Vect-Horus poursuit sa R&D pour répondre aux besoins d’une médecine de précision

Installée à Marseille, cette startup est spécialisée dans le transport d’agents thérapeutiques et d’imagerie. En collaboration avec le monde académique, elle a développé la plateforme VECTrans qui s’adresse aux industries pharmaceutiques désireuses de proposer une médecine ciblée. Elle vient de clôturer une levée de fonds pour poursuivre son développement.
(Crédits : DR)

Ils sont nombreux à s'y être cassés les dents, sur cette barrière hémato-encéphalique. Séparant le circuit sanguin du système nerveux central, elle protège le cerveau des agents pathogènes et des toxines et présents dans le sang, ne laissant passer que les nutriments nécessaires au fonctionnement du cerveau. Si cette barrière nous rend donc un grand service, elle donne du fil à retordre à ceux qui entendent soigner les pathologies cérébrales puisqu'elle empêche le passage de nombreuses molécules.

Pour y remédier, plusieurs solutions sont utilisées. On peut opter pour des molécules suffisamment petites pour se frayer un chemin, mais les perspectives restent limitées. Une autre possibilité, plus invasive, est d'utiliser des ultrasons pour ouvrir la barrière. Le risque est alors de laisser entrer toutes sortes d'indésirables. C'est donc sur une troisième option que s'est porté le choix de Vect-Horus, entreprise fondée en 2005 à Marseille.

Comme un petite poignée d'acteurs à l'échelle mondiale, elle s'appuie sur une stratégie baptisée RMT ou transcytose médiée par récepteurs. Une stratégie proche de celle du Cheval de Troie où il s'agit de leurrer des récepteurs de la barrière grâce à des vecteurs. Assimilés à des éléments que la barrière laisse passer en temps normal, ces vecteurs dissimulent en fait les molécules que l'on veut envoyer dans le cerveau et qui auraient été bloqués sans ce transport clandestin.

Deux familles de vecteurs brevetées

Pour l'heure, le spin-off né du CNRS-AMU a identifié cinq familles de vecteurs dont deux ont été brevetées. "Cela exige un gros travail scientifique d'optimisation pour donner aux vecteurs des propriétés intéressantes et améliorer le transport du médicament vers sa cible", explique Alexandre de Tokay, PDG de l'entreprise.

Pour ce, Vect-Horus s'appuie sur le laboratoire commun de recherche créé avec Aix Marseille Université, sur le site de la faculté de médecine de la Timone. En 2019, elle y emménage, se rapprochant d'un groupement de spécialistes en neurosciences. "Cela nous permet de travailler au cas par cas avec des équipes spécialisées en neuro-oncologie ou bien en maladies neuro-dégénératives".

Si le cerveau est la cible numéro un de l'entreprise, elle peut aussi transporter les molécules vers d'autres organes. "Il se trouve que les récepteurs que nous ciblons sont ubiquitaires. C'est-à-dire qu'ils sont également présents dans d'autres organes. Ils ont par ailleurs la particularité d'être surexprimés sur certains d'entre eux et notamment ceux qui présentent une tumeur". Ainsi, le LDL, plus connu sous le nom de mauvais cholestérol, est un des récepteurs de la barrière hémato-encéphalique identifiés par Vect-Horus. Il se trouve qu'il est surexprimé dans le pancréas lorsque celui-ci est cancéreux. De quoi ouvrir des portes vers un traitement ciblé contre cette maladie particulièrement létale.

Une collaboration en trois temps avec les industries pharmaceutiques

Grâce à ses connaissances, Vect-Horus a pu mettre au point VECTrans, une plateforme qui s'adresse à l'industrie pharmaceutique en Europe, aux États-Unis et au Japon. "Nous avons travaillé avec Servier, Sanofi, Johnson & Johnson, Astellas... Nous avons aussi signé un accord de licence avec RadioMedix qui est spécialisée dans le développement de molécules qui font de l'imagerie et de la radiothérapie". L'enjeu serait alors d'utiliser un vecteur pour guider des agents d'imagerie vers une tumeur qui, une fois identifiée, pourrait être tuée par des agents de radiothérapie transportés par le même vecteur. Des essais sont en cours dans le cadre d'une étude co-développée par Vect-Horus et RadioMedix à Houston, en lien avec le premier centre anti-cancer des États-Unis.

Le co-développement est en fait la première étape des partenariats tels qu'envisagés dans le modèle économique de l'entreprise. "On signe une collaboration de recherche sur une biomolécule qui appartient à la pharma, qui le conjugue à un de nos vecteurs. Cette collaboration est facturée en temps ingénieur ou post-doc. Ensuite, si le partenaire veut poursuivre les tests, il signe un accord de licence pour pouvoir utiliser notre technologie qui fera partie de la molécule médicamenteuse qu'il développe". S'il s'avère que le vecteur améliore l'efficacité du traitement, la pharma peut alors développer sa molécule vectorisée, reversant à Vect-Horus des royalties en plus des revenus de licence. "Soit plusieurs dizaines de millions d'euros pour le développement du produit jusqu'à l'autorisation de mise sur le marché", précise Alexandre Tokay.

Un modèle hybride où la prise de risque est limitée. "Le risque que prennent nos actionnaires porte sur la technologie et non sur le développement pharmaceutique qui repose sur notre partenaire".

L'an dernier, l'entreprise a réalisé un chiffre d'affaire d'environ 900 000 euros. De quoi amortir une partie de la recherche mais pas d'assurer une rentabilité en raison des importants coûts et investissements. C'est pour cette raison qu'elle vient de clôturer une nouvelle levée de fonds à hauteur de 6,7 millions d'euros. De quoi développer de nouvelles familles de vecteurs, dans le cadre de la prise en charge de cancers mais pas seulement, sur un champs d'organes cibles élargis. "Nous voulons aussi avancer dans la vectorisation de molécules innovantes que sont les acides nucléiques capables d'inhiber l'expression d'un gène". Un champ d'études qui ouvre des perspectives dans le traitement de maladies musculaires notamment.

Enfin, Vect-Horus nourrit le projet de concevoir ses propres produits sur le long terme. Ce qui prend du temps et exige d'importants moyens financiers. Elle peut d'ores et déjà s'appuyer sur une équipe de 37 personnes dont vingt-cinq chercheurs et une demi-douzaine de techniciens.

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