards d'euros de ventes annuelles. Et au-delà des cancers du sein, la société a l'intention d'élargir ses indications à ceux du poumon, du cou, du côlon ou encore du pancréas.

Mais pour aller au bout de ses ambitions, la société doit trouver les moyens de financer les études à venir. « Jusqu'à ce jour, nous nous sommes appuyés sur 250.000 euros de fonds propres afin de ne pas dépendre de la chronologie d'une levée de fonds. Mais cette fois, nous allons en organiser une. ». Une levée de fonds en deux phases qui devrait démarrer d'ici la fin d'année, avec un objectif de 2 à 4 millions d'euros d'abord, puis 6 à 8 millions d'euros dans un second temps.

Tarian Pharma a aussi l'espoir de disposer d'ici peu de fonds publics suite à sa candidature au concours d'innovation I-lab dans le cadre du programme Investissement d'avenir. « Cela libérerait tout de suite des fonds pour recruter ». Car l'entreprise entend s'agrandir progressivement, pour atteindre une équipe de dix personnes d'ici 2023.

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